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Posts written by Mallory Quinn

view post Posted: 9/12/2021, 17:44     Amnesie selective - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 2




Malgré les calmants, Terry passa une nuit agitée. Ses rêves étaient peuplés d’images qui défilaient à tout vitesse tel un kaléidoscope. Des visages, des lieux, des bribes de phrases qui finirent par l’éveiller en sursaut. Mais la seule image qui lui resta à l’esprit fut celle d’une jeune femme blonde à la mine boudeuse. Incapable de se rendormir, il resta à fixer le plafond, écoutant les bruits qui résonnaient dans l’hôpital silencieux et se mit à attendre avec impatience l’arrivée d’Albert.

Une conversation surprise entre deux femmes de ménage lui permit de découvrir qu’il comprenait l’espagnol. Il s’en ouvrit à son ami qui lui confirma qu’il parlait plusieurs langues étrangères. En discutant à bâtons rompus, Terry réalisa qu’il se souvenait des événements qui avaient récemment fait la une de l’actualité. Il se souvenait des élections présidentielles et que Barak Obama avait été réélu. Il se rendit compte également qu’il se souvenait du fonctionnement de la tablette tactile qu’Albert lui avait apportée. Mais sa vie personnelle restait obstinément bloquée au fond de sa mémoire, ce qui l’inquiétait de plus en plus malgré les affirmations d’Albert qui l’encourageait à être patient.

Puis celui-ci lui annonça qu’il allait malheureusement devoir le laisser pour honorer plusieurs rendez-vous. Avant de s’en aller, il aida son ami à s’installer dans le fauteuil près de la fenêtre. Terry laissait son regard errer sur la cour enneigée de l’hôpital quand la silhouette d’une femme attira son attention. La femme fut retenue par un passant avec lequel elle échangea quelques mots avant de sortir un stylo et de signer une feuille qu’il lui tendait. Quand elle se retourna, Terry reconnut le visage qu’il avait vu en rêve.

« Je connais cette femme ! S’exclama-t-il. »

Albert suivit son regard et vit la femme entrer dans le bâtiment.

« Tu te souviens d’elle ? Demanda-t-il.

- Oui. J’ai rêvé d’elle cette nuit.

- Vraiment ? Voilà qui est étonnant ! »

Le visage d’Albert affichait à la fois surprise et consternation, ce qui poussa Terry à l’interroger plus avant.

« Pourquoi est-ce étonnant ?

- Parce qu’elle et toi, vous... Enfin, je ne peux pas te le dire, tu dois t’en souvenir tout seul.

- Albert ! Implora Terry. Aide-moi un peu. De quoi aurais-je l’air si elle vient pour me voir et que je suis pas capable de l’appeler par son nom.

- Il est probable qu’elle soit là pour toi, en effet. D’autant que j’ai prévenu le théâtre que tu avais eu un accident et que tu serais indisponible pendant plusieurs jours. Très bien, poursuivit-il après une hésitation. Elle s’appelle Susanna Marlow et est comédienne comme toi. En ce moment, vous répétez une pièce ensemble, mais ne comptes pas sur moi pour t’en dire plus. J’avoue que j’avais imaginé que tes premiers souvenirs concerneraient quelqu’un que tu connaîtrais depuis plus longtemps. Moi par exemple, ou...

- Ou qui ?

- Non, non, non ! Il vaut mieux que je file avant de me laisser emporter à dire des choses qui pourraient nuire à ta guérison, protesta Albert en se levant. Je repasserai ce soir, d’accord ? »

Puis il sortit en toute hâte avant que Terry ne le presse une nouvelle fois de questions. Dans le couloir, il croisa la dénommée Susanna qui fronça les sourcils. Celle-ci pénétra dans la chambre de son partenaire dans un grand envol de son manteau de fourrure.

« Seigneur, Terry ! J’étais folle d’inquiétude pour toi ! Quand j’ai appris que tu avais eu un accident, je me suis précipitée ici ! Dieu merci, tu n’as pas l’air trop sérieusement blessé, babilla-t-elle. »

Elle pressa sa joue contre celle du jeune homme dans un simulacre d’accolade et il fut enveloppé dans les effluves d’un parfum lourd et capiteux, probablement hors de prix, qui lui fit froncer le nez. Il se souvint d’avoir déjà respiré ce parfum et revit des images de la jeune femme. Une scène encombrée, des décors en mouvement, des répliques échangées... Mais il y avait aussi autre chose. Une conversation qui lui échappait mais dont il était sûr qu’elle était importante. Quand il s’intéressa de nouveau à elle, Susanna était plantée devant la fenêtre pour suivre des yeux Albert qui s’éloignait.

« C’est lui ? Demanda-t-elle.

- Lui qui ? Répondit prudemment Terry.

- Ton ami, bien sûr ! Celui dont tu m’as parlé hier.

- C’est mon ami Albert, en effet. »

Sans qu’il sache pourquoi, Terry sentait qu’il valait mieux ne pas trop en dire à cette femme. Il décida de rester très prudent dans les réponses qu’il lui ferait. De plus, si elle n’était pas au courant de son amnésie, il pourrait peut-être lui tirer des renseignements utiles. Le profond soupir qu’elle poussa le conforta dans sa décision.

« Il faut reconnaître qu’il est très bel homme, se lamenta Susanna. C’est bien ma chance ! Pourquoi faut-il que je tombe toujours sur des hommes qui ne sont pas disponibles ? Vous cachez bien votre jeu, tous les deux. En vous voyant, jamais on ne croirait que vous êtes... Enfin, tu vois ! »

Terry ne voyait pas grand chose, au contraire, et les péroraisons de la voix haut perchée de Susanna commençaient à lui vriller les tympans, mais il voulait en savoir plus. Il fit donc un effort pour ignorer la migraine qui menaçait et se concentrer sur sa visiteuse.

« Ce que je voudrais bien savoir, c’est ce que toi, tu vois, Susanna.

- Oh, ne fais pas ton indigné ! Je suis très flattée que tu m’ai mise dans la confidence, tu sais. Je ne comprenais pas pourquoi tu ne t’intéressais pas à moi. Mais puisque toi et lui êtes déjà en couple, je n’ai qu’à m’incliner. Ton secret est entre de bonnes mains avec moi, ne t’inquiètes pas. Et je suis même disposée à t’aider, si tu veux. Dis mois plutôt quand tu pourras revenir au théâtre.

- D’ici quelques jours, je pense, avança prudemment Terry. Mais comment comptes-tu m’aider ?

- Cette pièce est très importante pour ma... pour notre carrière à tous les deux. Évidemment, si on savait que tu es de l'autre bord... C’est le public féminin qui a fait ton succès. Toutes tes fans seraient terriblement déçues si elles apprenaient que tes préférences vont vers les garçons. Je suis donc tout à fait disposée à laisser croire que toi et moi...

- Je comprends surtout que tu ne dirais pas non à un peu de publicité. Et qu’une liaison entre les deux acteurs principaux de la pièce, surtout si elle remporte le succès escompté, te permettrait de faire la une des journaux !

- Ne le prends pas comme ça ! Il n’y a pas de mauvaise publicité pour les gens comme nous. Tant qu’on parle de nous, on ne nous oublie pas.

- Je déteste la publicité, Susanna !

- Et bien pas moi ! Nous en reparlerons quand tu auras réfléchi, trancha Susanna dont le ton contenait une menace implicite. J’annoncerai à Robert que tu pourras reprendre les répétitions la semaine prochaine. Salue ton ami pour moi. »

La comédienne frotta a nouveau sa joue contre celle de Terry et s’en alla.

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Terry écouta décroître le claquement de ses talons hauts. La tête prise dans un étau il sentit le souffle lui manquer alors que le souvenir d’une scène récente émergeait de sa mémoire en berne. Il revoyait le théâtre, sa loge dans les coulisses où il enfilait son manteau et Susanna se jetant à son cou pour l’embrasser. Il essayait de la repousser mais elle s’accrochait avec toute la force de sa détermination.

« Je t’aime, Terry ! Psalmodiait-elle en boucle. Et je sais que tu m’aimes aussi.

- Désolé Susanna, mais tu te trompes. Tu ne m’intéresses pas.

- Mais c’est impossible ! Je t’aime tant ! Tu ne peux pas me repousser. Nous serions si heureux ensemble. Je t’en prie, donne-nous une chance. Tu finiras par m’aimer, j’en suis sûre.

- Il n’y aura jamais rien entre nous Susanna, combien de fois devrais-je te le répéter. Je ne tomberai jamais amoureux de toi, c’est sans espoir. D’ailleurs, j’ai déjà quelqu’un dans ma vie.

- Qui est-ce ? Qui est cette femme ? Elle ne peut pas t’aimer autant que moi, c’est impossible !

- Il ne s’agit pas d’une femme. Je n’ai aucune affinité avec les femmes, Susanna. Je préfère les garçons, et je suis très heureux comme ça ! »

-----oooOooo-----



Il revoyait la mine éberluée de sa partenaire comme si la scène s’était déroulée la veille... Elle s’était déroulée la veille, d’ailleurs ! Ensuite il était parti rejoindre Albert et l’accident s’était produit.

Albert... Était-ce lui dont il parlait ? Partageait-il sa vie ? Cela expliquerait bien des choses. L’étrange complicité qu’il avait ressentie avec le jeune homme et la confiance qu’il lui avait spontanément accordée. De même que l’inquiétude qu’Albert avait manifesté à son réveil. Son désarroi était évident, de même que son soulagement en constatant que Terry n’était pas grièvement blessé. Si Albert était son ami de coeur, cela éclairait aussi d’un jour nouveau les énigmatiques propos de tout à l’heure, quand il déplorait que Terry ne se soit pas souvenu de lui en premier. Oui, quelqu’un d’amoureux pourrait éprouver ce genre de regret.

Terry essaya de s’interroger avec autant d’objectivité que possible. Si sa mémoire lui faisait défaut, ses sentiments eux, ne devaient pas avoir disparu. Éprouvait-il pour Albert autre chose que de l’amitié ? Ce dont il était sûr, c’était que la femme qui venait de sortir n’éveillait absolument rien en lui. Aucune attirance, ni sentimentale, ni même simplement physique.

Lorsque l’infirmière vint lui apporter son déjeuner, il la détailla avec soin. Elle était jeune et plutôt jolie, pour autant qu’il puisse en juger et rougit sous son regard insistant. Elle essayait de se montrer professionnelle mais il était évident que l’attention du jeune acteur la troublait. Cela amusa beaucoup Terry mais ne suscita chez lui aucun désir de pousser le jeu plus loin.

Dès qu’il en eut l’occasion, il prit sa tablette et se mit à surfer sur le Net afin de faire des recherches sur lui. De nombreux articles lui étaient consacrés et il découvrit même qu’il possédait un blog. De nombreux fans lui laissaient des messages, certains drôles, d’autres émouvants. Il aurait aimé leur répondre mais ne se souvenait plus de son mot de passe. Il se rabattit donc sur les photos et les articles qui parlaient de lui. Il se rendit vite compte qu’il n’apprendrait rien sur sa vie privée par ce biais. Pourtant en examinant les photos qu’il trouva, il constata que rares étaient celles où il était accompagné. Une ou deux fois il apparaissait au bras de sa partenaire, surtout lors des premières, à la sortie d’un nouveau film, mais la plupart du temps il était seul.

Évidemment, s’il était homosexuel, rien d’étonnant à ce qu’on ne le voit pas avec une femme différente chaque semaine. Quand à s’afficher au bras d’Albert... Ainsi que l’avait dit la désagréable Susanna, ce serait s’aliéner le public féminin qui avait fait de lui la vedette qu’il était. Malgré la libéralisation des moeurs, cela risquait de mettre un sérieux frein à sa carrière.

Des coups timides frappés à sa porte le tirèrent de ses réflexions. Puis la porte s’ouvrit lentement et une jeune femme fit son entrée. Elle était chaudement emmitouflée dans une épaisse doudoune rouge. Un bonnet, des gants et une écharpe blancs complétaient son accoutrement et elle serrait dans ses mains un petit pot de fleurs contenant une primevère rouge. Visiblement très intimidée, elle gardait les yeux baissés et se dandinait d’un pied sur l’autre. Terry pinça les lèvres, contrarié. Sûrement une admiratrice qui avait appris, Dieu sait comment, qu’il séjournait dans cet hôpital. Il en toucherait deux mots au médecin. Hors de question que des hordes de fans ou de journalistes se précipitent ici pour le bombarder de questions oiseuses ! Et par dessus tout, hors de question que la nouvelle de son amnésie se répande !

« Qui êtes vous ? Et que faites vous dans ma chambre ? Demanda-t-il d’une voix sèche. »

La jeune personne releva la tête et l’acteur éprouva un choc en croisant le regard des prunelles les plus vertes qu’il ait jamais vues ! Nul besoin de retrouver la mémoire pour savoir qu’il n’avait jamais rencontré des yeux pareils !

« Monsieur Granchester ? Je ne voulais pas vous déranger, mais il fallait que je vienne... J’étais tellement inquiète...

- Écoutez, Mademoiselle...

- Neige. Candice Neige, mais mes amis m’appellent Candy.

- Mademoiselle Neige. Je suis flatté que vous vous fassiez du souci pour moi, mais comme vous pouvez le constater, je n’ai rien de grave et je sortirais sans doute demain. Je ne sais pas comment vous m’avez trouvé, mais...

- J’étais là ! Quand je vous ai vu étendu sur le sol et le sang qui coulait de votre tête... Alors j’ai suivi l’ambulance qui vous a emmené ici... Je me sentais si désemparée...

- C’est très gentil de votre part, mais tout va bien. Répondit Terry, amusé par la nervosité de sa visiteuse. Ces fleurs sont-elles pour moi ? »

La jeune femme regarda le pot qu’elle tenait toujours dans les mains comme si elle se souvenait juste à cet instant de son existence. Puis elle s’avança précipitamment pour le poser sur la table de chevet. Elle s’y prit avec tant de maladresse qu’elle renversa le verre qui s’y trouvait et fit tomber la boîte de médicaments. En grommelant des excuses incompréhensibles, elle s’accroupit pour réparer les dégâts. En cherchant des mouchoirs en papier pour éponger le sol, elle accrocha le couvre-lit et Terry réussit à rattraper de justesse la tablette hors de prix qui menaçait de s’écraser au sol. Candy se releva, les joues en feu, sans que le malade puisse déterminer si cela était dû à la gêne ou aux vêtements d’hiver qu’elle n’avait pas quittés.

« Vous êtes toujours aussi maladroite ? Demanda-t-il avec humeur.

- Seulement quand je suis nerveuse. Je suis vraiment désolée, tout cela est de ma faute.

- N’en faites pas toute une histoire. Il n’y a rien de bien grave.

- Je parlais de l’accident ! Je me sens responsable...

- Pourquoi ? C’est vous qui conduisiez le bus ? »

A vrai dire, Terry imaginait assez mal un aussi petit bout de femme aux commandes d’un tel mastodonte. Rien d’étonnant à ce qu’elle ait perdu le contrôle.

« Le bus ? Non, mais c’est pour éviter ma voiture que le bus a fait une embardée et qu’il a dévié de sa trajectoire. Je suis désolée...

- Vous pouvez l’être ! S’emporta Terry. Vous rendez-vous compte de ce qui aurait pu arriver ? Je devrais vous poursuivre en justice !

- Oh non ! S’il vous plait ! Je suis vraiment désolée, répéta-t-elle. Je ferais n’importe quoi pour m’excuser, mais ne portez pas plainte contre moi !

- Vous n’êtes pas assurée ?

- Bien sûr que si ! Mais...

- Alors vous n’avez pas à vous inquiéter. L’assurance paiera. Je parlerai demain à mes avocats mais d’ici là, rentrez chez vous et ne parlez à personne. Si vous révélez à qui que ce soit l’endroit où je me trouve, je vous jure que je vous colle un procès aux fesses !

- Ne soyez pas grossier !

- Sortez de ma chambre ou vous allez voir ce que c’est que la grossièreté ! DEHORS ! »

Offusquée, Candy déguerpit à toutes jambes non sans lui jeter un regard mauvais. Nullement impressionné, Terry ne put qu’admirer une nouvelle fois le vert insondable de ses iris. Il regrettait d’avoir joué les malades irascibles, mais n’avait aucune envie de s’encombrer d’une fan déjantée qui s’imaginait être à l’origine de son accident. Pas plus qu’il n’avait l’intention de la traîner en justice d‘ailleurs. Il allait la laisser mariner dans son jus quelques jours, puis s’arrangerait pour lui faire parvenir une photo dédicacée et tout rentrerait dans l’ordre. Enfin, il l’espérait.

Il continua à faire ses recherches sur Internet jusqu’à ce qu’il tombe sur une photo de lui en compagnie de la célèbre Eléonore Baker lors d’une soirée de bienfaisance. Aussitôt son mal de tête s’accentua et il prit un des calmants conseillés par le médecin. L’image de cette femme le hantait sans qu’il sache pourquoi. Il s’étendit en espérant que les souvenirs lui reviendraient et sombra dans le sommeil sans s’en apercevoir. Il ne se réveilla qu’au retour du Docteur Mills qu’il accueillit avec un grand sourire.

« Vous aviez raison, Docteur !

- A quel propos ?

- Ma mémoire ! Elle revient petit à petit. C’est merveilleux ! Je me souviens de ma mère !

- Tant mieux ! Cela me conforte dans ma décision de vous laisser sortir. Vos derniers résultats d’analyse sont excellents. Il n’y a aucune raison de vous garder plus longtemps. Par contre je vous recommande un repos complet pendant quelques jours. Cette consigne ne devrait pas être trop difficile à suivre étant donné ce que nous annonce la météo. »

Comme son patient le regardait sans comprendre, il précisa :

« N’avez-vous pas écouté les infos ? On prévoit une tempête de neige sur New York comme on en a pas connue depuis quinze ans ! Beaucoup de nos concitoyens on quitté la ville, mais ils exagèrent. Le pire que nous risquions à mon avis, c’est quelques jours au chaud dans nos appartements. Si vous n’êtes pas obligé de sortir, c’est la meilleure chose à faire. Votre ami a laissé une adresse où le joindre. Contactez-le et demandez-lui de passer vous chercher demain dans l’après-midi. »

Terry prit le papier que le médecin lui tendait et y jeta un coup d’oeil.

« Hé ! Mais c’est mon adresse !

- Je suis ravi de constater par moi-même qu’effectivement vos souvenirs vous reviennent, sourit le Docteur Mills. Prévenez Monsieur André.

- C’est inutile. Il a prévu de passer dans la soirée.

- Il l’a fait ! Annonça le médecin. Mais comme vous dormiez, il n’a pas voulu vous déranger. »

Terry se sentit terriblement déçu à cette nouvelle. Puis il utilisa le téléphone de sa chambre et prévint Albert. Celui-ci lui confirma qu’il viendrait le chercher et qu’il avait fait des provisions en prévision de la tempête. Ils avaient de quoi soutenir un siège, selon lui.

Décidément, constata Terry, Albert se comportait comme s’il était chez lui. Ce qui était sans doute le cas s’ils étaient aussi intimes qu’il le supposait. Malgré tout, il se demandait s’il arriverait à se conduire avec autant de naturel. Quoi qu’il fasse, il ne retrouvait aucun souvenir de sa vie avec Albert. Or il ne voulait en aucun cas le blesser. Comment se comporter dans ces conditions ? Avec un soupir, Terry décida de reporter toutes ses interrogations au lendemain. Il serait toujours temps d’aviser lorsqu’il serait au pied du mur.


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 17:42     Amnesie selective - Les fanfictions de Noël
Bonjour à toutes

Noël est un rendez-vous que je tiens à honorer chaque année avec une petite fic. Cette année, et au vu de la morosité ambiante, j'ai décidé de mettre un peu d'humour dans le le forum. Je vous propose donc la fic que je viens de terminer sur l'amnésie.

Je sais que c'était le sujet proposé pour l'année dernière, mais à l'époque, je n'étais pas trop inspirée par l'idée. J'avais commencé mais... Ne vous étonnez donc pas si vous trouvez des références à des événements de l'année dernière, c'est normal.

Je vous souhaite à toutes un joyeux noël !


AMNESIE SELECTIVE




CHAPITRE 1




Le jeune homme se hâtait dans les rues animées de New York. La ville avait toujours bourdonné d'activité, mais à l'approche des fêtes de Noël, c'était une véritable frénésie qui s'était emparé de ses habitants qui envahissaient les boutiques malgré la neige qui tombait depuis plusieurs jours et les chaussées glissantes. Chaudement emmitouflé dans son épais manteau de cachemire, il portait également une longue écharpe qui non content de le protéger du froid piquant de décembre, avait également l'avantage de préserver son incognito. Elle dissimulait également le sourire qui étirait ses lèvres car Terrence Granchester avait toutes les raisons d'être heureux.

D'abord, la pièce qu'il répétait s'annonçait comme un succès. Il le savait, le sentait dans ses tripes. Comme lorsqu'il avait signé son premier contrat pour son premier vrai rôle au cinéma. A l'époque, personne n'était prêt à investir un dollar sur cette production futuriste et le réalisateur avait mis des années à réunir un budget de misère pour monter son projet. Ce budget minimaliste avait justifié le recours à de jeunes acteurs inconnus payés au tarif syndical. Le tournage avait été mené tambour battant afin de ne surtout pas dépasser les délais. Les décors étaient faits de bric et de broc et tenaient parfois avec des bouts de ficelles. Quant aux effets spéciaux, ils étaient réduits à leur plus simple expression. Mais il y avait cru, et il avait eu raison ! Sorti discrètement dans un petit nombre de salles, le film avait bénéficié d'un incroyable bouche à oreille. En quelques mois, il avait rapporté des millions à son réalisateur et la célébrité à son acteur principal. Deux suites réalisées pour exploiter le succès du premier opus avaient propulsé Terrence Granchester au firmament des stars d'Hollywood. Les propositions avaient afflué pour des films de plus en plus ambitieux dont le budget se chiffrait désormais en dizaines de millions de dollars et avaient confirmé le talent du jeune acteur. Il était désormais la star la mieux payée d'Hollywood et refusait plus de scripts qu'il n'en acceptait. Et c'était au sommet de sa gloire qu'il avait décidé de mettre sa carrière cinématographique en suspens pour renouer avec ses premières amours : le théâtre !

Une passion qu'il tenait sans doute de sa mère. Bien que fort peu de personnes soient au courant car tous deux avaient toujours eu le plus grand soin de protéger leur vie privée, Terrence Granchester était le fils de la célèbre Eléonore Baker, une des actrices les plus en vue de Broadway. Malgré de nombreuses propositions, Eléonore Baker avait toujours refusé d'abandonner sa carrière sur les planches pour les sunlights d'Hollywood. Tourner des dizaines de fois la même scène jusqu'à ce que tombe le verdict libérateur du metteur en scène : « Coupez ! Elle est bonne. On la garde ! », très peu pour elle. Eléonore préférait le délicieux goût d’éphémère que lui offrait le théâtre. La communion avec le public qui faisait que chaque représentation était aussi différente de celle de la veille qu’elle le serait de celle du lendemain. C’était une perpétuelle remise en question de son talent que son fils avait eu besoin de ressentir à son tour. Et jusqu’à présent, il adorait ça !

Ce que Terrence n’avait pas prévu au moment où il avait signé avec Robert Hattaway, c’était l’attention que lui porterait une des actrices de la troupe, Susanna Marlow. A un talent de comédienne indéniable, la jeune femme alliait malheureusement un caractère qui faisait d’elle quelqu’un d’insupportable ! Sa blondeur, ses yeux d’azur et sa silhouette de rêve avaient permis à Susanna d’obtenir tout ce qu’elle voulait depuis son plus jeune âge. Elle n’imaginait pas que l’on puisse lui dire non. Or elle avait jeté son dévolu sur Terrence dès son arrivée, usant de ses charmes pour le séduire. Mais celui-ci n’était pas venu à New York pour avoir une aventure galante. Outre qu’il détestait mélanger vie privée et vie professionnelle, il n’était pas intéressé par la jeune femme. De plus il avait appris à se méfier des comédiennes décidées à se servir de lui pour s’offrir un coup de pub en s’affichant à son bras. Pourtant, bien qu’il ait tout essayé pour se débarrasser de Susanna, celle-ci refusait de comprendre la signification du mot NON. Encore tout à l’heure, elle lui avait déclaré sa flamme avec tant d’insistance qu’il avait été sur le point de devenir grossier. Puis soudain la solution lui était apparue. Il revoyait encore le visage sidéré de sa partenaire après ce qu’il lui avait dit. Laisser Susanna Marlow sans voix était un exploit dont il n’était pas peu fier. Au moins maintenant pouvait-il espérer qu’elle le laisserait tranquille.

Son ami Albert serait ravi d’apprendre la manière dont il s’était sorti de ce guêpier. Car la troisième raison de la bonne humeur de Terrence était l’arrivée de son vieil ami. C’est avec lui qu’il avait rendez-vous, ce qui expliquait sa hâte. Les deux hommes se connaissaient depuis des années et avaient tissé entre eux des liens indéfectibles. Ils s’étaient connus bien des années plus tôt à Londres lorsqu’ Albert avait prêté main-forte à Terrence, pris à parti par une bande de voyous qui en voulaient à son argent. Depuis ce jour, ils étaient devenus les meilleurs amis du monde. La carrière de Terrence, et la direction de ses affaires par Albert les avaient parfois éloignés l’un de l’autre, mais c’était toujours avec le même plaisir qu’ils se retrouvaient chaque fois que l’occasion se présentait. Parfois à Los Angeles où vivait Terrence, parfois à Chicago où Albert avait établi le siège de sa compagnie, et aujourd’hui à New York.

Le jeune acteur apercevait déjà le café dans lequel il avait rendez-vous avec son vieil ami. Celui-ci le vit arriver à travers la baie vitrée et lui fit un signe de la main. Terrence lui répondit et s’engagea sur la chaussée en se demandant pourquoi son ami se levait tout à coup et ouvrait la bouche comme s’il criait quelque chose. Il n’eut pas le temps de s’interroger plus qu’il sentit une violente douleur à la jambe. Un objet énorme se dressa dans son champ de vision et tout devint noir.


-----oooOooo-----




Il ouvrit les yeux dans une lumière si crue et si blanche qu’il pensa un instant être passé dans l’autre monde. Mais la migraine lancinante qui lui serrait les tempes le ramena à la réalité. Il leva le bras pour se protéger de la clarté et réveilla d’autres douleurs, nouvelles preuves qu’il n’était pas passé de vie à trépas. Quelqu’un se leva vivement du fauteuil près de la fenêtre en l’entendant bouger et se précipita vers le lit.

« Terry ! Tu te réveilles enfin ! Tu m’as fait une peur bleue. Qu’est-ce qui t’a pris de traverser sans regarder ?! »

Le blessé fit un effort pour ouvrir les yeux et distingua un homme blond au dessus de lui. Grand et bien bâti, celui-ci se penchait vers lui en fronçant les sourcils.

« Traverser sans regarder ? Répéta Terry d’une voix éraillée.

- Comment as-tu fait pour ne pas voir ce bus qui dérapait sur la chaussée ? C’est gros pourtant un bus !

- J’ai été heurté par un bus ? Je me souviens d’avoir vu un éclair jaune...

- Non, non. Le bus était bleu et blanc. Tu as dû être ébloui par un rayon de soleil, ou quelque chose du même genre. Heureusement qu’il n’allait pas vite. Bon sang, Terry, ne me fais plus jamais des peurs pareilles !

- Croyez-moi, je n’ai aucune envie de retenter l’expérience. Comment m’avez-vous appelé ?

- Je t’appelle Terry parce que je t’ai toujours appelé comme ça. Tu m’ inquiètes là... Tu es sûr que tu vas bien ? Enfin, aussi bien que possible après un accident pareil... Tu te souviens de moi, au moins ? »

Terry observa l’homme avec attention. Ses cheveux blonds un peu longs, ses yeux d’un bleu d’azur... Quel âge pouvait-il avoir ? Une petite trentaine sans doute. Il devait passer pour un bel homme avec ses traits bien dessinés et son nez droit. L’inquiétude qui se lisait sur son visage paraissait sincère et le malade était d’autant plus désolé de le décevoir.

« Je suis navré, répondit-il. Je ne me souviens absolument pas de vous. A vrai dire... Je ne me souviens pas de grand chose... Même pas de mon nom. »

Cette fois, les traits de son interlocuteur exprimèrent la stupéfaction. Puis ce fut à nouveau l’inquiétude, vite remplacée par la détermination quand il annonça qu’il allait chercher un médecin, et Terry se demanda comment il se faisait qu’il fut si habile à déceler les émotions sur le visage des autres. Cela avait-il un rapport avec son métier ? Il ne se souvenait même pas de ce qu’il faisait pour vivre. Une bouffée d’angoisse lui serra la gorge. C’était horrible, ce mur blanc dans son esprit, dressé entre lui et ses souvenirs...

Un médecin en blouse blanche ne tarda pas à passer la porte. Terry vit que son visiteur blond le suivait, mais le docteur lui intima de rester dehors. Puis il se dirigea vers son patient avec un sourire rassurant.

« Alors Monsieur Granchester, je vois que vous êtes réveillé. Je suis le docteur Mills. Votre ami me dit que vous avez des petits soucis de mémoire ?

- Granchester ? C’est comme cela que je m’appelle ?

- Terrence Granchester, en effet. C’est du moins ce qui est inscrit sur votre carte d’identité. Vous pourrez le vérifier vous-même tout à l’heure. Nous avons rangé votre portefeuille dans la table de chevet. A moins que ce ne soit un pseudonyme. C’est fréquent chez les acteurs.

- Je suis acteur ? Interrogea Terry. Et vous me connaissez ?

- Vous êtes très célèbre, Monsieur Granchester. Et si j’en crois les gloussements qui s’échappent de la salle des infirmières depuis votre arrivée, vous n’allez pas tarder à constater que vous avez beaucoup d’admiratrices. J’ai donné des instructions pour que vous ne soyez pas dérangé plus que nécessaire, mais si elles vous importunent, n’hésitez pas à me le dire. Je saurais y mettre bon ordre. »

Tous en parlant, le médecin avait procédé aux examens de routine sur le blessé. Puis après avoir pris son pouls, il examina la réactivité de ses pupilles avec une petite lampe.

« Tout me semble normal, conclut-il.

- Pourtant je ne me souviens de rien, Docteur.

- Commençons par les bonnes nouvelles, voulez-vous ? Vous ne souffrez que de quelques contusions et d’une bonne entorse à la cheville droite. Après une collision avec un autobus, c’est un vrai miracle. Pour plus de sûreté, je vais toutefois vous garder en observation un jour ou deux.

- Et ma mémoire ?

- Je ne pense pas qu’il y ait lieu de s’inquiéter, le rassura le praticien. Vous avez subi un choc à la tête et souffrez d’une légère commotion. Elle ne tardera pas à se résorber et tout rentrera dans l’ordre. C’est une chose très complexe que l’amnésie, mais je suis certain que vos souvenir vont vous revenir petit à petit.

- Ou pas ! fit remarquer le malade.

- Ou tout d’un coup, compléta le médecin. Faites moi confiance. Ce qu’il vous faut avant tout, c’est du repos. Il n’y a aucune raison de s’alarmer pour l’instant. Attendons que votre hématome se résorbe et il sera toujours temps d’aviser par la suite. D’ici là, n’essayez pas de forcer votre mémoire, vous ne réussiriez qu’à vous donner encore plus mal à la tête. A tout hasard, je vais vous faire porter un calmant. Je vais laisser votre ami entrer quelques minutes mais pas plus.

- Je ne me souviens pas de lui...

- Vous avez l’air d’être très proches, en tout cas. Son inquiétude pour vous était touchante. Comme vous n’avez pas de famille, c’est lui qui nous a fourni tous les renseignements nécessaires pour votre dossier. Il a l’air d’un homme en qui on peut avoir confiance. Je repasserai vous voir plus tard, Monsieur Granchester. D’autres patients m’attendent. »

Le médecin sortit et Terry le vit discuter un moment avec le grand homme blond. Il ne savait pas pourquoi, mais lui aussi ressentait au fond de lui qu’on pouvait lui faire confiance. D’où venait ce sentiment ? Était-ce dû à un souvenir encore enfoui dans sa mémoire en déroute ? Le docteur Mills avait recommandé de ne pas forcer ses souvenirs, aussi décida-t-il de se fier à son instinct. Quand l’homme entra tout souriant, Terry fit un effort pour lui rendre son sourire, même si celui-ci ressemblait plus à une grimace.

« J’ai parlé avec ton médecin, annonça l’inconnu. Il m’a expliqué qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter. Ton amnésie est très certainement temporaire. Il m’a aussi recommandé de te laisser te reposer. Je reviendrai demain et je t’apporterai quelques affaires. Tu peux compter sur moi.

- Nous nous connaissons depuis longtemps ? Demanda Terry.

- Oh oui ! Depuis bientôt dix ans. Albert et Terry... Nous avons fait les 400 coups ensemble ! C’était du temps de notre folle jeunesse, bien sûr. Mais il vaut mieux que tu t’en souviennes tout seul, a dit le médecin. Nous en reparlerons quand tu iras mieux. Que veux-tu que je t’apporte ? Un rasoir ? Une brosse à dents...

- Et de la lecture ! Quelque chose qui me change les idées.

- C’est entendu, mon ami. A demain. »

Le dénommé Albert sortit après une solide poignée de main, laissant Terry à ses cogitations moroses. Dès qu’il fut parti, celui-ci prit son portefeuille dans le tiroir près de lui et examina son permis de conduire. En voyant la photo, il sut aussitôt qu’il s’agissait bien de lui. Terrence Granchester, domicilié à Los Angeles, né le 28 janvier 1987... Accroché au mur, un horrible calendrier avec des chats dans un panier indiquait qu’on était en décembre 2012... Un rapide calcul mental lui apprit qu’il aurait donc bientôt 26 ans... Il rangea le portefeuille et se rallongea en grimaçant quand ses blessures se rappelèrent à lui. Pourtant il souriait en fermant les yeux. Il savait au moins qu’il était toujours capable de lire et de compter.


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 17:07     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 15




Il y avait bien longtemps que le palais de la Reine Elroy n'avait pas connu pareille fête ! Les salons, les jardins, et bien sûr la salle de bal étaient envahis d'une foule disparate mais joyeuse. Les nobles demoiselles richement vêtues voisinaient avec les paysannes endimanchées sans que personne ne s'offusque. Si au début, les jeunes filles s'étaient jaugées d'un oeil méfiant, évaluant les chances de chacune d'emporter le coeur d'un des princes héritiers, il avait vite été évident pour tout le monde que la partie étaient jouée d'avance.

Les princes Allistair et Archibald s'étaient précipités vers deux jeunes filles dès qu'elles avaient fait leur entrée, accompagnées de leurs parents, et ne les avaient plus quittées, les faisant virevolter sur la piste de danse sans se lasser.

L'événement le plus marquant de la soirée avait été l'arrivée d'une jeune inconnue au bras du mage Albert. Quand le crieur à l'entrée avait annoncé : « Le grand mage Albert, protecteur de Lakewood, et sa fille, Candice Neige; », cela avait été la stupéfaction dans l’assistance. Puis le Prince Anthony s’était avancé vers la jeune fille pour l’inviter à danser, et les murmures avaient repris de plus belle. Les deux jeunes gens formaient un très beau couple, parfaitement assorti. Du moins en apparence, car sur la piste, l’atmosphère était tendue. Anthony trouvait que sa partenaire dansait avec autant de grâce qu’un sac de pommes de terres, mais comme il avait appris à se méfier de son caractère entier, il se garda bien de le lui dire.

« Vous avez une très jolie robe, tenta-t-il comme approche.

- C’est un ami qui me l’a offerte.

- Le mage Albert ! J’ignorais qu’il s’y connaissait en fanfreluches ! S’exclama Anthony en riant. »

Candy aurait préféré qu’il la regarde dans les yeux plutôt que de fixer son décolleté mis en valeur par la jolie dentelle. Elle sentait la rougeur qui avait envahi ses joues gagner tout son visage et descendre le long de son cou. Elle osa pourtant poser la question qui la taraudait depuis qu’elle avait discuté avec Patricia et Annie.

« Prince Anthony, qu’avez-vous ressenti la première fois que nous nous sommes rencontrés ?

- Je me ferais un plaisir de vous le montrer dès que nous serons mariés, jolie Candy, répondit le prince, le regard toujours rivé sur sa poitrine. J’en profiterai pour vérifier jusqu’où vous pouvez rougir comme ça ! Cela doit rendre vos petits seins délicieusement chauds et... Aïe ! »

Anthony lâcha un cri de douleur car sa partenaire venait de lui écraser les orteils. Comme elle ne prenait même pas la peine de s’excuser, il mit sa maladresse sur le compte de l’émotion bien compréhensible qu’elle devait éprouver à se trouver dans ses bras. Aussi préféra-t-il mettre fin à la danse et lui proposer un rafraîchissement.

Au fil de la soirée, de gros nuages s’étaient accumulés, obscurcissant le ciel, et masquant la lune et les étoiles. La chaleur était devenue étouffante, aussi Candy accueillit-elle cet intermède avec soulagement. Elle sirotait lentement son verre et observait le prince Anthony entre ses cils modestement baissés. Il avait belle allure, elle devait en convenir. Sans doute un des plus beaux hommes qu’elle ait jamais vu. Depuis son enfance, elle rêvait de le rencontrer, et voilà qu’elle allait devenir sa femme ! La modeste orpheline se découvrait fille du puissant Mage Albert et bientôt princesse ! La tête lui tournait. Malgré tout ce qu’on lui avait dit, elle ne pouvait s’empêcher de penser que quelque chose ne collait pas dans cette image. Elle levait fréquemment les yeux sur la pendule dont les aiguilles lui semblaient tourner à une vitesse folle. Elle aurait tout donné pour pouvoir les arrêter avant qu’elle n’indiquent minuit et de scellent son destin. Hélas ! Elle ne possédait pas un tel pouvoir et très vite, trop vite; résonnèrent les douze coups fatidiques.

Les musiciens arrêtèrent de jouer. La reine se leva de son trône et prit la parole. Malgré son grand âge, sa voix sonna forte et claire dans le silence religieux qui régnait dans la salle.

« Mes chers sujets, le grand jour est enfin arrivé ! Je sais que vous avez tous souffert au cours des dernières années, et la famille royale n’a pas été épargnée, elle non plus. Les familles régnantes, devrais-je dire, précisa-t-elle en faisant signe au Duc et à la Duchesse de Granchester, invités d’honneur, de la rejoindre. Mais tout ceci est terminé. La prophétie dont vous avez tous entendu parler va enfin se réaliser ! »

Son regard se posa sur ses petits-fils et elle sourit.

« Mes enfants, c’est à vous. »

Allistair et Archibald qui étaient restés sur la piste de danse quand la musique s’était tue, prirent leurs promises par le bras et se dirigèrent vers leurs parents respectifs avec un bel ensemble. Ils posèrent un genou à terre et l’un après l’autre demandèrent au Baron O’Brien et au Comte de Brighton de leur accorder la main de leur fille. Quand ceux-ci posèrent les mains de Patricia et d’Annie dans celles de leurs fiancés, un souffle d’air frais entra enfin par les fenêtres. Les deux couples rejoignirent la Reine sur l’estrade, leurs visages rayonnants de bonheur. Tous les yeux se tournèrent alors vers Candy et le Prince Anthony. Celui-ci ce dirigea vers le Mage Albert sans se soucier de vérifier si la jeune fille le suivait, et s’inclina devant lui. Intimidée par tous ces gens qui la regardait, Candy s’approcha de son père à petits pas pressés, et sentit le bras de celui-ci se poser sur ses épaules, rassurant.

« Puissant Mage Albert, articula Anthony d’une voix forte, pour la sauvegarde du royaume et le bonheur du peuple de Lakewood, je vous demande de m’accorder la main de votre fille Candy.

- Je n’ai aucune raison de refuser mon consentement au mariage de ma fille avec celui qui aura fait battre son coeur, répondit Albert en resserrant la pression de son bras. Si elle a fait son choix, je l’approuverai. »

Puis il se pencha vers elle pour murmurer à son oreille.

« Alors Candy ? Es-tu prête à accomplir ton destin ? »

La jeune fille sentait peser sur ses épaules tout l’espoir des habitants du pays. Elle songea à leur bonheur d’être enfin libéré des malédictions qui pesaient sur eux, à la sorcière Marlow qui perdrait définitivement ses pouvoirs et serait désormais hors d’état de nuire, à Mlle Pony et à Soeur Maria qui redeviendraient les fées qu’elles n’auraient jamais dû cesser d’être... « Pour la sauvegarde du royaume et le bonheur de son peuple » avait dit le Prince Anthony. Pas pour son bonheur à lui... Pas parce qu’il l’aimait... Les jolis rêves qu’elle avait fait d’une vie heureuse et tranquille auprès d’un homme qui l’aimerait avaient volé en éclat. Mais elle connaissait la responsabilité qui était la sienne. Elle redressa les épaules et prit une profonde inspiration. Pourtant, avant qu’elle puisse prononcer le oui fatidique qui déciderait du reste de sa vie, un violent fracas retentit à l’entrée de la salle de bal.

Comme repoussées par une main de géant, les portes s’ouvrirent avec une telle violence qu’elle claquèrent contre les murs. Précédée par un vent glacial, la sorcière Marlowe fit son entrée. Toute vêtue de velours pourpre, elle avança lentement jusqu’au centre de la pièce. Derrière elle, et habillés du même velours, venaient sa fille et la petite silhouette de Terry. En reconnaissant son malheureux fils, la Duchesse de Granchester poussa une exclamation de désespoir et enfouit son visage contre l’épaule de son mari. Raide comme une statue, celui-ci essayait de se montrer aussi digne que possible, mais aux battement effrénés de son coeur dans sa poitrine, il était évident qu’il était aussi bouleversé que son épouse de découvrir son fils sous sa forme de nain.

« Sorcière Marlow, s’exclama la reine Elroy qui fut la première à se reprendre. Vous n’avez rien à faire ici...

- Permettez-moi d’être d’un autre avis, votre Majesté, répondit la sorcière d’un ton grinçant. J’ai toutes les raisons d’être ici, au contraire. La première étant qu’il serait très incorrect de ne pas être présente alors que vous êtes tous venus pour assister à mon triomphe ! »

Un murmure parcourut l’assistance qui recula vers les murs pour mettre le plus de distance possible entre eux et la sorcière. Seul le mage Albert s’avança vers elle.

« Cesse de te la jouer, Sorcière ! Ton règne est fini. Ce soir la prophétie va se réaliser et...

- Ah oui ! L’interrompit la Marlow. La fameuse prophétie... Celle qui devait me priver de mes pouvoirs... Je la connais aussi bien que toi, mon cher; et je ne crains rien. Mes pouvoirs ne se sont jamais aussi bien portés, regarde ! »

Elle tira Grincheux par le bras pour l’amener au centre de la salle afin que tout le monde le voit.

« Voilà ce que ma fille et moi sommes capables de faire. Nous pouvons désormais contrebalancer tes propres sorts. Le petit duc ici présent restera un nain jusqu’à la fin de sa vie et tu ne pourras rien y faire. C’est toi qui es fini mon pauvre Albert ! Et tout ça parce que tu as oublié l’essentiel. Cette gamine insipide que tu présentes comme ta fille n’est pas amoureuse de son prince ! »

Le mage se tourna vers Candy qui baissait les yeux en rougissant.

« C’est impossible ! Je ne peux pas m’être trompé à ce point ! Tous les oracles étaient formels... Candy, mon enfant, ce jour devait être celui de tes noces avec l’homme que tu aimerais. N’y a-t-il personne ici qui fasse battre ton coeur ? »

Depuis qu’il était entré, Terry n’avait pas quitté la jeune fille des yeux. Il l’avait repérée immédiatement dans la foule et avait souri en constatant qu’elle portait la robe qu’il avait choisie pour elle. Il la vit couler un regard vers lui entre ses cils et son coeur manqua un battement. Il l’implora silencieusement de ne rien dire. Elle sembla le comprendre et resta silencieuse.

« Ah ! Je le savais ! Triomphait la sorcière. Deux couples sur trois ce n’est pas un mauvais score, mais cela ne suffira pas. Tu as perdu, Albert, et j’ai gagné ! Tout se déroulera comme je l’avais prévu. Mes pouvoirs vont encore s’accroître et ma Susanna règnera bientôt sur les deux royaumes. Voilà ce qu’il t’en coûte de m’avoir abandonnée avec ma fille. NOTRE fille, devrais-je dire.

- Encore ce conte ! S’exclama Albert. Comment pourrais-je être le père de ta fille ? Nous n’avons jamais été ensemble, toi et moi. »

Malgré ses affirmations, le mage ne pouvait s’empêcher de regarder la jeune Susanna à demi dissimulée derrière son imposante mère. Elle avait les cheveux blonds, comme lui, et ses yeux bleus rappelaient étrangement les siens...

« Aurais-tu oublié ce congrès des magiciens, il y a dix-huit ans ? Nous y étions tous les deux. Tu avais même accepté de m’assister pour la démonstration de ma nouvelle potion. C’était un philtre d’amour que je t’avais donné.

- Tu disais que c’était une potion de force...

- Oh, c’en était une aussi ! Tu as été particulièrement puissant cette nuit là !

- Pétunia ! Protesta Albert horriblement gêné. Nous ne sommes pas seuls !

- Ta défaite ne serait pas complète si je n’étalais pas ton indignité au grand jour. Le peuple de Lakewood qui a tant d’admiration pour toi doit savoir de quelle manière tu t’es conduit avec moi. Tu étais fou de moi, Albert, exactement comme je l’avais voulu. Nous aurions pu dominer le monde ensemble. Mais dès le lendemain, cette elfe de malheur est arrivée, et tu n’as plus eu d’yeux que pour elle.

- Rosalinde était l’amour de ma vie ! Aucune magie ne peut lutter contre l’amour véritable. Ce que tu as fait était insensé. Tu sais bien qu’il est dangereux pour deux magiciens aussi puissants que nous d’avoir des enfants. Le résultat peut être catastrophique.

- Ma Susanna n’a rien d’une catastrophe ! Je voulais le meilleur pour elle. Pendant toute ma grossesse je ne pensais qu’à cela. Je voulais qu’elle illumine le monde de sa puissance.

- Ça, pour illuminer, elle illumine ! Maugréa le Prince Anthony, mal remis de la rebuffade que lui avait infligée Candy. »

Tous les regards se tournèrent vers lui et il se redressa avec autant de dignité que possible, tout en restant à bonne distance de la sorcière dont les yeux lançaient des éclairs. Il n’en menait pas large à l’idée qu’elle veuille se venger. Mais heureusement pour lui, celle-ci avait d’autres projets pour l’instant.

« Puisque tu tiens tant à marier ta fille aujourd’hui, je peux bien te faire ce plaisir avant de te chasser d’ici, reprit la sorcière. Mon petit duc, allez donc demander la main de votre promise à son père. »

Elle poussa Terry en avant et celui-ci se dirigea vers le mage, la mort dans l’âme. Tous les espoirs qu’il avait bâtis durant un mois s’écroulaient comme un château de cartes. Il se retrouvait exactement au même point qu’avant le retour d’Albert, obligé d’épouser la fille de la sorcière, à la différence près que jamais il ne retrouverait son apparence normale. Mais il pouvait encore aider les autres victimes. Il se campa devant Albert qui le regardait sans ciller. Sa voix résonna haut et clair dans la grande salle.

« Mage Albert, moi, Terrence Graham Granchester, vous demande de m’accorder la main de votre fille...

- NON ! »

Celle qui avait poussé ce cri se précipita vers eux et fixa son père dans les yeux en tapant du pied.

« C’est pas juste ! Se lamenta Susanna d’une voix geignarde. Pourquoi ne me demande-t-on pas mon avis, à moi ? »

Albert se tourna vers celle qui semblait bien être sa fille, finalement, et l’observa avec intérêt. Mais la sorcière intervint avec impatience.

« Parce que cela fait des années que tu nous rabat les oreilles avec la même rengaine ! Je veux Terry, je veux être la femme de Terry, je veux être duchesse… Et bien, tu vas enfin l’avoir, ton Terry, alors cesse de faire ta mijaurée !

- Mais j’ai changé d’avis ! Je ne veux plus me marier avec lui ! »

Un grand silence se fit dans la salle, si total qu’on entendait la respiration oppressée de la sorcière Marlow qui essayait de contenir sa colère.

« Ne me joue pas ce tour là, Suzie, siffla-t-elle entre ses dents. Tu as toujours voulu ce garçon et j’ai fait des pieds et des mains pour que tu puisses l’obtenir. Tu sais que ce mariage est la condition que j’ai mise à l’annulation des malédictions que j’ai lancées. Et maintenant, tu viens me dire que tu as changé d’avis ?

- Il me plaisait, c’est vrai, reconnu Susanna en baissant les yeux. Mais c’était avant…

- Avant quoi, bon sang ! Demanda le Mage en fronçant les sourcils. Pourriez-vous être un peu plus claire ?

- Avant qu’il devienne vraiment un nain ! Cracha la jeune fille. Je ne veux pas épouser quelqu’un qui ne pourra pas me faire danser et essayera de me faire des enfants aussi vilains que lui ! Je déteste les nains, voilà ! »

Ce fut la consternation dans l’assemblée. Alors que la soirée avait commencé dans la joie et que chacun envisageait déjà l’avenir radieux qui l’attendait, voilà que tous les plans volaient en éclat. Le Duc fut le premier à se ressaisir. Habitué à analyser rapidement les situations, ce fut lui qui exposa le problème dans toute son ampleur.

« Je ne vous félicite pas, Mage Albert. Vous et vos filles n’avez fait qu’empirer les choses. Vous rendez-vous seulement compte des conséquences de leurs caprices ?

- Vous ne m’avez jamais beaucoup aimé, votre Grâce, je le sais depuis longtemps. Mais ne mêlez pas mes filles à cela. Elles n’y sont pour rien.

- Au contraire ! Elles sont au cœur du problème ! Tout est de leur faute ! Prenez celle-ci, dit-il en désignant Candy. Elle refuse de se conformer à son destin et d’épouser le prince Anthony, ce qui signifie que la prophétie ne se réalisera pas. Que va-t-il se passer au lever du soleil, Mage Albert ? Vous avez dit vous-même que votre sort n’agirait que jusqu’à la pleine lune, c'est-à-dire ce soir. Tous ces jeunes gens vont se retrouver dans le même état que mon fils. Quand à leurs promises, je n’ose imaginer ce qu’il adviendra d’elles. Quant à l’autre, poursuivit-il en jetant à Susanna un regard chargé de colère, non seulement elle est à l’origine de tout, mais voilà qu’elle refuse d’épouser mon fils. J’aime mon fils quelle que soit son apparence, et il me succèdera un jour. Mais le duché a besoin d’un héritier. Qui voudra l’épouser et lui donner des enfants dans son état ?

- Ne vous en prenez pas à ma fille, espèce de duc prétentieux, intervint la sorcière dressée sur ses ergots. Vous n’aviez qu’à obliger votre fils à épouser ma Suzie quand je vous l’ai demandé. Vous avez voulu me résister, et voilà le résultat. Finalement, ma fille a raison, elle mérite mieux que votre fils modèle réduit. Et puisque je vais conserver mes pouvoirs, je n’aurais qu’à attendre que cet ingrat qui a dédaigné ma Susanna meure sans héritier. Alors je m’emparerai de votre duché et c’est moi qui deviendrai duchesse !

- Je ne te laisserai pas faire ! Assura le mage Albert.

- Tu ne pourras rien empêcher, mon pauvre chéri. Un de nous deux perdra ses pouvoirs ce soir, et visiblement, ce ne sera pas moi ! Tu n’auras plus qu’à courir les routes comme un mendiant, parce que je vais te chasser d’ici ! »

Atterré, le mage baissa la tête. Comment avait-il pu se tromper à ce point. Tous les augures prédisaient que sa petite Candy était celle qui allait sauver le royaume de son funeste destin. C’était pour la protéger et éviter d’attirer l’attention sur elle qu’il l’avait confiée à ses amies Pony et Maria et s’était exilé pendant si longtemps. Les choses se seraient-elles déroulées autrement s’il était resté ? Ce fut une petite main se glissant dans la sienne qui le fit sortir de ses sombres réflexions.

« Père ? Je suis désolée, murmura Candy. J’ignorais que la situation était grave à ce point.

- Tu n’y es pour rien, mon enfant, la rassura Albert. On ne peut pas obliger les gens à tomber amoureux. C’est l’amour qui est le fondement de la prophétie. Il ne servirait à rien de t’obliger à épouser le prince si tu ne l’aimes pas. Ce serait un sacrifice inutile car tu ne l’aimes pas, n’est-ce pas ?

- Lui, non, avoua Candy en rougissant. Mais je n’ai pas dit que je n’étais pas amoureuse. »

Elle jeta un regard en coin à Terry debout près d’elle et un éclair zébra le ciel, bientôt suivi par un formidable coup de tonnerre. Le futur duc se mit à trembler et prit les mains de la jeune fille dans les siennes.

« Non, Candy ! Implora-t-il d’une voix vibrante. Il ne faut pas ! N’en dites pas plus, je vous en prie...

- Au contraire, intervint Albert. Ne crains rien ma petite. Dis moi le fond de ta pensée. Ouvre ton coeur.

- Je ne pouvais pas tomber amoureuse du prince Anthony parce que mon coeur était déjà pris. C’est à Terry que je l’ai donné, dès la première fois où je l’ai vu.

- C’est impossible, Candy, se défendit le nain. Vous ne pouvez m’aimer. Regardez-moi ! Je suis un nain !

- Je me moque bien de votre apparence, plaida Candy. Vous souvenez-vous de ce que je vous ai dit ce matin-là, dans la forêt ? Je n’ai jamais été attirée ni par l’argent ni par le pouvoir. Tout ce dont j’ai toujours rêvé, c’est d’un homme qui m’aimerait. Un homme sur lequel je pourrais compter. Cet homme je l’ai trouvé. Il m’a offert son aide sans conditions quand il a fallu mettre mon amie Patricia en lieu sûr. Il a pensé à m’offrir une robe pour que je puisse me présenter au bal sans avoir à rougir avant de savoir que j’étais la fille d’un puissant mage. Il s’est sacrifié pour me libérer de la prison dans laquelle m’avait enfermée la sorcière. Cet homme c’est toi Terry !

- Tu parlais aussi d’un homme qui pourrait te prendre dans ses bras le soir, rappela Terry en écartant ses petits bras. Je ne serais jamais cet homme là, Candy.

- Ce n’est pas ton physique qui m’importe, mais celui que tu es vraiment. Pourquoi as-tu fait tout cela pour moi Terry ?

- Parce que je t’aime, avoua-t-il dans un souffle. Dès la première fois où je t’ai vue, j’ai su que tu étais la femme dont j’avais toujours rêvé. S’il n’y avait pas eu cette maudite prophétie, je t’aurais emmenée dans mon château et je t’aurais épousée afin de te garder pour moi.

- Il est encore temps de le faire, répondit Candy. Si tu veux toujours de moi, rien ne me rendrait plus heureuse que de devenir ta femme. »

Le coeur de Terry battait à tout rompre, mais sa raison le poussait à refuser le sacrifice de la jeune femme. Il se jeta à genoux aux pieds du Mage Albert.

« Puissant Mage Albert, je vous en prie. Ne la laissez pas faire cela. Ne l’obligez pas à passer sa vie avec un nain difforme ! Je ne peux pas accepter un tel sacrifice.

- Ma fille n’a pas l’air de considérer cela comme un sacrifice, fit remarquer Albert. J’ai dit que je ne m’opposerais pas à son choix et c’est vous qu’elle a choisi, mon jeune ami. De plus, ne m’avez vous pas demandé la main de ma fille il y a cinq minutes à peine ? Allez-vous repousser le bonheur qui s’offre à vous ?

- Mais la prophétie... La sorcière...

- Ah oui, la prophétie, sourit Albert. Ai-je omis de vous dire qu’elle était très ancienne ? Elle a plus de trois cents ans.

- En quoi cela a-t-il de l’importance ? Demanda le nain.

- Cela signifie qu’il y a trois cents ans le Royaume de Lakewood et le Duché de Granchester n’étaient pas encore séparés, intervint le Duc.

- Et qu’à ce titre, vous pouvez être considéré vous aussi comme un prince héritier, compléta le Mage. »

Terry se tourna vers Candy qui s’était laissée tomber à genoux à côté de lui. Elle lui adressa un sourire lumineux qui fit fondre son coeur.

« Tu vois, chuchota-t-elle. Tu n’as plus le choix. Tu es obligé de m’épouser. C’est ton devoir.

- Ce ne sera jamais un devoir, affirma Terry en prenant le visage de sa bien-aimée entre ses mains. C’est un rêve devenu réalité...

- Non ! Hurla la sorcière. C’est impossible ! »

Elle voulu se précipiter vers eux, mais avant qu’elle ait pu faire le moindre geste, les lèvres des nouveaux fiancés s’étaient unies. Un grand vent se mit à souffler dans la salle, mouchant toutes les chandelles. Les nuages qui obscurcissaient le ciel disparurent aussi vite qu’ils étaient apparus, et la clarté de la lune nimba de sa douce lumière les amoureux enlacés. Emportés par la magie de leur baiser, ils ne prêtaient aucune attention à ce qui se passait autour d’eux. Ils ne virent pas la sorcière tomber à genoux le souffle court. Elle leva le bras dans une dernière tentative pour lancer une incantation, mais il était trop tard, elle n’était plus qu’une femme ordinaire, sans pouvoir particulier. Vaincue, elle accepta la main qu’Albert lui tendait pour l’aider à se relever.

Au fond de la salle, le baron Legrand sanglotait en serrant dans ses bras trois crapauds qui s’agitaient pour lui échapper.

« Ma femme ! Mes enfants ! Se lamentait-il. Pourquoi ?

- Je vous avais prévenu que cela risquait d’arriver, le consola la fée Maria. Je n’avais pas le droit de transformer Sarah en humaine et vous le saviez tous les deux. Maintenant, il faut en payer le prix.

- Mais je l’aimais...

- Oh les jolis crapauds ! S’exclama Susanna en s’approchant. Je peux en avoir un ? Je voudrais celui qui a une marque en forme de fer à cheval sur la fesse. Je prendrai bien soin de lui, je vous le promets. »

Mais le baron serrait farouchement ses crapauds dans ses bras pour les mettre hors d’atteinte. Il tourna les talons et fila se terrer dans son château, poursuivi par Susanna.

Vaincue, l’ex-sorcière Marlow fur emmenée par les gardes de la Reine Elroy et jetée dans un cachot en attendant que l’on statue sur son sort.

Ces six tristes sires furent les seuls à ne pas assister au triple mariage qui fut célébré séance tenante dans la chapelle du château. La liesse était telle que personne ne se formalisa qu’un des mariés soit perché sur un marchepied pour prononcer ses voeux. Émerveillé d’avoir été choisi par Candy, c’est à peine si Terry entendit les paroles du prêtre désigné pour célébrer cet office si particulier. Il glissa l’anneau nuptial au doigt de la jeune femme et ne lâcha plus sa main de toute la cérémonie. Et il se promit bien de ne plus jamais la lâcher jusqu’à la fin de sa vie.


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ÉPILOGUE




Il avait fallu le lever du soleil pour que chacun se persuade que tout était rentré dans l’ordre. Mais quand un nouveau jour commença et que tout le monde put constater que toutes les malédictions avaient disparu, ce fut l’allégresse générale. Les cloches se mirent à sonner à toutes volées, et bientôt toute la population convergea vers le château en chantant et en dansant. Tout le monde tenait à remercier les trois jeunes filles qui avaient permis à la prophétie de se réaliser et avaient sauvé le royaume.

Comme aucun des jeunes mariés n’était encore sorti de sa chambre, cette foule exubérante s’installa sur les pelouses autour du château, puis à l’extérieur de l’enceinte quand il n’y eu plus de place. Certains avaient pensé à apporter un pique-nique. Pour les autres, des marchands ambulants ne tardèrent pas à circuler pour fournir douceurs et en-cas. Bientôt se furent les bateleurs qui donnèrent un échantillon de leurs talents pour occuper les enfants. Au bout de quelques heures, tous les environs du palais ressemblaient à une immense foire au grand dam de la Reine Elroy qui n’avait jamais vu un tel rassemblement devant ses murs. Par précaution, elle envoya des gardes patrouiller, mais ceux-ci se laissèrent gagner par l’atmosphère bon enfant et se joignirent au peuple pour rire et s’amuser. Les plus hardis lancèrent des paris sur le couple qui apparaîtrait le premier à sa fenêtre, faisant rougir les jeunes filles et pouffer les épouses qui se souvenaient avec nostalgie de leur propre nuit de noces.

Ce fut le joyeux brouhaha de cette foule qui tira Terry du sommeil après une courte, bien trop courte nuit. Il se serra plus étroitement contre le corps chaud étendu près de lui. Aussitôt, des muscles dont il ignorait l’existence jusqu’alors se signalèrent à son bon souvenir, lui rappelant les trésors de souplesse et d’inventivité qu’il avait déployés un peu plus tôt pour rendre à sa femme l’hommage qu’elle méritait. SA FEMME ! Celle qui l’avait choisi, bravant la réprobation des uns et le mépris des autres. Celle qu’il aimait au delà de tout, et pour laquelle il était prêt à tout endurer, même les railleries de cet imbécile d’Anthony ! L’éblouissement qu’ils avaient partagé lui avait prouvé, s’il en était encore besoin, que Candy avait raison. L’apparence physique n’avait que peu d’importance. Leurs âmes étaient unies par un lien que rien ni personne ne pourrait jamais rompre.

Il enfouit son visage dans le cou de la jeune femme, savourant l’odeur de ses cheveux, la douceur de sa peau... Il était certain d’être l’homme le plus heureux de la terre et qu’il le resterait aussi longtemps qu’il pourrait s’éveiller ainsi tous les matins, sa main englobant la rondeur d’un sein, ses jambes mêlées à celle de la femme qu’il aimait, et...

Désireux de prolonger son rêve merveilleux, il serra plus étroitement Candy contre lui et déposa un tendre baiser sur son épaule. Elle s’agita dans son sommeil et son délicieux postérieur vint se nicher au creux de son ventre. Soudain bien réveillé, Terry se décida à ouvrir les yeux. Il leva la main devant son visage, n’osant croire à la réalité de se qui lui arrivait. L’instant d’après, il bondissait hors du lit pour se planter devant le miroir de la coiffeuse. Il tendit le bras pour toucher l’image qui se reflétait dans la glace. Son image... Son vrai visage ! Il était redevenu lui-même ! Une exclamation étouffée de Candy le fit se retourner vers le lit. Adossée à ses oreillers, elle le fixait, les yeux agrandis de surprise, et serrait le drap sur sa poitrine.

Avec un sourire il revint vers elle, amusé de la voir se renfoncer sous les couvertures au fur et à mesure qu’il approchait. Il bondit sur le lit pour s’agenouiller près d’elle.

« Candy, ma chérie, regarde !

- Terry ?

Elle semblait affolée et il prit son visage entre ses mains pour plonger les yeux dans les siens.

« Qui d’autre ? Demanda-t-il d’une voix douce pour l’apaiser. C’est un miracle ! Je ne suis plus un nain !

- Je vois ça, murmura-t-elle en baissant les yeux, ce qui eut pour effet de la faire rougir en constatant la perfection du corps nu de son mari tout près du sien.

- Tu ne vas pas être timide avec moi, la taquina-t-il. Pas après ce que tu m’as dit hier. N’as-tu pas affirmé que l’apparence ne comptait pas ?

- Mais tu es si beau... Tandis que moi, je suis toujours la même. Une orpheline qui dormait dans une écurie... »

Terry la fit taire d’un long baiser plein de tendresse.

« Je suis toujours ton mari, tu sais, répondit-il en la rallongeant avant de se coucher près d’elle. Celui qui est tombé amoureux de toi à l’instant où il t’a vue. Et cela ne changera jamais. »

Et il le lui prouva. Longuement.

La nuit était presque tombée quand ils se résignèrent à quitter leur lit, et uniquement parce que Terry voulait emmener sa jeune épouse dans son duché le plus vite possible. Avec autorité, il souleva Candy dans ses bras pour la porter jusqu’au carrosse qui les attendait. Lui qui n’avait pas pu la veiller lui faire franchir le seuil de leur chambre dans ses bras, ne se lassait pas de ce genre de démonstrations d’affection. Ils furent salués par une véritable ovation lorsqu’ils apparurent bons derniers sur le parvis d’honneur du château. Il fut alors obligé de la poser sur ses pieds car Patricia et Annie se précipitaient vers elle pour la serrer sur leur coeur et la remercier. Allistair et Archibald présentèrent toutes leurs félicitations à leur ancien condisciple, sincèrement heureux pour lui. Quand le mage Albert se présenta pour faire ses adieux à sa fille, il hocha la tête d’un air satisfait en constatant la nouvelle apparence de son gendre.

« Je te souhaite beaucoup de bonheur, ma petite Candy. Mais je sais que je n’ai pas à m’inquiéter. Tu ne pouvais choisir meilleur époux.

- Père, demanda la jeune femme, est-ce vous qui avez annulé le sort de Terry ?

- Non, ma chérie. Le mérite n’en revient qu’à toi et à toi seule. Ne vous avais-je pas dit qu’aucune magie n’était assez puissante pour lutter contre l’amour véritable ? Ce miracle ne se serait jamais accompli si vous ne vous aimiez pas sincèrement. Voilà pourquoi je sais que tu seras très heureuse.

- Et vous ? Allez-vous repartir ?

- Sans doute, mais plus aussi longtemps. Je ne serai jamais bien loin de Lakewood. Et puis, même si tu n’as plus besoin de moi, j’ai très envie d’apprendre à te connaître.

- Vous serez toujours le bienvenu chez nous, Mage Albert, intervint Terry qui les avait rejoint.

- Je vous remercie jeune duc. Il va falloir maintenant que je m’occupe de mon autre fille, puisqu’il semble bien que j’en ai une. Mais je vous promets de la tenir éloignée de votre château. A présent que vous avez retrouvé votre charme naturel, ce ne serait sans doute pas prudent. Je vais essayer de lui mettre un peu de plomb dans la cervelle, mais la tâche risque d’être ardue. »

Il disparut avec un soupir et Terry passa un bras protecteur autour des épaules de sa tendre femme.

« Tu ne regretteras rien, ici ? Lui demanda-t-il.

- Tout ce que je veux, c’est être avec toi, affirma Candy. Dans une cabane, ou dans un château, cela n’a pas d’importance.

- Avec toi près de moi, la plus humble cabane deviendrait un château, mon amour. »

Ils saluèrent une dernière fois leurs amis, en les invitant à venir les voir aussi souvent qu’ils le désireraient et partirent en grand équipage pour le Duché de Granchester où le premier soin de Terry fut d’organiser un grand bal où il fit danser sa femme jusqu’au petit matin.


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Grâce à l’amitié qui liait les trois jeunes filles de la prophétie, ainsi que leurs époux, le royaume de Lakewood et le duché de Granchester enterrèrent leur querelle. Libérés de l’influence de la sorcellerie, les deux pays prospérèrent sous la protection bienveillante du Mage Albert.

Dès qu’elle ne fut plus sous la coupe de sa mère, Susanna put enfin se consacrer à la seule chose qui l’intéressait : Les crapauds. Elle devint une spécialiste renommée et voyageait souvent à travers le monde pour en découvrir de nouvelles espèces. Son habileté en la matière étonnait la communauté scientifique, mais jamais elle n'avoua qu'il lui suffisait de se poster près d'un point d'eau à la nuit tombée et de soulever ses jupes pour que tous les batraciens présents alentour se croient à la pleine lune, donc à la saison des amours, et se rassemblent pour leur parade nuptiale.

Sur ses conseils, le Baron Legrand fit construire une serre où il reconstitua l’habitat naturel de ces charmantes bêtes et où il installa son épouse et ses enfants qui coulèrent des jours heureux jusqu’à la fin de leur vie. Ils ne purent désormais exercer leur mauvais caractère que sur les mouches qui s’aventuraient dans leur domaine.

Le Prince Anthony finit par se marier par obligation avec une jeune fille de la noblesse tellement jalouse, qu’elle ne le quittait pas d’une semelle afin de le surveiller. Obligé de mettre un terme à ses aventures galantes, il devint morose et n’eut jamais d’enfant. Heureusement, ses cousins Allistair et Archibald eurent une nombreuse descendance et le royaume ne se retrouva pas sans héritier.

La sorcière Marlow passa quelques années en prison puis fut libérée pour bonne conduite. Elle monta une petite société pour commercialiser son philtre d’amour et de virilité et remporta un franc succès. Elle amassa un joli pécule qui la mit à l’abri du besoin.

Et Candy et Terry me direz-vous ? Et bien, comme il se doit, ils furent très heureux et eurent beaucoup d’enfants de nains de jardin !


FIN
Dinosaura le 26 décembre 2012

view post Posted: 9/12/2021, 17:04     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 14




Les trois princes suivirent des yeux les jeunes filles qui s'éloignaient et accompagnèrent leur grand-mère dans ses appartements privés où ils s'installèrent confortablement. La Reine Elroy s'adressa au mage qui les avait suivis.

« Tout ceci prend un tour des plus déplaisant. Mage Albert, êtes-vous sûr qu’il s’agit bien des jeunes filles de la prophétie ?

- Je n’ai aucun doute à ce sujet, Majesté, répondit Albert.

- Mais elles n’ont vraiment pas l’air... présentables ! Comment pourraient-elle convenir à des princes héritiers ?

- Patricia est une jeune fille du monde, intervint Allistair prêt à défendre sa dulcinée. Elle est la fille du Baron O’Brien.

- Et Annie celle du comte de Brighton ! Renchérit Archibald.

- Quand à Candy, conclut Anthony, peut importe qui sont ses parents. Je serais ravi de l’épouser. Vous n’imaginez pas l’effet qu’elle me fait ! »

La reine fixa son regard sur la bosse disgracieuse de son pantalon et haussa un sourcil.

« L’effet qu’elle te fait est évident, Anthony. D’un autre côté, toutes les filles te font cet effet là !

- C’est vrai, reconnut le prince avec un petit rire satisfait. Mais que diriez-vous de l’effet produit sur mes chers cousins ? »

La reine tourna les yeux vers ses autres petits-fils et fut stupéfaite de constater qu’Archibald semblait tout aussi excité qu’Anthony. Quand à Allistair, il serrait un livre sur ses genoux avec une insistance douteuse.

La reine Elroy toussota et rougit légèrement.

« Archie ! Toi aussi ?!

- Je suis désolé, grand-mère. Balbutia l’intéressé. C’est la première fois qu’une fille me fait autant d’effet.

- Ils faut dire qu’elle sont plutôt girondes, vos promises. Ricana Anthony. Vous n’allez pas vous ennuyer tous les deux. N’hésitez pas à venir me demander des conseils. Et si vous avez besoin d’aide... »

Les deux frères le foudroyèrent d’un regard noir qui stupéfia Anthony. De toute évidence, ses cousins avaient découvert avec leurs promises quelque chose qui le dépassait. Étaient-ils amoureux ? Ce sentiment bizarre allait-il lui tomber dessus sans crier gare ? Sa nuit de noces avec Candy serait-elle le révélateur qu’il attendait ?

« Bon, reprit la reine, d’accord pour les deux brunettes, mais la blonde ! Quelle impolitesse ! Elle n’a aucune éducation et il est évident qu’elle n’est pas de notre monde.

- Candy n’a pas à rougir de ses origines, intervint le mage d’une voix sèche. Tout sera révélé demain lors du bal.

- Seigneur ! Ce maudit bal ! J’ai convié toutes les filles à marier à cette réception. Je ne peux pas les renvoyer chez elles en leur disant : Merci mesdemoiselles, mais vous pouvez rentrer chez vous. Nous n’avons plus besoin de vos services puisque mes petits-fils ont trouvé ce qu’ils cherchaient »

La reine réfléchit un instant dans le plus profond silence puis actionna une sonnette pour appeler son conseiller.

« Les jeunes filles sont elles bien installées, Louis ? Demanda-t-elle quand celui-ci arriva.

- Oui Majesté. Elles ont tenu à occuper la même chambre. Je crois qu’elles sont un peu intimidées de se trouver au palais.

- Elles peuvent l’être, grogna la reine. Ainsi que de la chance qui leur échoie de plaire aux princes héritiers du royaume ! Mais passons. Le bal de demain soir aura lieu comme prévu et les mariages, puisque mariages il doit y avoir, seront célébrés dans la chapelle du château juste après. Je veux que vous fassiez prévenir le Baron O’Brien et le Comte de Brighton demain à la première heure que leurs filles sont ici. Ils les accompagneront au bal de demain soir afin qu’elles fassent une entrée digne de ce nom. Quand à cette Candy Neige...

- Je l’accompagnerai moi-même, décida le mage Albert. Ainsi que les deux femmes qui ont pris soin d’elle depuis sa naissance.

- Qu’il en soit ainsi, céda la reine. »

Le conseiller et le mage sortirent après s’être inclinés respectueusement et épuisée par toutes ces émotions, la reine se laissa tomber dans un profond fauteuil en observant ses petits-fils qui se tortillaient sur leurs sièges.

« Pouvons-nous nous retirer aussi, grand-mère ? Demanda Allistair.

- Bien sûr mes enfants. Allez vous reposer. DANS VOS CHAMBRES ! D’où je vous interdis de sortir avant demain soir ! Il est hors de question que vous approchiez de ces jeunes filles ! C’est mon palais, ici ! Pas un lupanar ! »

Anthony essaya bien de protester mais le regard inflexible de la reine lui fit comprendre qu’elle ne changerait pas d’avis. Frustré, il regagna ses appartements en songeant aux délices qu’il se promettait de partager dès le lendemain soir avec la jolie Candy.


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Dans la chambre qui leur avait été attribuée, Patricia avait présenté Annie à Candy, puis avait entrepris de lui raconter tout ce qui s’était passé depuis qu’elles s’étaient quittées.

« La fée Pony et la fée Maria ont été si gentilles avec nous, expliqua-t-elle.

- Mlle Pony et Soeur Maria sont des fées ? S’étonna Candy. Mais j’ai vécu avec elles pendant douze ans, et je ne les ai jamais vues utiliser la magie.

- Elles ne nous ont pas tout dit, mais je crois qu’elles n’avaient pas le droit d’utiliser leurs pouvoirs. Sans doute pour ne pas attirer l’attention de la sorcière. Mais maintenant que la prophétie va se réaliser, il n’y aura plus rien à craindre.

- Enfin, qu’est-ce que c’est que cette histoire de prophétie dont tout le monde parle ! J’aimerais bien qu’on m’explique ! »

Annie et Patricia se regardèrent, atterrées de constater que leur amie, pourtant aussi concernée qu’elles, ne savait rien du destin qui l’attendait. Elles mirent rapidement Candy au courant de ce qu’elles savaient, ainsi que de ce que les fées Pony et Maria leur avait expliqué. Ce fut au tour de Candy d’être abasourdie.

« Mais pourquoi moi ! Annie et toi, je comprends. Vous êtes toutes les deux issues de bonnes familles, mais moi ? Je ne suis qu’une orpheline.

- Il ne faut pas dire cela, protesta Patricia. Si tu as été choisie, c’est que tu as quelque chose d’exceptionnel. C’est ton destin, Candy. »

La jeune fille songea au mage Albert dont elle avait découvert qu’elle était la fille. Elle ouvrit la bouche pour en parler à ses amies, mais se ravisa. Il était trop tôt encore pour révéler ce secret. Son père avait promis de tout lui dire sur sa naissance. D’ici là, elle préférait rester la modeste Candy qu’elle avait toujours été. Elle soupira pourtant.

« Et parce qu’on vous dit que c’est votre destinée, vous êtes prêtes à épouser des princes que vous ne connaissez pas. N’avez vous jamais rêvé de tomber amoureuses ? De vous marier avec un homme que vous aimeriez et qui vous aimerait en retour ? »

Les deux amies rosirent délicieusement et baissèrent les yeux. Ce fut la timide Annie qui osa parler la première.

« Le prince Archibald est exactement celui dont j’ai toujours rêvé, avoua-t-elle d’une voix tremblante. Je suis tellement timide que je n’aurais pas osé l’approcher, mais...

- C’est pareil pour Allistair, renchérit Patricia. Il est l’homme parfait à mes yeux.

- Vous êtes amoureuses ! Constata Candy. C’est incroyable !

- Pourtant c’est ainsi. Dès que nous les avons vus, nos coeurs ont su qu’ils étaient ceux qui nous étaient destinés. Et ils n’étaient pas vraiment des inconnus pour nous. Pour toi non plus, d’ailleurs.

- Que voulez-vous dire ?

- Te souviens tu de notre première rencontre ? De la cabane où tu avais passé la nuit ? »

Candy n’était pas prête d’oublier tout ce qui lui était arrivé ces dernières semaines. Sa vie avait été entièrement bouleversé depuis ce fameux pique-nique dans la forêt et sa rencontre avec le mage Albert. Et puis il y avait eu les nains et... Le souffle coupé, elle s’assit sur le lit à côté de Patricia.

« Tu veux dire que les nains qui vivaient dans la chaumière étaient...

- Oui. Tu as compris. La sorcière leur avait jeté un sort à eux aussi en leur donnant cette apparence grotesque. Voilà pourquoi ils vivaient cachés dans la forêt. Ce n’est que depuis le retour du mage Albert qu’ils redeviennent eux-mêmes au coucher du soleil, comme Annie et moi.

- Mais il étaient quatre, remarqua Candy le coeur battant.

- Le quatrième était Terrence, le fils du duc de Granchester. Voilà pourquoi je lui ai fait confiance quand il est venu pour nous conduire à la Maison de Pony. »

Cela faisait beaucoup d’informations à assimiler pour la petite orpheline. Bien après que le jour se fut levé, alors que la sirène Annie occupait la baignoire et que le raton laveur qu’était redevenue Patricia dormait roulé en boule sur le lit à côté d’elle, Candy fixait le plafond sans réussir à trouver le sommeil. A cause d’une prophétie dont elle ignorait l’existence quelques jours plus tôt, elle se trouvait chargée d’une responsabilité trop lourde pour ses épaules. Sauver deux royaumes des malédictions qui les affligeaient ! Anéantir à tout jamais les pouvoirs de la redoutable sorcière Marlow... Et à cause d’elle, le nain le plus gentil qu’elle ait jamais rencontré se trouvait prisonnier de la cette même sorcière !

Incapable de rester enfermée, elle sortit de sa chambre. Tout le personnel du château était tellement occupé avec les derniers préparatifs de la fête que personne ne fit attention à elle. Candy n’eut aucun mal à gagner les jardins où elle s’assit près d’une fontaine pour essayer de réfléchir. C’est là que le mage la trouva. Il s’assit près d’elle sur la margelle.

« Que veux-tu savoir, Candy ? »

Elle avait tant de questions à poser qu’elle ne savait par où commencer. Finalement elle se lança.

« Parlez-moi de ma mère.

- C’était une femme merveilleuse, mon enfant. Son nom était Rosalinde et c’était une elfe des bois. Elle était si belle, si douce... J’étais éperdument amoureux d’elle.

- C’est pour cela que vous m’avez abandonnée ? Vous m’en vouliez parce qu’elle était morte en me donnant le jour ?

- Non ! Tu ne dois pas penser cela ! Tu étais tout ce qui me restait d’elle. Une preuve vivante de son passage sur cette terre. Mais il était trop dangereux pour toi de te garder avec moi. Tu as entendu parler de la prophétie, je suppose ?

- Comment faire autrement ! C’est devenu le seul sujet de conversation dans ce pays !

- C’est très important, Candy. Ne traite pas tout cela à la légère. Tout d’abord tu dois savoir qu’il n’était jamais arrivé qu’un enfant soit conçu suite à des relations entre un humain et un elfe. Quand ta mère a découvert qu’elle était enceinte, elle a consulté les plus grands astrologues de son peuple. Tous les signes étaient là : Cet enfant aurait une destinée exceptionnelle. Comme elle connaissait la prophétie, elle a tout de suite été persuadée que sa fille serait une de celle qui sortirait le royaume du chaos. Mais les elfes sont plus fragiles et plus délicats que les humains. Elle savait qu’elle prenait un risque en menant cette grossesse à terme. Pourtant, elle t’aimait déjà avant ta naissance. Pour toi, pour moi, elle a voulu continuer. Elle t’a donné toutes ses forces, Candy, à toi l’enfant qui grandissait dans son ventre, et elle l’a fait de son plein gré, en toute connaissance de cause. L’amour qu’elle te portait allait au delà de sa propre vie. Te rejeter serait revenu à la rejeter elle, et tout cet amour. Jamais je n’aurais pu. A l’instant où je t’ai tenue dans mes bras, j’ai su que je t’aimais aussi, d’un amour tout aussi inconditionnel. Ta mère m’avait fait jurer de tout faire pour que tu puisses accomplir ton destin. Pour cela, il fallait que tu restes cachée jusqu’au jour de la prophétie. Voilà pourquoi je t’ai confiée à mes amies Pony et Maria et que je me suis éloigné. Afin de ne pas attirer l’attention sur toi.

- Je me moque bien d’avoir un destin à accomplir ! S’exclama Candy. J’aurais préféré avoir un père !

- Je t’interdis de parler ainsi ! S’emporta Albert. On ne choisit pas son destin; on s’y conforme, un point c’est tout. Tu peux contribuer à sauver le royaume, à en éradiquer la sorcellerie. C’est un devoir auquel tu ne peux te dérober.

- Et voilà ! J’ai un père depuis à peine un jour, et il commence déjà à me donner des ordres ! Je ne veux pas être un pion sur le grand échiquier de l’univers. Tout ce dont je rêvais, moi, c’était d’une vie tranquille avec un gentil mari qui m’aimerait et...

- Mais ton avenir est d’être princesse. Reine un jour, qui sait. As-tu songé à tous les gens que tu vas délivrer des malédictions qui pèsent sur eux ? Comment peux-tu envisager de leur refuser cela ?

- Sacrifier mon bonheur personnel à celui du plus grand nombre ? Je trouve le prix très lourd à payer.

- Il n’y a aucune raison pour que tu sois malheureuse, mon enfant. Ne peux-tu me faire confiance ? »

D’un bond, Candy se leva et se planta devant le mage.

« Pourquoi devrais-je avoir confiance en un homme qui m’a abandonnée en prétendant que c’était pour mon bien ? Et votre autre fille ? C’était aussi pour son bien que vous avez laissé sa mère en faire une sorcière ?

- Mon autre fille ? Demanda le mage Albert qui tombait des nues. Quelle autre fille ?

- Celle que vous avez eue avec la sorcière Marlow, pardi ! Contrairement à ce que vous prétendez, on dirait bien que ma pauvre mère n’a pas été votre seul amour. Alors ne venez plus me parler de confiance. »

Candy tourna les talons et retourna au château, laissant derrière elle un mage tellement abasourdi qu’il ne fit rien pour la retenir.


-----oooOooo-----




Ce furent deux visages aimés qui accueillirent la jeune fille quand elle regagna sa chambre. Devant le sourire plein de tendresse des deux femmes qu’elle chérissait depuis l’enfance, Candy ne put retenir son émotion et s’écroula en larmes dans les bras réconfortants de Mlle Pony. Celle-ci la berça doucement en lui caressant les cheveux pour l’apaiser, comme lorsqu’elle était enfant.

« Là ! Calme-toi ma toute petite, lui chuchotait-elle. Il ne faut pas pleurer, voyons ! Aujourd’hui est un jour de joie. Le pays de Lakewood va être débarrassé de la sorcière, et toi qui as toujours été notre petite princesse, tu vas le devenir réellement. N’est-ce pas merveilleux ?

- Vous étiez au courant pour la prophétie, murmura Candy entre deux sanglots. Voilà pourquoi vous me parliez sans cesse du prince Anthony quand j’étais à l’orphelinat. C’est aussi pour cela que vous m’avez trouvé cette place chez les Legrand. Pour que j’ai plus de chances de le rencontrer.

- C’est vrai. Nous ne pouvions pas te révéler ton destin, mais j’essayais de te préparer du mieux que je pouvais. Seulement, les choses ne se sont pas passées tout à fait comme je l’avais prévu. Anthony a été maudit par la sorcière et tu n’as pas eu l’occasion de faire sa connaissance plus tôt.

- Et vous ne m’avez jamais dit que vous étiez des fées, reprocha Candy en jetant un regard à Soeur Maria.

- Utiliser des pouvoirs magiques aurait risqué d’attirer l’attention de la Marlow. C’était risqué.

- C’est plus compliqué que cela, intervint Soeur Maria. Tout est de ma faute. Je vais t’expliquer. Tu as le droit de connaître la vérité. »

Mlle Pony regarda son amie d’un air réprobateur, mais celle-ci n’en tint pas compte. Brusquement intéressée, Candy sécha ses larmes et se redressa pour écouter l’histoire de Soeur Maria.

Celle-ci lui raconta comment jeune fée récemment diplômée, elle s’était vu confier l’éducation d’une enfant. Quand elles entraient dans la profession, les nouvelles fées n’avaient pas encore la charge d’humains. Elles débutaient leur carrière en étant chargées des animaux ou des plantes. Voilà comment Maria avait reçu la charge de la fille du roi des crapauds. C’était une jeune crapaude très gentille, même si elle était un peu trop gâtée par ses parents. Mais un jour, elle était tombée amoureuse d’un humain qui était passé près de sa mare.

« Elle était si malheureuse, expliqua Soeur Maria en secouant la tête. Elle l’aimait tant ! Elle m’a tellement suppliée... Alors, j’ai cédé. Je savais que c’était interdit, mais je voulais son bonheur. Bien que ce fut formellement interdit, je l’ai transformée en humaine. Dès qu’il l’a vue, le jeune homme est tombé amoureux d’elle. Ma petite chérie était aux anges. Ils se sont mariés et tout allait bien. Jusqu’à ce que quelqu’un me dénonce au conseil des fées. J’ai été punie et on m’a retiré mes pouvoirs et ma baguette magique. J’ai été condamnée à vivre comme une femme ordinaire. C’est à peu près à ce moment que le Mage Albert t’a confiée à mon amie Pony. Je suis allée la trouver et elle accepté de m’héberger. Ensemble, nous avons eu l’idée d’ouvrir un orphelinat où tu passerais inaperçue parmi les autres enfants. C’est aussi pour ne pas me rappeler ma punition que Pony a cessé de se servir de sa baguette. J’ai été très heureuse d’aider tous ces enfants pendant toutes ces années. En plus, j’étais ravie de te protéger de la Marlow, d’autant que c’est elle qui m’avait dénoncée.

- Qu’est-il arrivé à votre petite protégée et à son amoureux ?

- Le conseil a jugé que j’étais seule responsable. On les a laissé tranquilles, d’autant qu’ils avaient déjà un bébé.

- Tout cela est du passé, annonça Mlle Pony en se raclant la gorge pour dissimuler son émotion. Ce soir tout rentrera dans l’ordre et la punition de Maria sera levée. »

Candy soupira. Soeur Maria la regardait avec sa bienveillance habituelle, mais elle ne pouvait que songer que l’avenir de cette femme qu’elle avait toujours considérée comme une seconde mère, était entre ses mains. Combien d’autres destins dépendaient-ils de la décision qu’elle prendrait ce soir ? Le nombre devait en être impressionnant. Tant d’inconnus comptaient sur elle, alors qu’elle se sentait perdue.

Des coups discrets furent frappés à la porte qui s’entrouvrit pour laisser passer un nain chargé de volumineux paquets. Ce ne fut que lorsqu’il eut posé son fardeau sur le lit que Candy le reconnut.

« Monsieur Coquet ! S’exclama-t-elle.

- Prince Archibald, ajoutèrent les fées en s’inclinant.

- Heu... Oui, pardon ! Prince Archibald, corrigea Candy en rougissant.

- Appelez moi Archie, proposa le Prince. »

Il parcourait la pièce des yeux, à la recherche de quelqu’un. La fée Pony se planta devant la porte de la salle de bains et croisa les bras. Son visage sévère exprimait clairement qu’elle ne laisserait personne passer cette porte. Le message était on ne peut plus évident et le nain se tourna vers Candy.

« Est-ce qu’Annie va bien ? Demanda-t-il.

- Elle va très bien, répondit la jeune fille en souriant. Elle sera ravie d’apprendre que vous êtes passé la voir.

- Que venez vous faire ici, jeune prince ? S’enquit la fée Maria. Je croyais que la reine vous avait confiné dans votre chambre, ainsi que ses autres héritiers.

- Je suis venu vous informer que les parents d’Annie et de Patricia étaient arrivés. Le comte et la comtesse de Brighton vont venir ici, puisqu’ Annie ne peut pas se déplacer. Les O’Brien attendent Patricia dans la chambre voisine de celle-ci.

- Je vais l’y accompagner, proposa Maria en prenant le raton laveur dans ses bras.

- La chambre en face de celle-ci vous a été réservée, Candy. Vous pourrez vous y préparer pour le bal. D’ailleurs je vous ai apporté des robes. Celle-ci est pour Annie, dit-il en prenant le paquet du dessus. Dites lui que j’ai réparé les dégâts occasionnés par sa mésaventure de l’autre matin, elle comprendra. Je... Je serais très heureux si elle acceptait de la porter ce soir. »

Le malheureux nain se dandinait d’un pied sur l’autre, et la jeune fille était certaine qu’il avait rougi sous sa barbe. Elle ressentit un pincement de coeur en songeant combien elle aurait aimé que quelqu’un prenne soin d’elle de la sorte.

« Oh ! Et celle-ci est pour vous. Reprit Coquet en lui tendant un autre paquet.

- C’est très gentil de votre part, Prince, dit Mlle Pony, mais grâce à mes pouvoirs, j’ai l’intention de confectionner la plus jolie des robes à ma petite Candy. »

Celle-ci avait ouvert le paquet et découvert avec ravissement la robe de soie verte qu’elle avait tant admirée dans la boutique le jour de l’incident avec Elisa Legrand.

« Vous vous en êtes souvenu, murmura-t-elle d’une voix émue.

- Quand j’ai dit à Terry combien cette robe vous avait plu, il a tenu à l’acheter et m’a demandé de vous la donner pour que vous la portiez ce soir. Nous ne savions pas à ce moment-là que vous aviez une fée comme protectrice.

- Merci de votre offre, Mlle Pony, mais je porterai cette robe.

- Elle est très jolie, c’est vrai, se défendit la fée un peu vexée, mais je peux faire beaucoup mieux...

- Je n’en doute pas, mais c’est le cadeau d’un ami. A mes yeux, rien ne saurait être plus précieux. »

En serrant la robe sur son coeur, elle suivit le nain qui la conduisit à sa chambre.


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 17:02     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 13




C’est une Candy essoufflée et tremblante mais sauve, qui atteignit l’orée des marais. Très ému, Albert la serra dans ses bras.

« Candy, mon petit ! Tu n’as rien ?

- Je vais bien, Mage Albert. Mais j’ai eu si peur ! Sanglota la jeune fille.

- C’est terminé. Tu n’as plus rien à craindre. Partons vite d’ici.

- Non ! S’écria Candy. Vous devez aider Grincheux ! Il est prisonnier de la sorcière. Il s’est enfermé volontairement pour que je puisse sortir. Je ne voulais pas le laisser, mais il m’a fait promettre de vous trouver. Il disait que vous l’aideriez...

- Mon premier souci est de te mettre en sécurité, Candy.

- Mais... Nous ne pouvons pas l’abandonner ! Il compte sur vous ! Il...

- Candy ! Mes pouvoirs sont impuissants dans le donjon de la sorcière, et ton ami le savait. C’est en connaissance de cause qu’il a pris sa décision.

- Il m’a menti ? Pour me sauver ?

- Oui. Il était prêt à tout pour que tu sois libre. Le mieux que tu puisses faire maintenant c’est d’honorer son choix en conservant cette liberté et en accomplissant ton destin.

- Ai-je quelque chose à voir avec cette fameuse prophétie ?

- Que sais-tu à ce propos, demanda Albert en fronçant les sourcils.

- Presque rien. La sorcière en a parlé, mais je n’ai rien compris.

- Je t’expliquerai tout dès que nous serons au château. Viens maintenant.

- Attendez ! Dit Candy en reculant alors que le mage allait lui prendre la main. La sorcière m’a aussi dit autre chose... Elle prétend... que vous êtes mon père ! »

Albert soupira et scruta le visage de la jeune fille. Il y lut le doute et beaucoup de rancoeur. Mais l’heure n’était plus aux faux-fuyants.

« Oui, Candy. Je suis ton père. Et il va falloir que nous ayons une longue conversation tous les deux, avant le bal de demain soir ! »

Il prit la main de sa fille, trop abasourdie pour réagir, et tous deux disparurent ne laissant derrière eux que leurs empreintes dans la terre spongieuse et un petit nuage de fumée blanche.


-----oooOooo-----




Candy et le mage se re-matérialisèrent dans la cour du palais royal. Bien que la nuit fût tombée, une grande agitation régnait. Dès leur apparition, une troupe d'hommes en armes se précipita vers eux et Candy effrayée se réfugia derrière son père. Les soldats s'arrêtèrent en le reconnaissant et leur officier s'inclina devant Albert.

« Excusez-nous, Mage Albert. Nous ne vous avions pas reconnu.

- Pourquoi ce branle-bas de combat ? Demanda le magicien.

- Les princes Allistair et Archibald ne sont pas encore rentrés. Nous nous apprêtions à partir à leur recherche. »

Le mage laissa échapper un juron imagé et se tourna vers sa fille.

« Je dois voir pourquoi ils ont été retardés et veiller à ce qu’il ne leur arrive rien. Tu restes à l’intérieur du palais et tu m’attends, d’accord ?

- Vous n’allez pas m’abandonner ? Je ne veux pas rester toute seule ici ! »

Albert poussa un soupir mais vit soudain le prince Anthony qui se dirigeait vers eux à grandes enjambées.

« Tu restes avec lui, ordonna-t-il en le désignant du doigt. Je n’en ai pas pour longtemps. »

Candy se tourna dans la direction qu’il indiquait. Impressionnée par le beau jeune homme qui s’approchait, elle ne se rendit même pas compte que le mage s’était une nouvelle fois évaporé. Jamais elle n’avait vu plus beau garçon que ce noble richement vêtu qui s’avançait vers elle. Ses cheveux blonds comme les blés bouclaient autour de son visage parfait et quand il fut assez près, elle pu admirer le bleu d’azur de ses prunelles qui brillaient d’un feu intérieur. Il lui semblait l’avoir déjà vu quelque part sans qu’elle réussisse à se souvenir où exactement. Sa stupéfaction fut à son comble quand l’homme s’inclina courtoisement devant elle.

« Candy ! S’exclama celui-ci. Enfin vous voilà ! »

La jeune fille fut tentée de regarder par dessus son épaule pour voir s’il n’y avait pas quelqu’un derrière elle. Mais il l’avait appelée par son prénom, preuve que c’était bien à elle qu’il s’adressait.

« Vous me connaissez ? Demanda-t-elle, surprise.

- Je sais beaucoup de choses sur vous, Demoiselle, et j’espère bien tout connaître de vous sous peu. »

D’ailleurs, pourquoi attendre ? Songea Anthony. Une telle occasion ne se laissait pas passer. De toute façon, demain à la même heure, Candy serait sa femme. Il n’avait aucun scrupule à prendre un peu d’avance sur la cérémonie. Avec un sourire engageant, il prit la main de sa promise et l’entraîna vers le palais.

« Vous a-t-on jamais dit que vous ressembliez au prince Anthony ? S’enquit-elle.

- Cela n’a rien d’un hasard, vous savez ! Vous saurez bientôt pourquoi. Mais nous devons nous dépêcher. La reine Elroy souhaite vous rencontrer et je dois d’abord vous examiner. Venez avec moi. »

La reine voulait la voir ? Candy était si étonnée par cette nouvelle qu’elle se laissa faire sans résister. Ce n’est qu’en entendant son compagnon fermer la porte de la pièce où il l’avait emmenée qu’elle reprit ses esprits. Elle regarda autour d’elle la chambre luxueusement meublée qui restait une chambre et pas un cabinet d’examen...

« Ici nous serons tranquilles, reprit le jeune homme en s’adossant à la porte. Déshabillez-vous !

- Pardon !?

- Enlevez vos vêtements ! Tous vos vêtements !

- Mais pourquoi ?

- Pour que je puisse vous examiner ! »

Candy commença à obéir à sa voix persuasive. Elle avait déjà défait les premiers boutons de sa robe quand le doute s’insinua dans son esprit.

« Vous êtes docteur ? Demanda-t-elle, méfiante.

- Disons que je suis très habile à soulager les jeunes femmes de certaines tensions...

- Vous soignez la reine Elroy ? »

Anthony grimaça à cette évocation car il se voyait mal appliquer le genre de traitement qu’il pratiquait à sa propre grand-mère ! Mais Candy avait cessé de se dévêtir et serrait farouchement son corsage sur sa poitrine alors qu’il sentait son sang s’échauffer. Il s’approcha d’elle d’un pas décidé.

« Je tiens beaucoup à la santé de la Reine, c’est certain. Laissez-moi vous aider, nous irons plus vite...

- Je ne suis pas malade, affirma la jeune fille.

- Mais vous avez été l’otage de la sorcière. Qui sait si elle ne vous a pas laissée repartir avec des seins tout racornis, ou des fesses plates ?

- Et en quoi cela affecterait-il la santé de la reine ? Protesta Candy en reculant.

- La sienne, je ne sais pas, mais la mienne sûrement ! Allons, laissez-vous faire, Candy. Je vous promets que vous ne le regretterez pas. »

Il tenta de la prendre par les épaules et de tirer sur ses vêtements, mais Candy le repoussa de toutes ses forces, bien qu’elle sache qu’elle n’était pas de taille à lutter contre lui.

« Lâchez-moi, espèce de malade ! Sinon je le dirais au Mage Albert ! »

La menace sembla faire son effet car le jeune homme ne bougea plus. Il avait l’air d’hésiter. Avant qu’il prenne sa décision, des coups répétés furent frappés contre la porte.

« Prince Anthony ! Prince Anthony vous êtes là ? Vos cousins sont arrivés et la Reine vous réclame dans la salle du trône. Tout de suite ! »

Le jeune homme passa la main dans ses cheveux en soupirant. Décidément, rien ne se passait comme il le souhaitait depuis le retour du Mage Albert. L’air éberlué de Candy amena un sourire sur son visage.

« Vous êtes le... Mais c’est impossible ! Vous ne pouvez pas être le prince Anthony...

- Pour vous servir. Répondit-il en lui faisant une courbette exagérée.

- Et vous m’avez demandé de me mettre toute nue ! Les princes ne font pas ce genre de choses.

- Je vous assure que si ! Ne soyez pas aussi bégueule ! Tout ce que je voulais, c’était un petit avant-goût de notre nuit de noces.

- Et bien, en guise d’avant-goût, vous pouvez toujours prendre ça ! »

Avant qu’Anthony ait pu réagir, la main de la jeune fille s’abattit sur sa joue et elle se précipita vers la porte pour se trouver nez à nez avec un majordome aussi surpris qu’elle. Derrière lui, elle vit passer deux jeunes gens qui lui étaient aussi inconnus que ce pervers qui se faisait passer pour le Prince Anthony. Ils portaient dans leurs bras des jeunes filles étroitement serrées dans des couvertures afin de leur éviter de poser leurs pieds nus sur le marbre glacé du corridor. L’air aussi digne que possible malgré sa joue rouge, Anthony sortit à son tour et lui désigna la direction prise par l’étrange quatuor.

« Venez ! Ne faisons pas attendre la reine. »

Candy le suivit dans une immense salle d’apparat. Assise sur son trône, la Reine Elroy avait l’air encore plus sévère que sur ses portraits officiels. De chaque côté se tenaient son conseiller personnel et le mage Albert, l’air soucieux. Les trois jeunes couples s’avancèrent sur l’épais tapis et Allistair et Archibald remirent leurs douces amies sur leurs pieds sans s’écarter d’elles pour autant. L’une des jeunes filles se tourna vers Candy qui la reconnut. Sans se soucier du protocole, elle se précipita vers elle et la serra dans ses bras.

« Patricia ! Je suis si contente de te revoir. Mais pourquoi es-tu là ? Tu devais rester cachée à la maison de Pony.

- Je sais, Candy. Mais demain c’est la pleine lune et la prophétie va se réaliser. Il fallait que je sois là, tu comprends ? »

Non, Candy ne comprenait rien, mais elle hocha la tête, espérant que les explications viendraient en leur temps. Un toussotement discret lui fit regarder en direction de la reine. Celle-ci les contemplait tous, les lèvres pincées. Anthony était le seul du groupe à être présentable, quoique la marque sur sa joue soit inhabituelle. La petite blonde à côté de lui avait l’apparence d’une domestique et fixait sa souveraine sans vergogne et sans manifester aucune des marques du respect qui lui était dû ! Quand aux autres... Ses deux petits-fils portaient des pantalons informes qui tenaient avec une ficelle, et les deux filles... étaient sans doute dans le plus simple appareil sous les couvertures dont elles étaient enveloppées !

« On s’incline devant sa Majesté, fit remarquer le conseiller. »

Par réflexe, Candy exécuta une révérence parfaite, mais empêtrées dans leurs couvertures, Annie et Patricia ne réussirent qu’à esquisser une vague courbette. La première faillit même tomber tête la première sur le sol. Ce fut Archibald qui la rattrapa et la retint contre lui. La couverture avait glissé et il se perdit dans la contemplation de l’épaule ronde et blanche qui s’offrait à sa vue.

Le conseiller leva les yeux au ciel.

« Ce n’est pas une façon de saluer Sa Majesté, protesta-t-il.

- Et comment voulez-vous qu’elles s’y prennent, l’invectiva Candy dont la colère n’était pas retombée. Si elles écartent les bras, c’est d’attentat à la pudeur dont elles se rendront coupables. A moins que ce ne soit ce que vous espériez. Êtes-vous tous aussi pervers que ce type qui dit être le Prince Anthony ? »

Choquée, la reine se redressa.

« Je vous trouve bien insolente jeune fille ! Je peux vous assurer qu’il s’agit bien là de mon petit-fils Anthony, héritier du trône de Lakewood. Je devrais vous faire jeter en prison pour un tel manque de respect !

- Ne soyez pas fâchée Grand-mère, intervint Allistair. Nous avons été surpris par le coucher du soleil. Archibald a réussi à nous confectionner ces pantalons avec les moyens du bord, mais nous n’avions pas le temps d’en faire autant pour Annie et Patricia. Les sbires de la sorcière étaient à nos trousses et le temps nous était compté. »

Il fut interrompu par un éternuement sonore de Patricia qui resserra sa couverture autour de son corps.

« Patricia, ma douce, tu as froid ? S’inquiéta Allistair.

- Un peu... »

Allistair lui frotta gentiment le dos pour la réchauffer et Patricia tourna vers lui des yeux débordants d’amour. Ils étaient seuls au monde tandis qu’Anthony ne pouvait détacher son regard de la naissance d’un sein généreux dévoilée par la couverture.

- Tout est de votre faute ! Reprit Candy en s’adressant sans peur à la reine. Vous croyez-vous donc tout permis ? Dans la plus humble maison de ce royaume, on aurait proposé à ces jeunes filles de quoi se réchauffer et s’habiller. Mais ici, bien que ce soit un palais, on les traite sans aucune considération. Si c’est ainsi que se comportent les nobles, je suis bien contente de ne pas en être une ! »

La reine fronça les sourcils, mais quand son conseiller fit mine de s’avancer pour répondre à la jeune fille, elle le fit s’arrêter d’un geste autoritaire. Elle observa avec intérêt celle qui lui parlait avec tant de véhémence.

« Il n’est jamais agréable pour un souverain d’être mis en face de ses propres carences, remarqua-t-elle d’une voix contenue. Je n’aime pas beaucoup votre ton, Mademoiselle, mais sur le fond, vous avez raison. Louis, mon conseiller ici présent va vous conduire toutes les trois dans une chambre et veiller à ce qu’on vous apporte tout ce qu’il vous faut. Nous nous entretiendrons plus tard. Vous pouvez vous retirer. »

Les trois jeune filles remercièrent la reine et suivirent le dénommé Louis dont la moue réprobatrice disait assez ce qu’il pensait de ce manquement au protocole. Les princes firent mine de les suivre, mais la reine les retint.

« Pas si vite, vous trois ! Je n’en ai pas encore fini avec vous. »


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 16:59     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 12




A la lisière des marais, le Mage Albert et Grincheux observaient le donjon de la sorcière qui se découpait au loin. Le ciel plombé et les nombreux corbeaux qui tournaient autour le faisaient paraître encore plus sinistre. Pas âme qui vive aux alentours. Même les crapauds étaient silencieux. Las d’attendre, Terry interrogea le mage.

« Que comptez-vous faire, Mage Albert ? Avez-vous un plan ?

- Hélas non, mon ami !

- Vous voulez dire que vous êtes venu jusqu’ici sans savoir comment vous y prendre pour libérer Candy ? Ne pouvez-vous utiliser votre magie, ou jeter un sort, ou...

- Ce que vous devez comprendre, Terrence, c’est que tout magicien qui pénètre sur le territoire d’un autre perd temporairement ses pouvoirs. Et si cela arrive, je ne pourrais plus maintenir la protection que j’ai étendue autour de Candy. Voilà pourquoi je ne peux franchir cette limite. »

Terry comprit la raison pour laquelle le mage avait besoin d’aide. C’était lui qui allait devoir entrer dans le donjon. Mais pour délivrer Candy, il était prêt à prendre tous les risques.

« Je la trouverai. Affirma-t-il avec plus d’assurance qu’il n’en éprouvait réellement. Mais ensuite ?

- Dès qu’elle aura franchi les marais et sera près de moi, je veillerai sur elle. Mais Terrence... Entrer dans ce donjon n’est pas sans danger pour vous. La magie de la sorcière est puissante et vous êtes fragilisé par les sorts qui vous ont déjà été jetés. Je ne peux pas garantir que cela sera sans conséquences.

- J’irais de toute façon. Mais j’aimerai vous poser une question.

- Est ce une condition ?

- Non. Mais c’est peut-être ma dernière occasion de satisfaire ma curiosité. Candy est l’une des jeunes filles de la prophétie, n’est-ce pas ?

- Oui, Terrence. Mais elle est plus que cela. Elle est la fille de ma douce et tendre Rosalinde, la seule femme que j’ai jamais aimée.

- Candy est votre fille ! Et vous êtes prêt à la laisser épouser ce coureur d’Anthony pour sauver le royaume ?

- Je suis le protecteur du pays de Lakewood, mon jeune ami. C’est mon devoir.

- Merci de m’avoir dit la vérité, Mage Albert. Moi aussi je sais où est mon devoir. Je n’y faillirai pas. »

Les deux hommes se serrèrent la main, trop émus pour ajouter quoi que ce soit. Puis Terry rampa à travers les roseaux pour se rapprocher des marais. Il trouva une barque à fond plat amarrée dans un bosquet et embarqua sans hésiter. Il progressa lentement en s’aidant d’une longue gaffe trouvée dans le fond du bateau. Son coeur battait à tout rompre. A tout instant il s’attendait à voir fondre sur lui une créature diabolique envoyée par la sorcière. Dans le silence oppressant qui l’entourait, il n’entendait que le clapotement de l’eau le long de la coque et un curieux bruit de succion chaque fois qu’il arrachait sa gaffe de la vase qui couvrait le fond du marais.

Ce fut pourtant sans encombre qu’il atteignit le donjon. Il attacha sa barque à un ponton branlant et s’aventura dans la bâtisse avec précaution. Il ne tarda pas à constater que les rares personnes qu’il croisait de lui prêtaient aucune attention. Tous les serviteurs de la sorcière avaient, à un moment ou un autre, subi son courroux, de sorte qu’ils étaient tous affligés des tares les plus diverses. Certains avaient le visage couvert de pustules, d’autres arboraient un système pileux digne d’un ours, mais la majorité d’entre eux avaient l’apparence de crapauds géants qu’on aurait transformés en êtres humains. Après tout, peut-être était-ce là la raison pour laquelle il n’y avait plus aucun batracien dans les marais. La Sorcière les avaient tous métamorphosés pour en faire ses serviteurs.

Bien qu’il fut le seul nain présent, personne ne l’arrêta ou ne lui posa de question. Il pénétra dans la bâtisse et commença à gravir l’immense escalier qui menait au sommet. Selon les maigres indications fournies par le mage, le laboratoire de la Marlow se trouvait tout en haut. Curieusement, plus il montait et plus l’obscurité se faisait dense. Bientôt il ne distingua plus à trois pas devant lui. Il tâtonna le long du mur jusqu’à découvrir une porte. Il la poussa aussi discrètement que possible, espérant avoir atteint son but.

Un cri strident lui vrilla les oreilles et réduisit tous ses espoirs à néant. Ce n’était pas le laboratoire, mais une chambre dont il n’eut aucune peine à reconnaître l’occupante. Susanna Marlow ! Il fit un pas vers elle mais la malheureuse grimpa sur une chaise en continuant à hurler. Son derrière était aussi lumineux qu’une lanterne du 14 juillet et elle tremblait de tous ses membres en ramenant ses jupons autour de ses jambes grêles.

« Au secours ! Il y a un nain dans ma chambre ! »

Elle allait finir par ameuter tout le château. Terry la fit vivement descendre de son perchoir et la bâillonna de sa main en la maintenant solidement. Mais elle le mordit et il la libéra avec un juron.

« Lâchez-moi, vilain nain ! Ne vous approchez pas de moi, j’ai horreur des nains !

- Allez-vous arrêter de hurler comme une malade ! C’est moi, Terrence !

- Vous n’êtes pas Terrence ! Mon fiancé est beau et...

- C’est votre mère qui m’a transformé en nain. Ne me dites pas que vous n’étiez pas au courant.

- Elle m’avait dit vous avoir jeté un sort, bien sûr, mais le savoir et le voir de mes propres yeux, ce n’est pas la même chose. Maman sait que je déteste les nains. C’est pour cela qu’il n’y en a pas dans le château.

- Comment pouvez-vous avoir peur des nains, et vivre entourée de crapauds géants, visqueux et baveux ?

- J’aime bien les crapauds, geignit Susanna qui semblait se calmer peu à peu. »

Terry frissonna en imaginant son château peuplé de ces créatures gluantes si jamais il était obligé d’épouser cette folle qui déjà reprenait :

« Vous pouvez prétendre être n’importe qui. Les nains se ressemblent tous. Comment les distinguer les uns des autres ?

- Je vous assure que je suis bien celui que vous attendez. Comment pourrais-je vous le prouver ?

- Il y a bien le chaudron magique dans le laboratoire de maman... »

Le laboratoire ! Songea le nain. Il devait absolument y entrer !

« Et qui me dit que vous n’êtes pas venu pour délivrer cette fille qui y est enfermée ? On dit que mon fiancé s’intéresse à elle plus qu’à moi ! Si c’est le cas, vous en serez pour vos frais. La porte du laboratoire est enchantée et ne s’ouvre que pour ma mère ou moi. »

Ainsi le mage ne s’était pas trompé. Candy étaient bien retenue dans le laboratoire de la sorcière ! Exulta Terry. Et si Susanna était pour lui le seul moyen de s’y introduire, il n’avait pas le choix. Il mit un genou à terre et posa les mains sur son coeur, image même de la sincérité, du moins l’espérait-il.

« Je ne vois pas du tout de qui vous parlez, douce Susanna. Je vous assure qu’aucune femme ne vous arrive à la cheville, Demoiselle. Vous êtres tellement... éblouissante ! Conclut-il tandis que son regard, désormais à la bonne hauteur, lui permettait de constater que le postérieur de la fille émettait une lueur de plus en plus vive. Par Dieu ! Un peu plus, et il allait se mettre à faire des étincelles ! Allons dans ce laboratoire, ajouta-t-il d’une voix persuasive. Vous pourrez constater vous-même que je suis bien Terrence et que cette fille n’est rien pour moi. »

Pour ajouter à son plaidoyer, il prit les mains de la jeune fille dans les siennes et les serra avec ferveur, mais elle les lui retira rapidement avec une grimace de dégoût. Dans un grand envol de jupons, elle se retourna et se dirigea vers la porte.

« Après tout, pourquoi pas, décida-t-elle. De toute façon vous ne pourrez pas la faire sortir. »

Terry la suivit. Trop heureux à l’idée de rejoindre Candy, il mit de côté la menace contenue dans ces derniers mots. Il distingua immédiatement la jeune orpheline en pénétrant dans la pièce. Elle était recroquevillée au fond de son cachot, mais se leva à leur entrée. Terry lui fit discrètement signe de se taire et s’approcha de sa prison pendant que Susanna ranimait le feu sous le chaudron et marmonnait des incantations.

« Monsieur Grincheux ! Souffla Candy. Mais que faites-vous ici ?

- Je suis venu vous aider à vous échapper, Candy. Vous devez être au palais royal avant demain soir, nuit de la pleine lune.

- La sorcière m’a parlé d’une prophétie, mais je n’ai rien compris, soupira Candy. Pourquoi moi ?

- C’est votre destin, jolie Candy. Promettez-moi de faire ce que je vous dirais, quoi qu’il arrive.

- Mais...

- Promettez le !

- D’accord, soupira la jeune fille. Je vous fais confiance. »

Le nain s’éloigna de la porte de cachot avant que Susanna ne se rende compte de leur conciliabule. Juste à temps avant qu’elle ne se tourne vers eux.

« La potion est chaude, annonça-t-elle. Viens ici, nain, et penche toi sur le chaudron que je vois si tu es celui que tu prétends. »

Terry fit ce qu’elle disait avec un peu d’appréhension. A travers la fumée et les frémissements du liquide nauséabond, il distingua son visage, son vrai visage ! Susanna se pencha elle aussi pour mieux voir, mais au lieu de son image, ce fut celle de Candy que le jeune homme vit apparaître à côté de la sienne. Il retint son souffle comme l’apprentie sorcière se reculait, mais elle ne semblait pas avoir vu le phénomène.

« Ainsi c’est vrai ! S’exclama Susanna. Ma mère a été horrible de vous faire une chose pareille. Et cette fille ? Demanda-t-elle en désignant Candy du doigt. Qu’est-elle pour vous ?

- Rien du tout, je vous le jure, mon admirable Susanna. Laissez-la partir, et je resterai près de vous jusqu’à ma mort.

- C’est impossible, répondit la jeune sorcière en secouant la tête. La seule façon d’ouvrir sa prison est d’enfermer quelqu’un dans la cellule voisine. Mais je peux faire quelque chose pour vous. Je vais vous rendre votre apparence normale, afin que nous soyons heureux tous les deux !

- Vraiment ? Vous savez ce qu’il faut faire ?

- Ne l’écoutez pas, Monsieur Grincheux ! Intervint Candy. Elle a raté tous les sorts qu’elle a essayé jusqu’à présent sur moi !

- Tais-toi, méchante fille ! Hurla Susanna. C’est parce que tu es à moitié magicienne, toi aussi. Mais sur lui, ce sera facile. Il suffit de trouver la formule et de la lire à l’envers. C’est l’enfance de l’art ! »

A ces mots, elle sortit d’un tiroir une baguette magique aussi épaisse qu’un manche à balais et se mit à feuilleter avec énergie le gros grimoire posé sur la table. Terry en profita pour se rapprocher à nouveau de Candy.

« Ecoutez-moi, Candy. Quand je vous aurais fait sortir, je veux que vous courriez le plus vite possible. Il faut descendre le grand escalier en colimaçon qui est en face de la porte et traverser la cour sans vous retourner. Juste après le pont-levis, il y a une barque amarrée au ponton. Servez-vous en pour traverser les marais en vous dirigeant tout droit sur le grand arbre mort. Le Mage Albert vous attend pour vous mettre en sécurité. C’est compris ? »

Candy hocha la tête, anxieuse à l’idée de revoir le Mage maintenant qu’elle savait qu’il était son père. Puis elle fronça les sourcils.

« Mais comment allez-vous faire ? Vous avez entendu ce qu’à dit cette fille. On ne peut pas ouvrir la porte de cette cellule.

- Faux ! Elle a dit qu’il n’y avait qu’un moyen, et je vais l’utiliser, répondit Terry en pénétrant dans la prison voisine. »

Candy voulut l’arrêter mais il était trop tard. Grincheux avait déjà enclenché la grille de sa cellule qui se verrouilla avec un craquement sinistre. Mais il n’entendit que le petit clic libératoire de celle de sa voisine.

« Je ne peux pas vous abandonner ici, se lamenta la jeune fille. Ces sorcières sont folles, elles...

- Elles ne me feront rien, Candy. Elles ont besoin de moi. Et vous avez promis de faire ce que je vous dirai ! Rejoignez le mage Albert !

- Pas sans vous !

- Obéissez, Candy. La seule personne à pouvoir me sortir d’ici, c’est le Mage. Vous devez lui raconter ce qui s’est passé ! »

Candy hocha finalement la tête mais n’eut pas le temps de dire un mot car Susanna venait de réaliser que sa rivale était libre.

« Ah ! Qu’avez-vous fait ! Elle ne devait pas sortir !

- Susanna, ma chérie, intervint Terry. C’est le seul moyen que j’ai trouvé de vous prouver que je voulais rester près de vous. Laissez cette fille partir. Si elle restait, elle ne ferait que troubler notre bonheur. Juste vous et moi, ma chérie, c’est tout ce que je demande...

- Oh ! Vous êtes tellement adorable, minauda Susanna en se tortillant. Vous dites de si jolies choses... »

Quelle idiote ! Songeait Terry qui insista :

« Je n’ai jamais été aussi sincère qu’en ce moment, quand je vous dit qu’il faut l’éloigner d’ici. Ouvrez-lui la porte, Susanna chérie...

- Oui... Oui ! Tout de suite. Nous n’avons pas besoin d’elle... Ensuite je pourrais m’occuper de vous. »

L’apprentie sorcière poussa sa rivale vers la porte qu’elle ouvrit sans quitter Terry des yeux, et la poussa dans le corridor. Les regards de Candy et de Grincheux se croisèrent une dernière fois et le nain essaya de mettre dans le sien toute la conviction qu’il ressentait. Ce fut comme si Candy entendait sa voix dans sa tête qui lui ordonnait de courir. Les larmes aux yeux, elle prit ses jambes à son cou et se précipita dans l’escalier.

Susanna avait déjà oublié son existence. Ayant enfin trouvé la bonne formule, elle s’assit en tailleur devant la cellule de son fiancé et commença à la lire à l’envers en ânonnant. Après avoir buté sur plusieurs mots, elle arriva à la fin et donna un grand coup de son bâton sur les barreaux. Un éclair rouge en jaillit qui s’enroula autour du nain, lui coupant le souffle. Puis il disparut aussi vite qu’il était apparût. Terry soupira en constatant qu’il était toujours Grincheux ! Non qu’il ait eu confiance dans les capacités de cette idiote capable de croire qu’il était amoureux d’elle, mais quand même... Il avait eu un tout petit espoir...

« Pourquoi ça n’a pas marché, se plaignit Susanna. J’ai tout fait comme il faut ! Je vais réessayer ! »

Elle recommença. Une fois, deux fois, quatre fois... Sans plus de succès. Terry la laissait faire. Chaque tentative lui permettait de gagner un temps précieux. Pas pour lui, mais pour Candy ! Alors qu’il était en train de se dire que la jeune fille devait désormais être hors de danger, Susanna perdit patience et décida d’aller chercher sa mère. Au même instant, le nain distingua par l’étroite meurtrière la clarté d’une fusée verte qui montait dans le ciel. Le signal convenu avec le Mage ! Candy était en sécurité !

Terry était tellement soulagé d’avoir réussi à sauver la jeune fille, qu’il ne prêta qu’un attention distraite à la sorcière vociférante ramenée par Susanna. Quoi qu’elle envisage de lui faire subir, il s’en moquait car rien ne saurait être pire que d’avoir volontairement abandonnée Candy à un autre ! Mais ce n’était pas après lui que la sorcière Marlow en avait. Elle accablait de reproches une Susanna larmoyante.

« C’est de ta faute, ma pauvre fille ! Combien de fois t’ai-je dis je ne pas essayer des sorts que tu ne maîtrise pas ?

- Mais je savais ce qu’il fallait faire ! J’ai bien lu la formule à l’envers, comme vous me l’aviez montré, et...

- Et tu t’es trompée ! Il ne faut ni hésiter ni bafouiller quand on pratique ce genre d’enchantement. A combien de fois t’y es-tu reprise ?

- Cinq fois ! Avoua sa fille.

- De mieux en mieux ! S’exclama la sorcière. Tu as scellé toi même ton destin, ma fille !

- Qu’est-ce que j’ai fait, balbutia Susanna, inquiète.

- Tu as rendu le sort définitif, imbécile ! C’est comme si tu avais rajouté cinq verrous sur une porte déjà cadenassée, et qu’en plus, tu ais cassé les clefs à l’intérieur ! Ton fiancé restera un nain jusqu’à la fin de ses jours ! Un demi-homme avec une demie-sorcière ! Quel beau couple vous ferez ! Heureusement que tu seras duchesse ! C’est la seule chose qui compte. »

Atterré, Terry leva les yeux vers la meurtrière et constata que le soleil s’était couché sans qu’il s’en rende compte. La transformation n’avait pas eu lieu. Il était toujours Grincheux et le resterait toute sa vie. Que lui importait dans ces conditions d’être prisonnier ici et d’être obligé d’épouser Susanna ? Rien du tout ! Dans la triste vie qui serait la sienne désormais, il garderait au fond de son coeur le doux souvenir d’avoir sauvé Candy et cela seul comptait.


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 16:54     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 11




Avant de regagner le château de la Reine Elroy, les trois cousins avaient fait un détour par la boutique d’Archibald car il souhaitait donner des instructions à ses employés avant de s’absenter pour un temps indéfini. Terry qui avait un service à lui demander le suivit à l’intérieur pendant que les deux autres attendaient sur le trottoir.

« Regarde ! Dit soudain Allistair. Ne serait-ce pas le Mage Albert qui vient vers nous. Il a l’air drôlement pressé ! Et il n’est pas seul... »

Anthony regarda dans la direction indiquée et son visage prit une expression béate.

« Whaou ! Quelle femme ! Une vraie beauté !

- Crois-tu que ce soit cette elfe avec laquelle on dit qu’il est parti il y plus de seize ans ?

- Tu divagues ! Cette créature merveilleuse n’a rien d’une elfe. C’est une femme, une vraie ! Rien à voir avec les gamines effarouchées qui peuplent ce pays. Elle dégage une sensualité que seules peuvent avoir les femmes qui ont pleinement conscience de leur corps et des plaisirs qu’elles peuvent en tirer. On sent qu’elle a de l’expérience... »

Un coup asséné derrière la tête lui arracha un cri de protestation. Il se retourna pour se trouver face à Terry qui sortait du magasin, furieux.

« Elle a aussi un mari qui n’apprécierait pas de t’entendre parler comme ça, et un fils qui a bien envie de t’en coller une !

- Tu la connais ?

- C’est ma mère, imbécile !

- La Duchesse de Granchester !? Impossible ! Comment cette divine apparition aurait-elle pu engendrer un minable comme toi ? En tout cas, ton père ne doit pas s’embêter au lit. Elle, par contre, je ne sais pas... Le Duc n’est plus de la première jeunesse...

- Un peu de respect quand tu parles de mon père ! S’emporta Terry. Et ôte tout de suite cette expression lubrique de tes yeux en regardant ma mère ! C’est dégoûtant ! Je ne sais pas ce qui me retient de...

- Terry ! Intervint la voix chantante d’Eléonore de Granchester qui les avait rejoint. Cesse de te battre avec tes petits camarades ! »

Les deux adversaires firent face à la Duchesse dont l’expression soucieuse les calma aussitôt. Les sourcils froncés du Mage Albert n’auguraient rien de bon, eux non plus.

« Eléonore a raison, renchérit Albert. L’heure est grave. Candy a été enlevée ! »

Terry crut que son coeur s’arrêtait de battre. Il fixait tour à tour sa mère et le mage, espérant une explication, à défaut d’un démenti. Mais quelque chose lui disait qu’il était vain de croire à une mauvaise plaisanterie. Ce fut un coup violent dans les côtes qui lui rendit sa respiration.

« Qu’est-ce que tu as encore fait Granchester, râlait Anthony. Je suis sûr que c’est de ta faute !

- Je n’ai rien pu faire, se lamenta la Duchesse. Je suis tellement désolée mon chéri ! J’ai invoqué ma douce marraine, la fée Pony, et c’est le Mage Albert qui est arrivé. Il pense que c’est l’oeuvre de la sorcière ! »

Archibald qui les avait rejoint échangea un regard avec son frère. Tous deux pensaient à la même chose : Annie et Patricia étaient-elles en sécurité ? Avant qu’ils aient eu le temps de poser la question, le mage les devança.

« Vous devez aller chercher vos amies, jeunes princes. Je croyais qu’elles seraient en sécurité auprès de Pony et Maria, mais la sorcière ne respecte aucune règle. J’ai peur que la protection magique dont est entouré l’orphelinat de soit pas suffisante. Il ne reste que deux jours avant la pleine lune. Emmenez-les au château de la Reine Elroy et veillez sur elles jusqu’au bal. Des chevaux vous attendent à l’orée du bois. Ils connaissent le chemin.

- Et pour Candy ? Demanda Terry anxieux.

- Il faut tenter de la délivrer, mais la Marlow la retient dans son donjon. Je n’y parviendrai pas seul. »

Un grand silence accueillit cette déclaration. L’antre de la sorcière était un endroit sinistre, cerné par les marécages. Nul n’ignorait le danger qu’il y avait à s’en approcher. Très pâle, Anthony regardait fixement le bout de ses chaussures mais ne faisait pas un geste. Terry confia à Archibald le paquet qu’il tenait et avança d’un pas, la mine résolue.

« Je vous accompagne.

- Terry ! Tenta d’intervenir sa mère. C’est très dangereux... La sorcière...

- Je sais, maman. Mais je crois que le prince Anthony a raison. C’est de ma faute si Candy a été enlevée. J’ai attiré l’attention de la sorcière sur elle. Je savais qu’elle me surveillait à cause de mes prétendues fiançailles avec sa fille. Si je peux l’aider, je dois le faire.

- Je respecte ton choix, mon fils, soupira la Duchesse. Je ferai part de ta décision à ton père.

- Très bien. Trancha Albert. Nous n’avons pas de temps à perdre. Allons-y. »


-----oooOooo-----




Candy revint à elle dans une pièce parfaitement effrayante. Aux nombreuses fioles et bocaux remplis de choses immondes qu’elle préférait ne pas identifier, elle comprit qu’elle se trouvait dans le laboratoire même de la sorcière. Deux cellules étaient aménagées dans le fond. Elle occupait l’une d’elle, tandis que l’autre, dont la porte ouverte la narguait, était vide. Elle secoua les barreaux de la sienne, sans succès. Elle était enfermée. Le bruit attira l’attention des deux femmes penchées sur un chaudron fumant qui se tournèrent vers elle. Elles n’eurent pas besoin de se présenter. Candy savait très bien à qui elle avait à faire : La Sorcière Marlow et sa fille Susanna !

« Tiens, tiens ! Dis la plus âgée. Notre invitée est enfin réveillée, on dirait. Tu vas pouvoir t’amuser, ma Suzie. Montre moi que tu es la digne fille de ta mère. »

La jeune fille blonde jeta un coup d’oeil dans le grimoire posé sur la table et s’avança vers Candy d’un pas hésitant. Une curieuse lumière éclairait le sol sous ses pas, comme si elle portait une lanterne sous sa robe. Intriguée par le phénomène, Candy réalisa un peu tard que la fille marmonnait une incantation en agitant la main. Instinctivement, elle se protégea le visage de son avant-bras. Elle ressentit un picotement sur sa peau, puis plus rien. Elle ouvrit lentement les yeux. La jeune fille la fixait d’un regard hargneux et sa mère poussa une exclamation de dépit.

« Par tous les démons de l’enfer, Suzie ! Tu es vraiment nulle, ou tu le fais exprès ? Couvrir le visage de sa rivale de verrues est un des sorts les plus basiques ! Toutes les sorcières savent faire cela avant d’avoir six ans, et toi tu le rates ?

- Bien sûr que je sais le faire, maman ! Je ne sais pas ce qui s’est passé, on aurait dit que mon sort éclatait avant de la toucher. »

Candy avait éprouvé une impression semblable. Le sort s’était désintégré en heurtant son bras. Elle comprit que quelque chose devait la protéger. Elle ne savait pas ce que c’était mais elle avait moins peur. Elle se redressa et reporta son attention sur les deux femmes.

« Tu espères me faire avaler un pareil mensonge ?

- Essaye toi-même, si tu ne me crois pas, osa rétorquer la malheureuse apprentie.

- C’est toi qui n’as pas encore ton diplôme, ma pauvre fille ! Je t’ai déjà expliqué que tu dois concentrer toute ta rancoeur et tout ton ressentiment sur ta victime. Regarde-la, cette pauvre fille ! C’est ta rivale ! Elle a essayé de te voler ton fiancé ! Ta colère devrait être telle, qu’elle traverserait sa protection, si elle en a une. Recommence ! »

Susanna crispa les lèvres et reprit ses incantations. Mais Candy n’avait pas envie de tenter le diable une nouvelle fois. Elle s’accrocha aux barreaux de sa prison et invectiva les sorcières pour détourner leur attention.

« Pourquoi m’avez-vous enlevée ? Je ne vous connais pas, et je ne vous ai jamais rien fait.

- Tu as voulu me voler mon Terrence, espèce de traînée ! Grogna Susanna.

- Je ne sais pas qui est votre fiancé et je ne connais aucun Terrence !

- Menteuse ! Terrence Granchester ! Le fils du Duc ! Mon Terry ! On vous a vu ensemble l’autre nuit derrière l’écurie des Legrand. C’est à cause de toi qu’il n’est pas venu demander ma main. »

Candy ouvrit de grands yeux au moment où la vérité s’imposa à son esprit. La fille avait dit Terry ? Elle ne connaissait qu’un seul Terry ! Le jeune homme envoyé par Grincheux pour les conduire à LaPorte était le fils du Duc de Granchester ? Soudain tout s’expliquait. Les armoiries sur la portière de la voiture, la présence de la Duchesse qui tenait tant à faire la connaissance de la modeste fille d’écurie qu’elle était...

« Mais je ne l’ai rencontré qu’une fois ! Plaida-t-elle. Et il ne m’a même pas dit qui il était vraiment. Jamais je n’ai voulu vous prendre votre fiancé !

- Pourtant lui s’intéresse à toi ! Plus qu’il ne s’est jamais intéressé à moi ! Je ne te laisserai pas me le voler. Je le veux et je l’aurais ! »

Sur ces mots, Susanna lança un nouveau sort, sans plus de succès que la fois précédente. Folle de rage, elle tapa du pied et sortit en pleurnichant. Quand elles furent seules, la sorcière s’approcha de la cellule et Candy se recroquevilla tout au fond. Les pouvoirs de la Marlow étaient bien supérieurs à ceux de sa fille. Si elle décidait de lui jeter un sort, rien ne prouvait que sa protection serait efficace.

« Tu es une épine dans mon pied depuis ta naissance, siffla la sorcière. D’abord ta mère, qui m’a pris mon Albert, et maintenant toi qui recommence avec celui que ma fille a choisi. C’est de moi et de mon bébé chéri dont Albert aurait dû s’occuper. Mais non ! Il n’avait d’yeux que pour son elfe et toi !

- Ma mère ? Vous connaissez ma mère ?

- Ne joue pas les idiotes ! Comme si tu ne savais pas que le Mage Albert est ton père ! Il a réussi à te protéger jusqu’à maintenant, mais c’est terminé. Il ne reste que deux jours pour voir la prophétie se réaliser et tu es en mon pouvoir ! J’ai gagné !

- Dites-moi qui est ma mère, supplia Candy. Où est-elle ? Pourquoi m’a-t-elle abandonnée ?

- Elle est morte en te mettant au monde ! Tu vois : Tu portes malheur ! »

Abattue par ce qu’elle venait d’apprendre Candy éclata en sanglots. Sa mère était morte. Morte à cause d’elle ! Et son père l’avait abandonnée ! Comme il devait lui en vouloir ! Candy était si désespérée que c’est à peine si elle entendit les battements d’ailes furieux qui résonnèrent à la fenêtre. Un croassement sinistre les suivit et un grand corbeau pénétra dans la pièce. Il se posa sur le sol et s’ébroua comme un chien qui sortait de l’eau. Fasciné, la jeune fille le vit grossir et se transformer. En quelques instants elle se trouva face à son maître, le Baron Legrand. Celui-ci lui accorda à peine un regard et s’inclina devant la sorcière.

« Madame, dit-il humblement. Les jeunes filles ont disparu. Elles ne sont plus à l’orphelinat.

- Vous n’êtes qu’un incapable, Legrand ! Ni vous ni votre imbécile de fils n’avez été capable de me ramener deux gamines !

- Mais je vous ai livré Candy ! Plaida l’homme.

- Monsieur Legrand ! Pourquoi avez-vous fait cela ? Balbutia Candy entre ses larmes.

- Je suis désolé, petite Candy. Tu es une gentille fille, mais je n’avais pas le choix. C’était toi ou mes enfants...

- Disparaissez de ma vue, Legrand, hurla la sorcière. Avant que je ne révèle ce que je sais sur votre femme et vos deux rejetons ! »

Le Baron s’inclina avec respect et sortit à reculons, soucieux de ne pas quitter la sorcière des yeux.

« Vous avez menacé de vous en prendre à sa famille, constata Candy. C’est comme cela que vous étendez votre pouvoir. Les gens ne vous respectent pas, ils vous craignent. Pourquoi êtes-vous aussi méchante ?

- Tout ce que je veux c’est faire payer à Albert ce qu’il m’a fait ! Et en l’empêchant de sauver le royaume, j’aurais atteint mon but. Tu as beau être la promise du Prince Anthony, pour moi tu n’es rien d’autre qu’un appât.

- Le prince Anthony ? S’étonna Candy, détournée un instant de son chagrin. Mais je ne le connais pas...

- Tu es vraiment une gourde, ma pauvre fille. Tu ne savais pas que tu étais destinée à épouser un des princes héritiers pour sauver le royaume de Lakewood ? Si cela c’était fait, j’aurais perdu mes pouvoirs et la paix aurait régné sur le pays pendant des siècles ! Quelle horreur ! Mais cela n’arrivera pas. Parce que quand ton soupirant viendra te délivrer, il tombera lui aussi en mon pouvoir. Tu vois la cellule à côté de la tienne ? Le seul moyen d’ouvrir la porte de ta prison, c’est de fermer celle de la cellule voisine en s‘y bouclant. Donc, que je le détienne lui, ou toi, cela ne changera rien. Il n’y aura pas de happy end et la prophétie ne se réalisera pas. Ma fille épousera le futur duc de Granchester et comme le royaume de Lakewood sera sans héritier, le duché l’envahira et ma Suzie règnera sur les deux pays. Mon bébé le mérite ! »

Sur ces mots, la Sorcière Marlow éclata de rire et abandonna Candy dans sa prison, seule avec les sombres pensées qui tournaient dans sa tête.


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 16:51     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 10




Terry ne s’était jamais considéré comme quelqu’un de particulièrement romantique. Pourtant lorsqu’il vit le grand sourire qui éclaira le visage d’Allistair quand il lui transmit le message de Patricia, il sentit son coeur battre un peu plus vite. Il se surprit à envier l’air niais de son ami en apprenant qu’une douce jeune fille pensait à lui. Aidé du prince, il passa la nuit à explorer tous les cours d’eau, lacs ou étangs qu’il connaissait dans la forêt maudite sans trouver trace de la sirène. Finalement, ils rentrèrent épuisés à la chaumière et s’écroulèrent sur leurs lits. Terry avait l’impression qu’il venait juste de poser la tête sur l’oreiller quand il fut réveillé en sursaut par un cri de rage. Avant qu’il comprenne ce qui lui arrivait, il se retrouva au sol avec un Charmeur fou de colère qui essayait de le rouer de coups. Il se défendit mollement, trop heureux de voir que sa petite ruse avait réussi. D’ailleurs, Allistair, réveillé lui aussi ne tarda pas à intervenir pour maîtriser son cousin trop impulsif.

« Granchester ! Tu n’es qu’une ordure ! Tu as triché !

- Je ne vois pas du tout de quoi tu parles, protesta Terry d’un ton qu’il voulait innocent, mais qui sonnait faux.

- Sale menteur ! Je suis allé à l’écurie hier soir, et tu sais ce que j’ai trouvé ? Des chevaux !

- Je ne vois pas pourquoi cela t’étonne. C’est bien la place des chevaux, non ? Je dis bien, des chevaux, et pas des jeunes filles !

- La moitié de l’écurie était occupée par des chevaux qui portaient la marque des Granchester ! Ose dire que tu n’y es pour rien !

- Tout ce que je voulais, c’était mettre fin au calvaire de Candy, lui permettre de dormir dans une chambre correcte. C’est un être humain, et vos cousins la traitent comme un animal ! Rien ne t’empêchait de faire quelque chose pour y remédier, mais tu étais sans doute trop occupé pour ça ! »

Anthony grommela quelques paroles incompréhensibles, mais finit par se calmer. Terry et lui continuèrent à se jeter des regards noirs, mais n’en vinrent plus aux mains. C’est dans cette atmosphère pesante qu’arriva Archibald, la mine abattue. Allistair qui flottait toujours sur un petit nuage depuis qu’il avait appris que Patricia ne l’oubliait pas, accueillit son frère à bras ouverts.

« C’est incroyable de se retrouver tous les quatre ici, comme avant ! J’ai l’impression que cela fait un siècle ! Je sais pourquoi Terry est là, mais toi et Anthony ? Qu’est-ce qui vous amène ?

- Je suis venu te chercher, mon vieux. La Reine Elroy nous veut tous les trois au palais jusqu’à son bal de samedi.

- Quel bal ? Demanda Allistair qui tombait des nues.

- Tu ne lui as rien dit ? Reprocha Anthony à Terry.

- J’ai oublié, s’excusa Terry. J’avais autre chose en tête, et ton cousin aussi, soit- dit en passant. Tu n’as qu’à lui expliquer toi-même ! »

Anthony mit donc son cousin au courant des projets de la Reine Elroy pour ses petits-fils. La mine déconfite d’Allistair et d’Archibald le fit rire.

« Vous devriez être contents que Grand-mère vous donne un coup de pouce, dégourdis comme vous êtes...

- Je n’ai pas besoin d’aide, grommela Allistair. J’ai trouvé la fille que je veux !

- Moi aussi renchérit Archibald.

- Je n’arrive pas à le croire ! S’exclama Anthony. Vous deux ? Vous avez... Mais où sont ces perles rares ?

- La sorcière est à la recherche de ma Patricia ! Elle a dû se cacher...

- Mon Annie aussi, se lamenta Archie. Le mage l’a emmenée pour la protéger.

- Et vous ne savez pas où elles sont ? »

Les deux frères secouèrent la tête, abattus. Seul Terry jubilait, car il se doutait de l’endroit où le Mage Albert avait emmené la promise d’Archibald. Pourtant il ne dit rien. Anthony se laissa lourdement tomber sur un banc.

« Hé bien ! Je sens que cette histoire de prophétie va tourner au cauchemar ! Ne comptez pas sur moi pour expliquer ça à la reine ! »


-----oooOooo-----




Si Anthony était en rage, Candy, elle, était aux anges. Depuis la veille elle avait l’impression de vivre un conte de fées. Au lieu de la duchesse terrifiante qu’elle s’apprêtait à rencontrer, la jeune fille s’était trouvée face à une femme absolument charmante. Alors qu’elle avait toujours considéré Sarah Legrand comme un modèle de distinction, elle découvrit combien elle était loin de la vérité. La noble Eléonore de Granchester était non seulement belle, mais d’une bonté et d’une gentillesse sans faille. Au bout de quelques heures, elle ne jurait plus que par elle ! Malgré les protestations de Sarah et Elisa Legrand qui proposaient de mettre à la disposition de leur invitée une personne plus qualifiée; la Duchesse avait insisté pour garder la jeune fille près d’elle. Elle fit même installer un lit dans l’antichambre de sa suite pour que Candy ne retourne pas dormir dans le quartier des domestiques.

Si la jeune fille était conquise, elle ne se doutait pas que c’était réciproque. Eléonore avait été très intriguée par l’intérêt de son fils pour une inconnue. La fougue qu’il avait mise à lui expliquer les conditions dans lesquelles vivait Candy, et son insistance à trouver un moyen de lui venir en aide étaient inhabituelles chez le jeune duc. Jamais sa mère ne l’avait vu prendre ainsi fait et cause pour une fille. Avec son rang et son charme, Terry avait l’habitude qu’aucune femme ne lui résiste. Mais il ne leur accordait aucune importance. Grand séducteur, comme son père, il les oubliait aussi vite qu’il les avait rencontrées. Alors, l’attention qu’il portait à Candy était plus que suspecte. La duchesse avait été heureuse d’élaborer ce plan qui consistait à faire héberger leurs chevaux dans l’écurie de sorte qu’il n’y ait plus suffisamment de place pour y loger Candy, et qui lui permettait de faire la connaissance de cette perle rare. Et elle n’était pas déçue. Après avoir vaincu la timidité de la jeune fille, quand celle-ci se laissa aller à raconter sa vie, sa bonté et sa joie de vivre conquirent définitivement Eléonore de Granchester. Rien ne lui aurait fait plus plaisir que de prendre sous son aile la douce Candy et de l’aider à révéler le pur diamant qu’elle devinait sous son apparence modeste. Mais elle savait que c’était impossible. Candy était la protégée du Mage Albert et fort probablement une des trois filles de la prophétie. Son destin était tout tracé et la duchesse maudissait le sort qui faisait de Candy une future princesse de Lakewood et de son fils le futur époux d’une apprentie sorcière.

Terry avait bien insisté auprès de sa mère pour que celle-ci ne dévoile rien de sa véritable identité à Candy, afin de ne pas interférer avec la réalisation de la prophétie. Mais garder le silence était bien difficile pour Eléonore. Elle en était encore à se demander comment obtenir plus d’informations sur les sentiments de Candy envers son fils quand un messager de la reine se fit annoncer au château. Après avoir réunis tous les membres de la maisonnée dans la cour, il lut la proclamation de la reine Elroy qui annonçait que toutes les jeunes filles célibataires qui le désiraient seraient invitées au palais le samedi pour être présentées aux princes héritiers.

Un grand silence se fit dans la cour. Tout le personnel féminin des Legrand échangeait des regards incrédules, n’osant croire à une pareille chance, mais personne de bougea. Le messager s’éclaircit la gorge, surpris.

« Allons Mesdemoiselles ! N’y a-t-il donc aucune fille à marier parmi vous ? Il vous suffit de vous avancer et de me donner votre nom. Je le consignerai dans mon registre et vous distribuerai une invitation. »

Il y eut encore un moment de flottement, puis la petite Dorothée fit timidement un pas en avant. Aussitôt Elisa Legrand l’attrapa violemment par le bras et la tira en arrière.

« Idiote ! Siffla-t-elle. Cette invitation ne s’adresse pas aux bonniches, seulement aux personnes de qualité ! »

Puis elle se tourna vers l’homme penché sur son registre.

« J’irai au palais, déclara Elisa. Donnez moi mon invitation, mon brave.

- Quel est votre nom ? Demanda le secrétaire sans lever les yeux de son gros livre.

- Comment osez-vous...?! Je suis Elisa Legrand et j’appartiens à la famille royale !

- C’est la procédure, Mademoiselle. Vous avez dit L.E.G.R.A.N... Vous l’écrivez avec un D ou avec un T ?

- Avec un D comme Débile, pauvre type ! Cracha Elisa en s’emparant de l’enveloppe qu’on lui tendait.

- L.E.G.R.A.N.D.-avec-un-D-comme-débile... répéta le secrétaire en écrivant sur son registre. C’est noté, ainsi personne ne l’oubliera. »

Furieuse, Elisa tourna les talons dans un grand envol de jupons et rejoignit sa mère. La Duchesse de Granchester avait l’air de beaucoup s’amuser et dissimulait de son mieux son envie de rire derrière sa main gantée. Et soudain ce fut la ruée. Le malheureux messager ne savait plus où donner de la tête tant il y avait de filles à lui donner leur nom et à réclamer leur carton d’invitation. Sarah Legrand et sa fille observaient cette effervescence avec dédain. Quand chacune eut reçu son laissez-passer et que le joyeux tumulte se fut apaisé, le secrétaire rangea sa plume et voulut fermer son registre quand la voix autoritaire d’Eléonore l’interpella.

« Attendez ! Il reste une jeune fille. »

Tous se tournèrent vers la Duchesse qui poussait gentiment Candy par les épaules pour la faire avancer malgré sa réticence.

« Je ne peux pas aller au palais, se lamentait-elle. Je n’ai rien à faire là-bas...

- La Reine Elroy a invité toutes les jeunes filles du royaume. On ne refuse pas une invitation royale, jeune fille ! C’est le comble de l’impolitesse ! Donc vous irez ! Trancha Eléonore.

Candy rougit jusqu’à la racine des cheveux, mais déjà le messager avait rechaussé ses lunettes et attendait, la plume levée au dessus de son recueil.

« Votre nom ? Demanda-t-il.

- Candy Neige, répondit-elle d’une voix à peine audible. »

Pourtant elle n’eut pas besoin de répéter. L’homme nota son nom à la suite des autres et lui remit son carton d’invitation. Candy le serra sur son coeur comme s’il s’agissait d’un précieux trésor. Elle se tourna vers la duchesse, le coeur battant.

« Oh Madame... Je vais aller au Palais ! Je vais voir le prince Anthony ! J’en rêve depuis que je suis toute petite...

- C’est un scandale ! S’exclama Elisa. Cette fille d’écurie n’a rien à faire à ce bal ! Ce serait un déshonneur pour tout le pays !

- Tais-toi, Elisa ! Intervint sa mère d’une voix lasse. On ne discute pas les ordres de la reine.

- Mais maman... Oh tout cela ne serait jamais arrivé si papa était là ! Il n’aurait pas laissé une telle chose se produire, lui ! »

A ces mots, l’air fut agité par un vent chaud et bruissant que rien de laissait présager. Venant de derrière le parc, un vol de corbeaux qui tournoyaient haut dans le ciel quelques instants plus tôt se précipita vers l’assemblée. Ils étaient des dizaines, des centaines peut-être. La panique s’empara de l’assistance. Chacun essayait de se protéger le visage et de trouver en abri. Certains coururent vers la maison, d’autres se jetèrent sur le sol. Seule la Duchesse de Granchester resta immobile, les yeux écarquillés. Elle vit les oiseaux fondre sur Candy. Ils semblaient grandir à chaque instant, atteignant la taille d’un aigle. Ils refermèrent leurs puissantes serres sur la malheureuse Candy qui poussa un cri de terreur. Mais il n’y avait rien à faire contre les oiseaux magiques. Avec de grands battements d’ailes, il soulevèrent la jeune fille et l’emportèrent avec eux. Ses hurlements d’effroi résonnèrent aux oreilles de la Duchesse, impuissante, qui ne put rien faire que de regarder les corbeaux disparaître au loin avec leur proie.

Sur le sol gisait l’invitation que Candy avait lâchée lors de son enlèvement. Eléonore le ramassa d’une main tremblante. Le doute n’était plus permis désormais. Il y avait de la Sorcière derrière tout cela ! Et si la Marlow avait fait enlever Candy, c’est que celle-ci était bien une des trois jeunes filles de la prophétie. La Duchesse sortit de sous son corsage le pendentif qu’elle portait depuis si longtemps comme un talisman. Elle se souvenait des paroles de sa marraine lorsqu’elle le lui avait donné. C’était le jour où Richard Granchester était venu la chercher pour l’épouser et l’emmener dans son château. Ce jour là, la fée Pony lui avait dit :

« Je sais que tu n’en auras pas besoin, mon petit, mais je tiens à te donner ce porte-bonheur. Ma mission auprès de toi est terminée. Tu vas te marier et fonder une famille. Je suis sûre que tu seras très heureuse avec le Duc Richard. Mais si un jour il t’arrivait malheur, à toi ou à ta famille, tu n’auras qu’à presser sur la pierre, au centre de ce bijou. Où que tu sois, je te trouverai. Je serais toujours là pour toi, ne l’oublies jamais. »

Jamais Eléonore n’avait eu autant besoin d’aide qu’aujourd’hui. En priant de tout son coeur, elle serra dans sa main le pendentif si précieux et enfonça la gemme qui se trouvait au milieu. Celle-ci céda légèrement sous la pression et la pierre devint plus chaude, plus brillante...

« Fée Pony, je vous en prie, implora silencieusement Eléonore. Il faut aider cette jeune fille... »


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 16:49     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 9




Peu avant le coucher du soleil, Coquet abandonna ses amis pour aller fermer son magasin. Il renseigna une ou deux clientes, salua son personnel et mit tout le monde à la porte, gentiment, mais avec fermeté. Lorsqu'il revint dans l'arrière-salle, les deux autres se regardaient avec animosité. Ils ne s'étaient jamais beaucoup appréciés, mais cette fois la tension était palpable. Cherchant à désamorcer une situation qu'il sentait explosive, il demanda :

« Vous comptez passer la soirée ici ?

- Non, répondit Terry. J’avais l’intention de me rendre dans la forêt. J’ai un message pour Allistair.

- Peux-tu lui faire part de la décision de la Reine Elroy ? S’enquit Anthony. J’ai d’autres projets pour ce soir.

- Encore un rendez-vous avec une fille ? Insinua Archibald.

- Pas une fille... LA fille. Celle que je conduirai à l’autel dans moins d’une semaine.

- Tu ne la mérite pas ! Siffla Terry entre ses dents. »

Archibald observait ses amis sans comprendre. Visiblement, il avait raté un épisode.

« Je peux savoir de qui vous parlez ?

- NON ! Répondirent les deux autres en même temps.

- Oh, très bien ! Gardez vos secrets tous les deux ! Juste encore une chose. Moi aussi j’ai un message. Vous vous souvenez de la fille que le Mage Albert avait amenée à la cabane ? Candy Neige ?

- Ne te mêle pas de ça ! »

Une nouvelle fois, Terry et Anthony s’étaient exprimés avec un ensemble parfait. Ils se jetèrent un regard assassin et la lumière se fit dans l’esprit d’Archibald.

« C’est de Candy dont vous parliez ! Mais pourquoi elle ?

- Ton cousin est persuadé qu’elle est une des trois filles de la prophétie, expliqua Terry. Et il a aussi décidé qu’elle était pour lui.

- Cela expliquerait pourquoi le Mage veille sur elle d’aussi près, reconnut Archie. Mais elle ne m’a pas parlé de toi, Anthony. C’est Terry qu’elle voulait voir. Elle voulait te remercier pour le service que tu lui as rendu, parait-il.

- Qu’est-ce que tu as manigancé, Granchester, Grogna Anthony. Je te préviens, ne t’approche pas d’elle. Elle n’est pas pour toi !

- Je sais, répondit Terry. Je n’ai pas l’intention d’empêcher la prophétie de se réaliser. J’ai juste donné un coup de main à une amie de Candy, c’est tout. Mais je continue de penser que tu n’es pas digne d’elle.

- Ce n’est qu’une orpheline ! En m’épousant, elle deviendra princesse, et un jour reine quand je monterai sur le trône. Que pourrait-elle demander de plus ?

- Savais-tu que vos charmants cousins, Daniel et Elisa Legrand l’obligent à dormir dans l’écurie avec les chevaux ? Elle est toute seule, loin de la maison, dans les courants d’air... Que comptes-tu faire pour ça ?

- Je vais lui tenir compagnie, la rassurer et lui faire le grand jeu. Elle n’en sera que plus ravie de sortir de là pour devenir ma femme. Ce sera encore plus facile que je ne l’espérais.

- Quand ? Ce soir ? Dans ce cas, je te souhaite bonne chance, affirma Terry avec un sourire en coin. Moi, je pars à la chasse à la sirène. »


-----oooOooo-----




Seul dans son appartement au-dessus du magasin, Archibald songeait à ce qu’il venait d’apprendre. Que Candy soit l’une des trois jeunes filles de la prophétie ne l’étonnait pas vraiment. Après tout, jamais le mage n’avait dit que les élues devaient faire partie de la noblesse. Candy était jolie, douce, gentille... Mais il n’éprouvait rien pour elle !

Pour être franc, il n’éprouvait pas grand chose pour les filles en général. Elles n’avaient pas d’autre attrait à ses yeux que les magnifiques robes qu’elles portaient. Il en aimait la matière, la texture et rêvait de créer la robe parfaite. C’est à cela qu’il travaillait dans son arrière-boutique. La robe qu’il avait imaginée était parfaite. Tellement parfaite, qu’à ses yeux, aucune fille n’était digne de la porter. Contrairement à ce que pensait Anthony, il avait bien observé les clientes de sa boutique. Oh, pas quand elles se déshabillaient, bien sûr. Son oeil exercé lui disait toujours immédiatement qu’elles ne convenaient pas à la perfection de sa création. L’une avait trop de poitrine, l’autre pas assez, certaines avaient les hanches trop larges, d’autres les jambes trop courtes. Bien sûr, il aurait été aisé de faire quelques retouches sur la robe, mais Archibald s’y refusait. Ce n’était pas la robe qu’il fallait adapter à la fille. C’était la fille qui devait convenir à la robe ! Et cette perle rare, il ne l’avait pas trouvée. En réalité, il finissait par se demander si elle existait. Et si elle n’existait pas, autant se rallier à la solution de sa grand-mère !

Car la nouvelle qu’avait apportée son cousin était de taille. La Reine Elroy en avait assez du manque de résultat de ses trois petits-fils. Elle avait donc décidé de prendre les choses en main et d’organiser pour le samedi suivant un grand bal auquel elle avait prévu de convier toutes les filles à marier du pays. L’ultimatum qu’elle posait à ses héritiers était simple : S’ils n’avaient pas trouvé la femme de leurs rêves avant ce fameux samedi, elle les obligerait à choisir une épouse parmi les invitées présentes.

Incapable de dormir, Archibald décida de continuer à peaufiner sa création. Avec un soupir, il songea que si fille parfaite dont il rêvait n’existait pas, peu lui importait d’en épouser une autre. Au moins aurait-il créé la robe parfaite. Et qui sait, la chance pouvait encore lui sourire d’ici samedi.

Il descendit sans bruit l’escalier et ôta le drap qui cachait le mannequin. Il admira une nouvelle fois son oeuvre. La robe se composait d’un fourreau de taffetas bleu aux reflets chatoyants. Le bleu du ciel, le bleu des rêves, le bleu parfait... Pour satisfaire aux canons de la mode, il avait composé une jupe de dessus d’un ton moins soutenu. Un entrelacs de tulle et de dentelle d’une légèreté arachnéenne qui aurait été de plus bel effet lorsque la demoiselle aurait valsé dans l’immense salle de bal du château, entre ses bras. Pour couvrir les épaules, un boléro de soie aux manches ballons était sensé mettre en valeur la taille et souligner le décolleté, juste assez osé pour attirer les regards des messieurs, mais pas assez pour nuire à la réputation de la jeune fille. L’imposant noeud de tulle qui devait se poser sur les hanches et remplacer la tournure lui posait encore des problèmes. Il allait essayer de remédier à ce défaut quand un bruit venant du magasin lui fit dresser l’oreille.

Un voleur s’était-il introduit dans la boutique ? Contrairement à ce que ses manières délicates pouvaient laisser croire, le Prince Archibald n’était pas un lâche. Il n’aimait pas la violence, mais n’était pas homme à reculer devant le danger. Il n’allait pas laisser un voleur s’emparer de ses créations ou pire, les abîmer ! Il ouvrit résolument la porte et enregistra du coin de l’oeil l’ombre qui tentait de se dissimuler entre les étagères. Quelques pas lui suffirent pour atteindre la pauvre cachette. Il attrapa l’intrus par le bras et le tira vers la lumière sans ménagement. Son geste brusque provoqua un cri de douleur qui n’avait rien de masculin et il se trouva face à une jeune fille visiblement apeurée. Elle essayait de se dégager et détournait le visage que dissimulaient ses longs cheveux noirs. Confus, Archibald la lâcha mais ne se laissa pas attendrir en la voyant masser son bras endolori.

« Qui êtes-vous, demanda-t-il d’une voix qu’il tenta de rendre sévère. Que vouliez-vous voler ?

- Je ne suis pas une voleuse ! S’indigna la jeune fille d’une voix mélodieuse. Je n’ai rien pris !

- Que faites vous ici, alors ?

- Je voulais juste regarder... Vous avez les plus jolies robes que j’ai jamais vues. J’aimerais tant pouvoir porter d’aussi belles choses à nouveau...

- C’est moi qui les ai conçues, se rengorgea Archie.

- Je sais, dit-elle en rougissant. »

Interloqué, le jeune prince regarda son intruse avec plus d’attention. Elle portait une simple robe de paysanne qui avait connu des jours meilleurs. Mais elle avait parlé de porter de jolies choses « à nouveau ». Se pouvait-il qu’elle ait été plus fortunée autrefois et que des revers de fortune l’aient obligée à vivre comme une pauvresse ? Peu lui importait après tout. Il était évident qu’elle n’avait rien volé et cela seul importait.

« Ma boutique est ouverte à tout le monde, dit-il d’un ton radouci. Vous devriez revenir aux heures d’ouverture.

- Votre boutique ? Releva la fille.

- Je veux dire, la boutique de mon ami Coquet. Balbutia Archie en se rendant compte de sa gaffe. Si vous cherchez du travail, je pourrais lui en toucher deux mots mais il faut partir maintenant. Venez, je vais vous faire sortir par derrière. »

Il entraîna vers l’arrière-boutique sa visiteuse qui le suivit sans rechigner. Il déverrouilla la porte arrière et allait la prier de s’en aller quand il se rendit compte qu’elle était arrêtée, en admiration devant la robe bleue.

« Seigneur ! S’exclama-t-elle. C’est une véritable merveille ! C’est de la dentelle de France, n’est-ce pas ? Il n’y a que là qu’on en trouve d’une telle finesse.

- Vous avez l’air de vous y connaître, remarqua le Prince, flatté.

- J’adore la dentelle ! Mais ma mère ne m’a jamais laissé en porter. Elle dit que ce n’est pas... convenable ! C’est vous qui avez fait cette robe ?

- Oui, mais elle n’est pas terminée. Je ne suis pas encore satisfait du drapé sur les hanches...

- Vous devriez essayer un point de chausson, observa la jeune fille. Cela donnerai plus de liberté au tissu. »

Fasciné, Archibald referma la porte qu’il venait d’ouvrir. C’était la première fois qu’il rencontrait une fille capable de faire une suggestion intelligente sur la manière d’assembler un vêtement. Jusqu’à présent, toutes celles qu’il avait connues se contentait de se laisser vêtir et de récriminer quand elles n’étaient pas satisfaites. Mais celle-ci... Il la questionna encore, et elle répondit, toute peur oubliée. Bientôt ils furent tous deux armés d’aiguilles et de fil de soie pour retoucher la robe. Ils discutèrent longtemps en travaillant. Quand ils eurent terminés, ils s’assirent côte à côte pour admirer le résultat de leurs efforts. Cette fois, la robe était parfaite ! Le Prince observa les yeux brillants de la jeune fille et remarqua pour la première fois qu’ils étaient bleus. Du même bleu que la robe ! Pris d’une inspiration subite, il se leva et arracha la robe de son mannequin.

« Enfilez-la ! Dit-il en la lui tendant.

- Je vous demande pardon ?

- Passez-la. Insista Archie. Les robes sont faites pour habiller des personnes, pas des mannequins.

- Mais je n’ai même pas de... chaussures ! Protesta la jeune fille en rougissant. »

Le prince se rendit compte qu’elle était pieds nus et sourit.

« Changez-vous pendant que je vais vous chercher des escarpins de bal. »

Il se précipita dans la boutique où il ne lui fallut pas longtemps pour trouver ce qu’il cherchait. Elle avait de petits pieds, songea-t-il. De très jolis petits pieds, d’ailleurs... Ayant trouvé son bonheur, il fit demi-tour juste à temps pour voir sa visiteuse faire glisser le tissu précieux sur son corps parfaitement nu.

« Laissez-moi vous aider, murmura-t-il le coeur battant. »

Il s’approcha derrière elle et entreprit de fermer les crochets et boutons de la robe, non sans mal tant ses doigts tremblaient. Il était si près d’elle qu’il sentait la chaleur de son corps à travers leurs vêtements. Pour la première fois de sa vie, il avait envie de refermer ses bras autour d’elle, de la serrer contre lui. Troublée elle aussi, elle se tourna vers lui en rougissant. Il s’agenouilla pour lui passer les chaussures. Ses doigts s’attardèrent sur la cheville, remontèrent le long du mollet joliment galbé. Il leva les yeux et contempla la métamorphose de celle qu’il avait pris pour une voleuse. La robe lui allait parfaitement, à croire qu’elle avait été faite pour elle. Il la fit asseoir et des ses mains habiles, releva ses longs cheveux noirs en un chignon souple qui dégageait sa nuque gracile. La peau de son cou était chaude et douce. Il mourrait d’envie d’y poser ses lèvres quand elle se releva pour lui faire face. Fasciné, il ne pouvait détacher les yeux de sa poitrine ronde qui se soulevait au rythme accéléré de sa respiration. Elle semblait aussi troublée que lui. Il ouvrit la bouche pour parler mais avant qu’il puisse trouver ses mots, le chant du coq s’éleva dans un jardin voisin. Le jour se levait !

« Allez-vous en ! Supplia le jeune homme, courbé en deux par l’habituelle crispation au creux de l’estomac qui annonçait sa prochaine transformation. »

Puis il se rua dans l’escalier qui menait à l’étage. Il eut tout juste le temps de refermer la porte de son appartement avant de retrouver son apparence de nain. Les poings serrés de rage, il se débarrassa de ses vêtements devenus trop grands pour rendosser sa défroque de nain. La tête entre les mains, il aurait pu crier de rage. Il ne voulait pas que cette fille fabuleuse le voie comme cela ! Il allait rester là et attendre qu’elle s’en aille. Quand ses employés arriveraient, il descendrait et la journée se déroulerait normalement. Mais il savait qu’il se mentait. Plus rien ne serait pareil désormais. Il avait trouvé la femme parfaite, et il ne savait même pas son nom. Le reverrait-il seulement un jour ? Ce fut un faible appel qui le sortit de sa torpeur.

« Au secours ! Aidez-moi, je vous en prie ! »

C’était la voix de la jeune fille, mais elle semblait haletante, essoufflée. Il ne pouvait pas l’abandonner. Prêt à inventer un mensonge pour expliquer la disparition du beau jeune homme qu’elle s’attendait à voir, il redescendit au rez-de-chaussée. Il trouva la jeune fille dans la pièce où il l’avait laissée. Elle était étendue sur le sol et portait toujours la robe. Pourtant elle semblait respirer avec difficulté.

« Que vous arrive-t-il ? Demanda Archie, inquiet. Etes-vous malade ?

- De l’eau ! Râla la pauvre fille. Il me faut de l’eau ! »

Il se hâta de lui apporter un verre d’eau, mais sa tentative n’obtint qu’une exclamation de dépit de la part de la malheureuse. De ses mains fébriles, elle s’escrimait sur les fermetures de sa robe. Voyant qu’elle était sur le point de tout déchirer, il voulut l’aider à se mettre debout, mais elle retomba lourdement sur le sol. Ses jambes s’agitaient de manière bizarre.

« Je ne supporte pas ces vêtements sur ma peau, hoqueta la fille. Je vais... étouffer... »

Elle se tordait sur le sol au risque de ruiner définitivement la splendide robe qu’elle avait aidé à créer. Un craquement sinistre annonça que le tissu venait de lâcher. En toute autre circonstance, Archibald serait devenu fou de rage, mais le spectacle qui s’offrait à ses yeux lui ôta toute envie de crier. La jolie fille qui l’avait tant troublé avait disparu. Enfin pas complètement, mais à partir de la taille, c’était un corps de poisson que le tissu dévoilait. Une sirène ! Il avait craqué pour une sirène ! Son regard remonta de la nageoire caudale frétillante sur les écailles bleutées, puis sur le buste de la jeune fille. Elle tentait maladroitement de dissimuler ses seins avec ses mains et semblait de plus en plus mal en point.

« Je vous en prie... Archie... Ramenez-moi... à la rivière... Sinon... je vais mourir... »

Le jeune homme comprit enfin son insistance à réclamer de l’eau. Elle n’avait pas soif. Elle avait BESOIN d’eau. Les sirènes ne peuvent pas vivre hors de l’eau. Il devait trouver un moyen de lui faire regagner la rivière, mais comment ? Sous son apparence de nain, elle était trop grande pour qu’il puisse la porter jusque là. Il devait trouver une autre solution. Sans réfléchir plus avant au fait qu’elle l’ait appelé par son vrai nom, il se précipita dans le jardinet qui jouxtait sa maison. Alors qu’il cherchait désespérément une idée, la solution lui apparut, appuyée contre le mur : Une brouette !

C’est une sirène inconsciente qu’il réussit à hisser dans l’engin qu’il avait poussé dans la maison. Aussi vite qu’il le put, il fit ensuite plusieurs voyages au puits pour remplir la brouette d’eau, mais la pauvre sirène ne reprenait pas connaissance. Comme il versait un dernier seau, elle battit enfin des paupières et poussa un profond soupir. Exténué, Archibald laissa tomber son seau et s’assit sur le sol. Sans la queue de poisson qui dépassait d’un côté de la brouette, il aurait pu croire que c’était bien une fille qu’il avait devant lui. Elle respirait de mieux en mieux, et maintenant qu’il était rassuré sur son sort, il ne pouvait détacher les yeux de sa poitrine ronde et ferme qui dansait à la surface de l’eau. En rougissant, elle détacha ses cheveux dont les longues mèches brunes vinrent dissimuler les pointes de ses seins ravissants.

« Vous m’avez sauvé la vie, murmura-t-elle. Merci Archie.

- Je ne pouvais pas vous laisser mourir. Mais comment savez-vous mon nom ?

- Je vous connais, avoua la sirène en baissant les yeux. Je vivais dans la rivière près de votre cabane. Quand vous êtes parti, j’ai remonté le cours d’eau jusqu’ici pour vous suivre.

- Mais je ne vous ai jamais vue !

- Je me cachais. J’avais trop peur d’être découverte.

- Me direz-vous qui vous êtes et ce qui vous est arrivé ?

- Je m’appelle Annie, expliqua la sirène. Je suis la fille du comte de Brighton. Mon père a refusé d’obéir à la sorcière Marlow, alors...

- Elle vous a transformée en sirène !

- Ce n’est pas elle, soupira Annie. C’est sa fille ! Elle est son apprentie, mais elle ne maîtrise pas bien ses pouvoirs. Du coup, au lieu de me transformer en truite, comme elle en avait l’intention, je me suis retrouvée comme ça ! Je me suis sauvée du domaine de mon père pour me dissimuler dans la forêt maudite. Si j’étais restée, la sorcière aurait pu se servir de moi pour lui faire du mal. Je sais que la sorcière veut me retrouver. Elle a lancé quelqu’un sur mes traces. C’est pour cela que j’ai quitté la forêt. En plus, depuis quelques temps je retrouve ma forme humaine quand le soleil se couche. Je sais que j’ai pris un gros risque en venant chez vous, mais j’en avais assez de voler des vêtements de paysanne pour m’habiller. J’avais tellement envie de porter de jolies robes...

- Je suis heureux que vous l’ayez fait, Annie, avoua sincèrement Archie. Sinon, je ne vous aurais pas rencontrée. Qu’allez vous faire maintenant.

- Je dois regagner la rivière, et trouver un autre endroit où me cacher.

- J’aimerai que vous restiez...

- J’aimerai aussi, mais je ne peux pas.

- Alors je vous aiderai. Après tout, qui s’étonnera de voir un nain pousser une brouette ? Mais nous devrons faire vite avant qu‘il n‘y ait trop de monde dans les rues. »

La mort dans l’âme à l’idée de se séparer de la douce Annie, le prince ouvrit la porte de derrière et jeta un regard prudent aux alentours. Personne ne semblait encore être debout. Avec précaution, il prit les poignées de la brouette et sortit dans le jardin. Le trajet jusqu’à la rivière n’était pas très long, mais il valait mieux ne pas traîner. Alors qu’il poussait précautionneusement son fardeau, le cri d’un corbeau résonna dans le ciel teinté de rose. Soudain une haute silhouette se dressa devant eux. Annie poussa un cri de frayeur, mais Archie avait reconnu leur visiteur.

« Mage Albert ! Vous tombez bien. Nous avons besoin de votre aide.

- A ce que je vois, vous vous en sortez très bien, mon jeune ami.

- Il faut protéger Annie, insista le nain imperméable à l’humour du mage. La sorcière est à sa recherche.

- C’est aussi ce que j’ai entendu dire. Ne vous inquiétez pas. Je connais la cachette idéale. Vous y retrouverez d’ailleurs une de vos amies.

- Quelle amie ? Demanda Annie, méfiante.

- Cette chère Patricia, bien sûr ! Maintenant, si vous me permettez... »

Sur ces mots, le mage se pencha et prit la sirène dans ses bras sous le regard envieux d’Archibald.

« Attendez ! S’exclama-t-il. Où l’emmenez-vous ? »

Mais le mage ne répondit pas et disparut dans un nuage de fumée blanche en emportant son délicat fardeau.


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 16:47     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 8




Le drame du Prince Anthony était de vivre dans un pays peuplé de jolies filles. Et le Prince Anthony était incapable de résister à une jolie fille ! Et comme aucune fille ne résistait au charme du Prince Anthony, les nuits de celui-ci étaient bien remplies car à ses yeux, chaque nouvelle fille rencontrée était plus jolie que la précédente. Voilà pourquoi, alors qu'il avait décidé depuis plusieurs jours de rendre visite à Candy, il n'en avait pas encore eu le temps.

Il y avait d'abord eu toutes les jolies soubrettes des Legrand qu'il avait interrogées pour obtenir des renseignements sur Candy. Malgré toutes les consignes de discrétions, le bruit s'était répandu que les jeunes princes se cherchaient une épouse. De la noble jeune fille à la plus humble paysanne, toutes rêvaient d'être l'heureuse élue qui comblerait le prince héritier et elles étaient prêtes à tout pour cela. Après tout, les désirs du Prince Anthony n'étaient-ils pas des ordres ? Et les désirs du Prince Anthony n'étaient plus un secret pour les jeunes filles du royaume depuis bien longtemps. Ils se résumaient à fourrager dans leurs corsages et sous leurs jupes, pour finalement les culbuter dans la meule de foin la plus proche. Mais qui aurait dit non à une nuit de plaisir dans les bras du prince héritier ?

C'était aussi ce que pensait Anthony en songeant à la petite Dorothée, qui lui avait si généreusement ouvert les bras et lui avait enfin fourni l'information qu'il attendait : où trouver Candy. Le jeune homme avait eu du mal à croire à sa chance. Imaginer la jolie blonde seule toute la nuit dans un lieu aussi isolé lui ouvrait des perspectives des plus alléchantes. Mais quand il s'était rendu à l'écurie cette nuit-là, il n'avait trouvé personne. Pas âme qui vive, hormis les chevaux. Il avait attendu le retour de l'occupante pendant quelques temps mais la patience n'avait jamais été son fort. Pour ajouter à son mécontentement, la Reine Elroy l’avait convoqué au château. Anthony se demandait la raison de cet ordre. Le seul moyen d’éclaircir ce mystère était de rendre visite à sa grand-mère. De plus, il se souvint de la nouvelle demoiselle de compagnie qu’il avait aperçue dans l’entourage de la reine et dont la chambre ne se trouvait pas bien loin de la sienne. Si les yeux de la jeune femme tenaient leurs promesses, sa nuit ne serait peut-être pas perdue, finalement. Lassé d’attendre, il se rendit donc au château pour savoir ce que la Reine avait en tête. Il pourrait toujours revenir le lendemain


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Candy fut tirée du sommeil à l’aube par l’agitation des chevaux. Elle se frotta les yeux et sortit du lit. Elle s’était endormie comme une masse dès que le Mage Albert l’avait ramenée, mais aujourd’hui, elle se sentait terriblement confuse de la manière dont elle avait abandonné ses compagnons la veille. A peine avait-elle eu le temps de dire au revoir à son amie Patricia. Quant au jeune homme envoyé par Grincheux, elle n’avait même pas eu l’occasion de le remercier de son aide. Et le nain ? Pourquoi n’était-il pas venu avec eux ? A lui aussi elle devait exprimer sa reconnaissance. Elle nettoya les boxes, nourrit les bêtes et dès que ses tâches furent expédiées, prit la direction de la ville pour tenter de retrouver Terry ou Grincheux.

Hélas, la troupe de comédiens avait plié bagages. Les passants interrogés lui apprirent que les comédiens avaient levé le camp à l’aube, en route vers d’autres villages pour présenter leur spectacle. Personne ne put lui fournir le moindre renseignement sur un nain qui voyagerait avec eux ou sur un jeune homme du nom de Terry. Découragée, elle se promena un peu dans les rues commerçantes laissant son regard errer sur les échoppes multicolores. Sur la grand-place, son attention fut attirée par une impressionnante file d’attelages devant une nouvelle boutique qu’elle n’avait jamais vue auparavant et que son enseigne fraîchement peinte présentait comme « La maison des princesses ». Un coup d’oeil par la vitrine lui permit de constater que la boutique était pleine de jeunes filles de toutes conditions qui s’extasiaient devant les nombreux articles proposés. Et au milieu d’elles, s’agitant comme une abeille au milieu de cette ruche bourdonnante, une petite silhouette qui amena un sourire sur son visage.


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Tout comme son frère, le Prince Archibald avait eu l’idée de mettre à profit ses compétences pour se trouver la femme parfaite. Il n’y connaissait rien en mécanique, mais la mode n’avait pas de secret pour lui. Avec l’aide de la Reine Elroy décidée à accorder à ses petits-fils tout ce qu’ils voudraient pour réussir leur mission, il avait ouvert cette boutique en plein centre ville. Il y vendait tout ce qui pouvait faire le bonheur des jeune filles, des simples colifichets aux robes les plus magnifiques, persuadé que la femme qui lui était destinée ne pourrait faire autrement que de s’y rendre et qu’il la reconnaîtrait au premier coup d’oeil. Décidé à ne rien laisser au hasard, il proposait des articles à tous les prix, afin d’attirer aussi bien les jeunes filles nobles que celles des classes plus modestes. Hélas, jusqu’à présent, le hasard ne lui avait pas souri. Aucune de celles qui avaient pénétré dans son magasin n’avait fait battre son coeur, et il commençait à désespérer. Le sourire de Candy qu’il aperçut dans la rue lui mit un peu de baume au coeur. Abandonnant ses clientes entre les mains de ses employées, il sortit la saluer.

« Monsieur Coquet ! Si je m’attendais à vous trouver ici ! Vous avez quitté la forêt vous aussi ?

- Comme vous voyez, Candy. Le retour du Mage Albert m’a incité à sortir de ma réserve. Mais pourquoi dites vous : Moi aussi ?

- Heu... balbutia Candy qui ne voulait pas en dire trop. J’ai appris que votre ami Grincheux était parti avec une troupe de comédiens ambulants...

- C’est vrai. Ils étaient même ici encore hier soir. J’avoue que je ne suis pas très bon comédien. J’ai préféré ouvrir cette boutique.

- Elle est à vous ?

- Bien sûr ! Venez, je vais vous faire visiter...

- Oh non ! S’exclama Candy. Je n’oserai jamais rentrer dans une aussi jolie boutique. »

Sans tenir compte de ses protestations, Coquet l’entraîna à l’intérieur. La jeune fille se sentait mal à l’aise parmi toutes ces clientes aisées qui la toisaient de haut. Mais le nain n’y prêtait aucune attention. Avec fierté, il lui fit les honneurs de son magasin, heureux de voir ses grands yeux s’illuminer devant toutes des jolies choses qu’il proposait. Elle tomba en admiration devant une merveilleuse robe de bal d’un vert très tendre. Du bout des doigts elle effleura le tissu de la jupe. Jamais elle n’avait rien touché d’aussi doux.

« C’est de la soie qui vient directement de Chine. Expliqua Coquet avec fierté. La plus fine qu’on puisse trouver.

- Elle est magnifique ! Approuva Candy. »

Elle recula d’un pas pour mieux admirer la robe et heurta une autre cliente qui se retourna avec une exclamation de colère. Quand leurs yeux se rencontrèrent, la colère de l’autre femme se transforma en mépris.

« Candy ! Siffla Elisa Legrand. Depuis quand laisse-t-on les pauvresses comme toi entrer dans les même magasins que les dames de qualité ! J’espère que tu n’as rien touché. Tu vas déchirer les tissus avec tes mains calleuses »

La pauvre Candy aurait voulu rentrer sous terre. Elle tenta de dissimuler ses mains abîmées dans les plis de son tablier et commençait déjà à battre en retraite quand Coquet s’interposa.

« Mademoiselle Legrand ! Toutes les femmes sont les bienvenues dans ma boutique. Le fait que vous soyez une bonne cliente ne vous autorise pas à...

- Je suis votre MEILLEURE cliente, corrigea Elisa. Mais cela risque de ne pas durer si je suis obligée de côtoyer ce genre de... fille d’écurie !

- Vous cherchiez un parfum de crois. »

Le nain tentait de détourner la conversation et fit mine d’entraîner Elisa vers le rayon des parfums. Mais celle-ci résista et se mit à humer l’air autour d’elle en fronçant son nez pointu.

« Non merci, persifla-t-elle. J’imagine ce que vous avez à me proposer. Crottin n°5, il me semble... Vous pouvez le garder pour cette bonniche ! »

Elle sortit le menton bien pointé devant elle et grimpa dans sa calèche puis fit signe au cocher de la ramener chez elle.

Rouge comme une pivoine, Candy jeta un regard désolé au nain qui ne semblait pas du tout contrarié.

« Je suis navrée, murmura-t-elle. Je vous ai fait perdre une cliente.

- Ne vous inquiétez pas pour cela, Candy, répondit Coquet en souriant. Elle reviendra. Nulle part ailleurs elle ne trouvera des tenues et des accessoires aussi précieux que chez moi. Et cette pimbêche est prête à tout pour avoir la robe la plus originale et la plus chère du royaume. De toute façon, je n’ai pas besoin de sa clientèle. Regardez autour de vous. »

En effet, les vendeuses avaient repris leur travail et s’affairaient autour de clientes qui continuaient leurs emplettes comme si de rien n’était. L’éclat d’Elisa Legrand était déjà oublié, emporté par la fièvre acheteuse. Mais Candy ne se sentait quand même pas à son aise.

« Je suis heureuse de vous avoir revu, Monsieur Coquet et je suis contente que votre magasin soit un succès. Mais je doit rentrer maintenant.

- Mais vous ne m’avez même pas dit pourquoi vous étiez en ville.

- J’étais à la recherche de Monsieur Grincheux. Il m’a rendu un service et je voulais le remercier, mais je crains de l’avoir manqué.

- Quel genre de service ? Demanda le nain, curieux.

- Un service, c’est tout, éluda la jeune fille. Si vous le voyez, dites-lui que je lui suis très reconnaissante. Vous voulez bien ? »

Coquet hocha la tête en signe d’assentiment et la regarda s’éloigner d’un pas rapide. Intrigué, il laissa son personnel s’occuper de ses clientes et rejoignit son arrière boutique. Il sursauta en découvrant son cousin Anthony dans la pièce. Celui-ci tournait autour d’un mannequin de bois sur lequel était exposé une robe à laquelle Archibald travaillait. Il émit un sifflement admiratif devant la finesse du travail.

« Hé bien, cher cousin. Je ne te connaissais pas ce talent. On peut savoir à qui est destinée cette merveille ?

- Cela ne te regarde pas, répondit l’autre en couvrant son travail d’un drap.

- Mauvaise journée, on dirait. Constata Anthony. Comment peux-tu être aussi maussade alors que tu vis dans un petit paradis ! Tu es toute la journée entouré de filles qui passent leur temps à se déshabiller dans ta boutique ! »

A cet instant un choc sourd retentit de l’autre côté de la cloison qui le fit sursauter.

« C’était quoi ? Demanda Anthony.

- Une cliente a dû laisser tomber quelque chose. Les cabines d’essayage sont juste à côté...

- Tu veux dire que les cabines d’essayage sont de l’autre côté de cette cloison ? Demanda Charmeur les yeux brillants. Mon pauvre Archie, tu me désespères ! Imagines-tu seulement toutes les possibilités qui s’offrent à toi ? Toutes ces filles ne nous voient que comme des nains, pas comme des hommes. A leurs yeux, nous ne sommes pas dangereux. Tu pourrais les suivre dans la cabine, les aider à s’habiller, les toucher, les...

- Tu es vraiment un malade ! Soupira Archibald en secouant la tête.

- C’est toi qui n’est pas normal, mon pauvre vieux ! Par pitié, dis moi que tu as un vilebrequin.

- Pour quoi faire ?

- Mais des trous dans cette paroi, bien sûr ! Le spectacle de ces demoiselles en petite tenue ne te tente pas ? Tu es irrécupérable !

- J’en connais un autre, dit Grincheux en pénétrant à son tour dans l’arrière boutique. »

Les deux autres se tournèrent vers lui comme un seul homme. Archibald semblait de plus en plus contrarié, et son cousin tout autant.

« Ma parole, on rentre chez moi comme dans un moulin, protesta Archie.

- C’est une boutique, fit remarquer Terry. Tu n’aurais pas de clients si tu fermais la porte.

- Un boutique pour dames ! Corrigea le propriétaire vexé. Ce que vous n’êtes ni l’un ni l’autre ! Alors videz votre sac et déguerpissez tous les deux.

- Et toi, Terry, demanda Anthony. Je supposes que tu n’as pas de vilebrequin ?

- Est-ce que j’ai l’air d’un menuisier ? Tu veux en faire quoi ,

- Il veut percer des trous dans les murs des cabines d’essayage pour reluquer les filles qui s’y changent, expliqua Archibald.

- Incroyable ! Quand je pense que c’est ce type qui est sensé monter sur le trône ! Je vous vois mal barrés !

- La ferme, Grincheux ! Grommela le prince Anthony, vexé. Pourquoi n’es-tu pas dans ton duché ?

- J’avais quelque chose à demander à ton cousin, espèce d’obsédé !

- Ça suffit ! S’emporta Archibald. J’en ai plus qu’assez de vous entendre vous chamailler. Je me suis déjà accroché avec Elisa Legrand tout à l’heure. Ma journée est assez gâchée comme ça. Dites-moi ce que vous voulez.

- Elisa Legrand ? Interrogea Terry. Justement, je suis venu pour que tu m’en dises un peu plus au sujet des Legrand...

- Et moi, compléta Anthony, je suis venu te transmettre un message de la part de la Reine Elroy qui ne va pas améliorer ton humeur. »

Très intrigués par les nouvelles que chacun apportait, les nains oublièrent leur querelle et prirent place à table pour échanger leurs informations.


-----oooOooo-----




Loin de se douter de se qui passait dans l’arrière boutique de son ami Coquet, Candy regagnait le manoir des Legrand en toute hâte. Son entrevue avec Elisa la préoccupait. Elle savait la jeune fille rancunière et redoutait une nouvelle méchanceté de sa part. Elle décida de rejoindre discrètement l’écurie sans se faire remarquer, mais tomba en plein chambardement lorsqu’elle arriva.

Toute la domesticité des Legrand semblait s’être donné rendez-vous à l’écurie, et tout ce petit monde s’agitait en tous sens dans un ballet bien ordonné. De solides laquais à la livrée noire comme la nuit que Candy n’avait jamais vus poussaient un somptueux carrosse dans la grange toute proche, tandis que deux autres maintenaient six magnifique chevaux à la robe de jais. Au milieu de tout ce charivari, Dorothée, la petite bonne d’Elisa, s’aperçut de sa présence.

« Candy ! S’exclama-t-elle. Enfin te voilà.

- Mais que ce passe-t-il ici ? Demanda Candy. »

Elle vit soudain deux valets qui transportaient le coffre dans lequel elle rangeait ses maigres possessions.

« Hé ! Mais ce sont mes affaires ! Où les emmènent-ils ?

- Ils les déménagent. On a besoin de toute la place dans l’écurie pour les chevaux.

- Mais où vais-je dormir, s’affola Candy.

- Ne t’inquiète pas, la rassura Dorothée. Il s’est passé une chose extraordinaire ! Figure-toi qu’une grande dame a eu un accident juste devant le domaine. Son carrosse a perdu une roue, ou quelque chose comme ça, alors qu'elle se rendait en visite auprès de la reine Elroy. Elle ne pouvait pas continuer sa route et Madame Legrand a été bien obligée de lui offrir l’hospitalité le temps que sa voiture soit réparée. Ses chevaux seront installés dans l’écurie, mais il n’y aura plus de place pour toi. Tu reviens dormir dans la maison ! Tu n’es pas contente ?

- Si, bien sûr. Mais qui est cette dame ?

- C’est là que ça devient extraordinaire, triompha Dorothée avec un grand sourire. C’est la Duchesse de Granchester ! Et elle a demandé à ce que tu sois mise à son service le temps qu’elle restera ici ! »


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 16:45     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 7




Candy attendit le retour de son ami tout l’après-midi. Hélas, il ne donna pas signe de vie ! Lorsque le soleil se coucha et que Patricia reprit son apparence humaine, elle était morte d’inquiétude. Elle ne cessait de se lamenter qu’elle allait être découverte, que le nain ne pouvait rien faire pour l’aider, qu’il l’avait trahie peut-être...

Candy prenait la défense de son ami. Elle essaya de rassurer la jeune fille, lui garantit qu’on pouvait faire confiance à Grincheux, mais rien n’y fit. Patricia lui jetait parfois des regards lourds de sous-entendus, comme si elle s’apprêtait à révéler quelque chose, puis finalement secouait la tête et se taisait.

L’une et l’autre ayant épuisé tous leurs arguments, elles se tenaient maintenant silencieuses sur le lit de Candy, guettant le moindre bruit. Elles sursautèrent en même temps quand une poignée de petits cailloux fut jetée sur la vitre de l’unique fenêtre.

« C’est lui ! S’exclama Candy qui se leva d’un bond. Je savais qu’il nous aiderait.

- Non, Candy, n’y va pas ! La retint Patricia. Cela ne peut pas être lui, pas à cette heure ci...

- Que veux-tu dire ? »

Patricia se mordit la lèvre et ne répondit pas.

« Reste ici si tu as peur, reprit Candy. Je vais aller voir, mais je suis sûre qu’il n’y a rien à craindre. Attends-moi là. Je n’en ai pas pour longtemps. »

Elle sortit dans la nuit sans plus attendre. Tout était silencieux pendant qu’elle contournait le bâtiment. Elle scruta l’obscurité mais ne distingua aucune trace de Grincheux.

« Monsieur Grincheux ? Chuchota-t-elle finalement. Est-ce que c’est vous ? »

Personne ne lui répondit, mais une silhouette sortit de l’ombre. Candy comprit immédiatement que l’homme qui s’avançait vers elle ne pouvait être son ami le nain. L’inconnu était bien trop grand et avançait vers elle d’une démarche souple et assurée. Elle porta les mains à sa bouche pour étouffer un cri et commença à reculer sans pouvoir quitter l’homme des yeux.

Voyant qu’elle était effrayée, Terry continua d’avancer, mais plus lentement, son orgueil mis à mal par la réaction de la jeune fille. L’idée d’utiliser l’automobile de l’ange gardien aimablement préposé à sa garde par ses parents lui était venue très rapidement. Mais s’il voulait garder le secret, il n’avait d’autre choix que de conduire lui-même les deux filles à La Porte. Or les petites jambes de Grincheux lui interdisaient de conduire une voiture automobile, et il n’avait pas d’autre solution que d’attendre d’avoir retrouvé sa taille normale. De plus, l’idée de se présenter à Candy sous sa véritable apparence le séduisait. Même si elle n’était pas pour lui, il avait besoin de savoir comment elle réagirait en découvrant le vrai Terrence. Si celui-ci aurait pu lui plaire... Et bien il était fixé ! Il avait vu de nombreuses filles le regarder avec admiration, avec envie, et parfois même avec concupiscence, mais jamais avec autant de méfiance ! Un peu blessé, il tendit la main vers elle.

« Attendez Candy ! N’ayez pas peur.

- Je n’ai pas peur. Affirma-t-elle bravement, mais son petit menton tremblant disait le contraire. Et comment connaissez-vous mon nom ?

- Nous avons un ami commun, Candy. C’est Grincheux qui m’a parlé de vous et qui m’a dit où vous trouver.

- Monsieur Grincheux ! Où est-il ? »

Elle se dressait sur la pointe des pieds et scrutait l’obscurité pour essayer de distinguer son ami, sans succès.

« Il n’a pas pu venir, malheureusement. Expliqua Terry. Mais il m’a demandé de vous aider. Je suis venu pour vous emmener à La Porte, vous et votre amie.

- Mais... Comment ?

- Je dispose d’une automobile. Je l’ai laissée un peu plus loin pour que le bruit du moteur n’attire pas l’attention.

- Je ne vous connais pas. Pourquoi devrais-je vous faire confiance ?

- Moi je lui fais confiance. Dit la voix de Patricia qui sortait de l’écurie. »

Candy et Terry se tournèrent vers elle d’un même mouvement. Le jeune homme la découvrait pour la première fois. Il nota son visage un peu rond qui exprimait l’anxiété. Mais ce qui le frappa ce furent ses immenses yeux noisette pleins de douceur. Un homme pourrait tomber amoureux de ces yeux-là et il se demanda lequel de ses amis pourrait craquer pour elle. Candy avait mentionné Allistair cet après-midi. Oui, cette douce jeune fille aurait été une compagne idéale pour Allistair. Suffisamment effacée pour ne pas faire de l’ombre à son génie mécanique, et suffisamment forte pour tempérer par son calme l’impétuosité de l’inventeur. Il sourit malgré lui en imaginant le couple qu’ils formeraient.

« Patricia, tu aurais dû rester cachée, protestait Candy. Nous ne savons pas qui a envoyé cet homme. Il pourrait...

- Il te l’a dit, intervint Patricia. Il est là à la demande de ton ami Grincheux. Tu as réussi à me persuader de la sincérité de ce nain. Donc je fais confiance à son ami. De toute façon, nous n’avons pas vraiment le choix. »

Terry s’inclina galamment devant la jeune Patricia et lui baisa la main, non sans jeter un coup d’oeil en coin à Candy pour voir sa réaction.

« Mon nom est Terry, gente demoiselle. Je vous promets que vous êtes parfaitement en sécurité avec moi.

- Bon, d’accord. Céda Candy avec un soupir. Suis-le. Mais je vous préviens, reprit-elle en se tournant vers le jeune homme, s’il arrive quoi que ce soit à Patricia...

- Il ne lui arrivera rien, et vous pourrez vous en rendre compte par vous-même puisque vous venez avec nous.

- Partir avec vous ! Mais je ne peux pas quitter le manoir des Legrand !

- Allons Candy, fit valoir Patricia. Tu n’as pas le choix. Je ne peux pas débarquer chez ces deux dames alors qu’elles ne me connaissent pas. Il faut que tu leur expliques qui je suis.

- Je pourrais leur écrire une lettre...

- Nous n’avons pas de temps à perdre, répondit Terry. Il faut partir tout de suite si nous voulons revenir avant le lever du soleil.

- Pourquoi avant le lever du soleil ? Demanda Candy, curieuse.

- Personne ne s’apercevra de votre escapade, je vous le garantit, éluda Terry. Dépêchons-nous. »

Il entraîna les deux amies vers l’orée du parc où une superbe limousine les attendait. Candy aperçut des armoiries peintes sur la porte, mais il faisait trop sombre pour qu’elle puisse les distinguer nettement. Pressée par Terry et Patricia, elle se retrouva dans la voiture qui bondit bientôt vers sa destination. Serrée contre Patricia sur le siège arrière, elle essayait de trouver un sens à cette folie qui l’avait poussée à suivre cet homme qu’elle ne connaissait pas. Il conduisait cette voiture comme s’il avait fait cela toute sa vie. La vitesse faisait voleter ses longs cheveux châtains et elle observait ses longues mains fortes qui tenaient le volant avec assurance. Inexplicablement, elle avait confiance en lui, elle aussi. Aucun d’eux ne parla beaucoup pendant le trajet. Le jeune homme demandait parfois une indication à Candy sur la route à suivre mais elle ne pouvait l’aider. Elle ne retrouva ses repères qu’en arrivant à proximité de l’orphelinat où elle avait grandi. Terry arrêta la voiture et se tourna vers ses passagères tandis qu‘un grand corbeau, dérangé sans doute dans son sommeil, s‘envolait dans un grand battement d‘ailes. Le visage bouleversé de Candy lui serra le coeur. Elle regardait le bâtiment vétuste avec des yeux pleins de larmes. Voilà plus de cinq ans qu’elle n’était pas revenue. Patricia lui serra gentiment la main et lui sourit. Candy s’essuya les yeux d’un revers de main et sauta du véhicule.

« Il y a encore de la lumière à la cuisine, constata-t-elle. Mlle Pony et Soeur Maria ne sont pas couchées. Attendez-moi là, je vais leur parler. »

Quand ils furent seuls dans la voiture, Terry se tourna vers Patricia.

« Je vous remercie de m’avoir fait confiance. Après tout, Candy a raison : Vous ne me connaissiez pas...

- Oh si je vous connais ! Tous les quatre ! Je trainais souvent aux alentours de la chaumière... Et puis... Je vous ai vu le jour où Candy prenait son bain... »

Le jeune homme rougit au souvenir de la scène de ce matin là.

« Je vous assure que je ne voulais pas...

- Je sais. J’ai vu que vous essayiez d’éloigner cet obsédé d’Anthony... C’est pour cela que je suis sortie des buissons après votre départ. Je ne voulais pas que Candy se fasse une fausse opinion de vous.

- Vous m’avez sauvé la mise. Mais pourquoi ?

- Je n’aime pas Anthony, avoua Patricia en baissant les yeux. »

Cela Terry pouvait parfaitement le comprendre ! Soudain il réalisa ce qu’elle venait de dire.

« Vous parlez d’Anthony ! Mais nous étions sous le coup de la malédiction, comme vous. Nous étions des nains...

- J’étais aussi là le soir où vous vous êtes baignés dans la rivière, confessa Patricia d’une toute petite voix. »

Encore plus gêné qu’il ne l’était déjà, si cela était possible, Terry virait à l’écarlate au souvenir de ce qu’ils avaient fait ce soir là en sortant de l’eau.

« Oh ! Dit-il simplement, à court de réparties. Vous auriez dû vous montrer, nous n’aurions pas...

- C’était la première fois que je me retrouvais moi-même depuis plus d’un an ! Je n’étais pas préparée et... Disons que je n’étais pas plus habillée que vous !

- Oh ! Répéta Terry. Le mage Albert était plein de bonnes intentions, mais il n’avait pas pensé à tout. »

Un silence pesant s’installa, qu’aucun d’eux ne savait comment détendre. Ils furent donc heureux de voir la porte de l’orphelinat se rouvrir et la petite silhouette de Candy s’encadrer dans la lumière. Mais elle n’était pas seule et ils ouvrirent de grands yeux en voyant celui qui se dirigeait vers eux.

« Mage Albert ! S’exclama Terry. Que faites vous ici ?

- Je vais où bon me semble, jeune homme, répondit Albert en souriant. Vous avez bien fait de m’amener cette jeune fille. Elle sera parfaitement en sécurité ici. Venez ma chère, dit-il en lui tendant la main pour aider Patricia à descendre, je vais vous présenter mes amies Pony et Maria qui prendront soin de vous. »

Terry les suivit dans la cuisine où Candy s’essuyait les yeux en faisant déjà ses adieux à ses deux mères adoptives.

« J’ai été tellement contente de vous revoir, balbutia-t-elle entre deux sanglots. Mais je dois partir si je veux être de retour chez les Legrand avant qu’on s’aperçoive de mon absence. Merci de prendre soin de Patricia. Dès que j’aurai dix-huit ans et que je pourrai quitter les Legrand, je reviendrai vous voir, c’est promis.

- Cela arrivera peut-être plus tôt que tu ne l’imagines, ma petite, dit gentiment le Mage Albert, qui se tourna ensuite vers Terry. Je vous remercie de ce que vous avez fait, Terrence, mais je vais ramener moi-même Candy chez elle. Elle a eu suffisamment d’émotions pour ce soir et elle a besoin de sommeil. »

Sur ces mots, il fit un geste de la main et il disparut dans un nuage de fumée. Et Candy avec lui avant que Terry n’ai pu ouvrir la bouche. Lui qui se faisait une joie à l’idée du trajet du retour seul avec Candy... Une nouvelle fois, le Mage venait de lui couper l’herbe sous le pied !

La plus âgée des dames s’approcha de lui en souriant.

« Ainsi vous êtes Terrence... Vous avez les même yeux que votre mère...

- Vous connaissez ma mère ?

- Je l’ai connue autrefois. Quand elle n’était encore qu’une enfant...

- Elle racontait parfois qu’elle avait une fée pour marraine, se souvint Terry. La fée Pony... Mais elle a disparu après son mariage avec mon père.

- Les petites filles n’ont plus besoin qu’on veille sur elles une fois qu’elles sont mariées. Elle est très heureuse auprès de votre père.

- Seriez-vous...?

- Allons jeune homme, rit Mlle Pony. Trouvez-vous que je ressemble à une fée ? Et pourquoi une fée viendrait-elle s’enterrer dans ce petit village loin de tout ?

- Peut-être pour veiller sur une autre petite fille, hasarda le jeune homme. Une petite fille que le Mage voudrait dissimuler à la Sorcière ?

- Je vois que vous avez l’esprit vif, constata la vieille dame. Mais vous avez trop d’imagination. Dépêchez-vous de rentrer chez vous avant le lever du soleil. L’heure de voir se réaliser la prophétie n’est pas encore venue. D’ici là, il vaut mieux de pas attirer l’attention. »

Elle le poussa aimablement vers la porte, et Terry comprit qu’il n’en apprendrait pas plus ce soir là. Mais il se promit de poser quelques questions à sa mère dès que possible. Il fit ses adieux aux deux femmes et regagnait sa voiture l’esprit préoccupé lorsque Patricia le rejoignit.

« Terrence ! Attendez ! Je voudrais... vous demander de transmettre un message pour moi.

- Laissez-moi deviner... Pour Allistair peut-être ?

- Oui, avoua Patricia dans un souffle. Dites lui... que je suis en sécurité et qu’il ne se fasse pas de souci pour moi.

- C’est tout ? Demanda Terry en souriant malicieusement. Rien de plus personnel ?

- Non, il vaut mieux ne pas lui en dire plus. Mais il y a autre chose. Quand Daniel Legrand m’a capturée, il a parlé de quelqu’un qu’il voulait attraper et livrer à la sorcière... Une sirène...

- Mais il n’y a pas de sirène dans la région ! Ou alors... Une autre victime des malédiction de la Marlow ?

- Je ne peux pas vous en dire plus. Je suis désolée.

- Très bien, soupira Terry. Je garderai un oeil sur ce Legrand. C’est tout ce que je peux vous promettre.

- Merci Terrence. C’est déjà beaucoup. »

Sur ces mots, elle regagna la maison et Terry reprit sa route en sens inverse, l’esprit tout occupé de ce qu’il avait découvert ce soir. Le mieux était de regagner le Duché le plus vite possible car il avait beaucoup à faire. Nain ou pas, il n’allait plus rester les bras croisés à attendre les événements. Il était temps pour lui d’agir, et il savait très bien par quoi il voulait commencer.


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 16:42     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 6




Dans le Duché de Granchester, rien n’avait changé en apparence. On chuchotait parfois dans les veillées que le règne de la Sorcière touchait à sa fin, mais personne n’osait le dire trop haut, par crainte des représailles de celle-ci. Il se disait aussi que le jeune héritier était revenu, pourtant il restait invisible, et pour cause !

L’humeur de Terrence n’avait jamais été aussi sombre. Il avait passé les premiers jours cloîtré dans sa chambre à ressasser ce que le Mage Albert leur avait appris. Certes l’idée de voir la Sorcière Marlow perdre tous ses pouvoirs était réconfortante. Hélas, il n’osait trop espérer. Quand il songeait que la seule chance de voir ce beau rêve se réaliser reposait sur la capacité des trois cousins de Lakewood à trouver la femme idéale et à s’en faire aimer en moins d’un mois... Il avait appris à les connaître en vivant avec eux dans la forêt et l’éventualité qu’ils réussissent pareil tour de force relevait à ses yeux de l’utopie ! Et s’ils échouaient, alors... il ne lui resterait plus qu’à revenir à la première option : Épouser Susanna !

Il n’avait rencontré qu’une fois la fille de la sorcière, plusieurs années auparavant. Son éducation lui avait appris à être d’une courtoisie exemplaire avec les représentantes de l’autre sexe, aussi avait-il été charmant avec la jeune fille venue au château avec sa mère. Il se souvenait à peine d’elle tant il l’avait trouvée falote et dépourvue d’intérêt. Son seul signe distinctif était son postérieur lumineux, tare qu’elle s’efforçait de dissimuler sous des jupes et de nombreux jupons de couleur sombre. Il ne s’en était d’ailleurs rendu compte qu’au moment de son départ, tard dans la soirée, où l’étrange particularité était plus visible dans l’obscurité de la nuit.

Sinon, Terry n’aurait même pas été capable de dire de quelle couleur étaient les yeux de la pauvre fille. Il se souvenait d’une blonde aux cheveux filasse, écrasée par la personnalité de sa mère, qui essayait de compenser son manque d’assurance par une arrogance bien déplacée vu son apparence quelconque.

Non, s’il avait dû choisir une femme avec laquelle passer sa vie, ce n’aurait jamais été cette apprentie sorcière. Et s’il avait pu choisir, il ne serait pas allé chercher bien loin. Depuis qu’il l’avait rencontrée, une seule image dansait dans sa tête. Celle du sourire lumineux de la jolie Candy. Mais Candy n’était pas pour lui !

Plus il y pensait, plus il était persuadé que Candy était une des trois jeunes filles dont parlait le Mage. Sinon, pourquoi aurait-il été si soucieux de sa sécurité ? Ce qui signifiait qu’elle était destinée à un des princes héritiers de Lakewood ! Mais imaginer une fille aussi adorable avec un des trois cousins mettait Terry hors de lui. Aucun d’eux n’était fait pour elle ! Allistair, toujours dans la lune et dans ses inventions ne saurait pas l’apprécier à sa juste valeur. Archibald était trop préoccupé de son apparence pour s’intéresser à qui que ce soit d’autre que lui-même. D’ailleurs, Terry n’avait jamais pu déterminer si Achie marchait à la voile ou à la vapeur... Quand à Anthony... Cet obsédé se défilerait dès qu’il aurait obtenu ce qu’il voulait et l’abandonnerait sans remord pour courir la gueuse ! Ils n’étaient pas dignes d’elle. Candy méritait un homme qui saurait l’aimer et la chérir, de tout son coeur, de toute son âme... Lui il aurait su ! S’il avait eu la chance d’être aimé par Candy... Mais Terry était hors jeu ! Soit les trois cousins réussissaient leur mission, ce qui signifiait que l’un d’eux aurait épousé Candy, soit ils échouaient, et Terry se verrait dans l’obligation d’épouser la fille de la sorcière. Dans un cas comme dans l’autre, ils n’étaient pas destinés à être ensemble.

Démoralisé, Terry avait fini par quitter le château des Granchester pour se joindre à une troupe de comédiens ambulants qui parcouraient le pays. Il avait besoin de s’éloigner avant la date fatidique qui déciderait de son triste destin. Ses parents l’avaient compris et avaient donné leur accord. Le jeune homme voyageait donc en compagnie des acteurs, donnant un coup de main dans la journée lorsqu’il était transformé en nain, et montant parfois sur les planches dans la soirée lorsqu’on avait besoin d’un jeune premier. Terry aimait jouer la comédie. Il avait l’impression de devenir quelqu’un d’autre pour un soir et d’oublier sa condition. Bien sûr, il savait que ses parents avaient chargé un homme de confiance de le suivre afin de veiller sur lui et de lui procurer tout ce dont il pourrait avoir besoin. Mais Terry n’avait jamais fait appel à lui et faisait mine d’ignorer sa présence. Son garde du corps respectait son besoin de solitude et restait à bonne distance. Un arrangement qui leur convenait à tous les deux.

Hélas, le destin n’avait pas fini de jouer avec Terrence Granchester. Le hasard voulut que la troupe avec laquelle il voyageait choisisse de passer la frontière pour aller exercer son art au royaume de Lakewood. Ils ne tardèrent pas à faire halte non loin de la capitale, près du château des Legrand. Terry se souvenait parfaitement que la jeune fille avait dit être employée chez eux. Il ne put résister à l’envie de s’approcher de la demeure. Il s’introduisit dans le parc avec l’espoir d’apercevoir celle qu’il ne pouvait chasser de son esprit. Par prudence, il se faufila derrière les communs, persuadé qu’il ne serait pas découvert s’il restait loin de l’habitation principale. Dissimulé derrière les écuries, il scruta la cour, se demandant où Candy pouvait bien être occupée en ce moment mais il ne l‘aperçut nulle part. Deux servantes chargées de paniers contenant du linge fraîchement lavé se dirigèrent dans sa direction. Craignant d’être découvert, Il se faufila dans l’écurie pour se dissimuler. Il heurta malencontreusement un seau vide qui traînait là et qui tomba avec un bruit sourd. Mais les deux femmes ne semblèrent pas y prêter attention. Sans doute pensèrent-elles que les chevaux étaient nerveux. En revanche, il entendit nettement quelque chose provenant du fond de l’écurie. Un chuchotement, puis un bruit de petits pas rapides, suivi du son caractéristique de la paille qu’on remuait. Intrigué, il se dirigea vers l’origine de ce qu’il avait entendu, persuadé qu’il n’était pas le seul à se dissimuler ici. A sa grande surprise, il se trouva nez à nez avec Candy qui poussa un profond soupir de soulagement en le reconnaissant.

« Monsieur Grincheux ! Mais que faites-vous là ? »

Terry la dévorait des yeux sans répondre. Elle était encore plus jolie que dans son souvenir, malgré ses vêtements de domestique et son tablier couvert de taches.

« Puis-je faire quelque chose pour vous ? Reprit Candy.

- Non ! Répondit-il un peu trop vivement. Je passais juste dans le coin, alors...

- Vous avez quitté la forêt pour prendre de mes nouvelles ? C’est vraiment très gentil de votre part, mais je vais très bien, ne vous en faites pas.

- Je ne suis pas venu pour cela ! Se défendit Terry. »

Il avait bien conscience de mentir honteusement, mais il ne savait comment se sortir de cette situation. Il cherchait désespérément une excuse valable quand Candy se tourna vers une des stalles en émettant un petit sifflement.

« Tu peux sortir ma belle, dit-elle. C’est un ami. Tu n’as rien à craindre. »

Interloqué, il vit une petite tête noire et blanche émerger d’un tas de paille. A pas prudents, le raton laveur s’approcha d’eux et Candy le prit dans ses bras.

« C’est l’animal que... Il est resté avec vous ?

- C’est une longue histoire, commença Candy.

- Mais pourquoi aurait-il quelque chose à craindre ? Il a l’air gentil et il ne fait de mal à personne en restant dans l’écurie. Qui voudrait le chasser d’ici ?

- S’il vous plait, ne révélez pas que Capucin est ici. Daniel Legrand... Le jeune maître est à sa recherche. Il veut le livrer à la sorcière ! Capucin a réussi à lui échapper et s’est réfugié ici.

- Se cacher dans les propres écuries de Legrand, alors que celui-ci le pourchasse dans la forêt ? C’est très rusé, mais un peu risqué, non ?

- Je sais bien, soupira la jeune fille. Mais la pauvre petite bête a peur de retourner dans la forêt maudite et je ne vois pas d’autre solution. »

Le raton laveur sauta des bras de Candy et s’avança vers le nain. Il l’observa en penchant la tête de côté, et on aurait juré qu’il réfléchissait. Puis il planta ses dents dans le pantalon de Terry et essaya de l’entraîner vers le fond du bâtiment. Intrigué, il se laissa faire et ouvrit de grands yeux lorsqu’il découvrit le coin aménagé dans le dernier box, sous l’unique fenêtre, avec un lit minuscule et une simple commode.

« Qui dort ici ? Demanda Terry, la voix vibrante de colère.

- C’est moi. Avoua la jeune fille. »

Elle raconta alors ce qui c’était passé lors de son retour et comment Daniel Legrand l’avait obligée à déménager. Grincheux n’avait jamais autant mérité son nom. Il ne cessait de grommeler tout au long de son récit et serrait les poings comme s’il s’apprêtait à donner à Legrand la correction de sa vie.

« Vos employeurs sont des monstres ! S’exclama-t-il enfin. Vous ne pouvez pas rester ici.

- Je ne peux pas m’en aller, protesta Candy, pas avant d’avoir dix-huit ans. Sinon, ce serait la honte pour les femmes qui m’ont placée ici et pour mon orphelinat. Et puis ce n’est pas si terrible. J’aime bien les chevaux. De plus, depuis que le mage Albert est revenu, on dit que tout va changer. M. Legrand a disparu depuis deux semaines. Sa femme ne sort plus de sa chambre, quand à leurs enfants... Et bien Elisa est toujours fourrée dans cette boutique qui vient d’ouvrir en ville et Daniel est parti à la recherche de... Enfin bref, il n’y a personne pour m’embêter. Je suis très bien ici.

- Mais on n’a pas le droit d’obliger une jeune fille à vivre dans une écurie ! S’exclama Terry qui bouillait de rage. Si je pouvais, Candy, j’offrirai à ces imbéciles un cheval aussi beau que celui du mage Albert afin que vous ne soyez plus contrainte de dormir ici !

- Oh Monsieur Grincheux ! Répondit Candy, émue par sa proposition. Où trouveriez-vous un cheval aussi beau ? C’était un cheval magique, ne l’oubliez pas. Aucun animal ne pourrait l’égaler. Et puis, même si c’était possible, je suppose qu’Elisa et Daniel Legrand trouveraient un autre prétexte pour m’humilier. Ne vous inquiétez surtout pas pour moi. Je suis sûre que tout va bientôt s’arranger. »

Terry songeait aux magnifiques étalons de l’écurie de son père. Certes, ils n’étaient pas des animaux magiques, mais ils étaient bien plus beaux que ceux qu’il pouvait voir autour de lui. Il remarqua que Candy enlevait son tablier, signe qu’elle avait fini son travail.

« Et comment vont vos amis ? Demanda-t-elle. Monsieur Coquet, et Monsieur Prof et...

- Savez vous que personne ne s’adresse jamais aux nains en leur donnant du Monsieur, Candy ?

- Oh, mais c’est très impoli, je trouve ! Je ne voudrais pas être incorrecte. Vous m’avez accueillie avec tant de gentillesse, et je suis partie si vite que je n’ai pas eu le temps de vous remercier comme j’aurais dû. Pourriez-vous m’excuser auprès de vos amis ? Et dites leur que je leur suis infiniment reconnaissante de leur hospitalité.

- Je le ferai quand je les verrais, mais je ne vis plus dans la forêt. Je voyage désormais avec des comédiens. Nous sommes venus dans la région parce qu’il y a une fête au village. Nous donnons une représentation ce soir. Mais nous repartons dès demain matin.

- Où irez vous ?

- Vers le sud d’après ce que j’ai entendu dire. Pourquoi ?

- J’ai grandi dans une petite ville de nom de La Porte, au sud d’ici. Quand les Legrand m’ont prise à leur service, ils avaient promis de me donner des jours de congés pour que je puisse retourner là-bas de temps en temps, mais ils ne l’ont jamais fait, avoua Candy avec un soupir. Mes deux mamans me manquent...

- Aimeriez-vous que je leur porte un message de votre part ? Offrit spontanément Terry. »

Il se mordit la lèvre d’avoir proposé une telle chose, mais les yeux brillants de joie que Candy posa sur lui valaient tous les sacrifices. Soudain le visage de la jeune fille s’illumina. Elle se tourna vers son petit animal et se mit à lui parler comme à une personne.

« La voila la solution ! C’est là que tu dois aller ! Tu ne craindras rien auprès de Mlle Pony et Soeur Maria. Oh Monsieur Grincheux ! Je vous en prie, pourriez-vous emmener Capucin avec vous demain ? »

Elle le regardait avec des yeux suppliants et Terry sentit son coeur fondre. Il était prêt à tout pour lui faire plaisir, alors s’il suffisait de mettre son petit compagnon en sécurité, comment aurait-il pu refuser ?

« Je serais heureux de vous rendre service, Candy, dit-il. Je vous promets que d’ici deux ou trois jours, votre raton laveur sera auprès de ces dames.

- Deux ou trois jours ! S’exclama la jeune fille. Pourtant, je me souviens que le trajet pour venir ici n’avait pris que trois heures avec la voiture automobile des Legrand.

- Mais notre troupe voyage en roulotte et nous nous arrêtons dans chaque village pour donner notre spectacle et gagner notre vie. Qu’y a-t-il de si urgent ?

- Il ne peut pas rester plusieurs jours dans votre roulotte. Plaida la jeune fille.

- Pourquoi ? Il n’est pas propre ? »

La question amena une mimique offusquée sur la face du raton laveur qui se dressa sur ses pattes, en sifflant de colère. Candy l’apaisa en lui posant une main sur la tête.

« Il faudrait lui dire, tu ne crois pas, chuchota-t-elle à l’oreille du petit animal. Je suis sûre qu’on peut lui faire confiance... »

Capucin sembla hésiter puis hocha la tête avant de réfugier sur le lit. Il se roula en boule mais ne les quitta pas des yeux, surveillant la réaction du nain.

« Capucin n’est pas tout à fait un raton laveur, commença Candy à voix basse. Son vrai nom est Patricia. Elle est la fille du baron O’Brian. L’année dernière, son père a refusé d’obéir à la Sorcière Marlow, alors elle a transformé Patricia en raton laveur. Elle vivait dans la forêt mais il s’est passé une chose bizarre...

- Depuis peu, elle reprend son apparence humaine dès que le soleil se couche ! Conclut Terry à sa place.

- C’est cela ! Comment le savez-vous ?

- Oh... C’est une longue histoire, ça aussi, éluda Terry. »

L’esprit du nain travaillait à toute vitesse. Se pourrait-il que cette Patricia soit une des trois jeunes filles de la prophétie ? Cela expliquerait pourquoi la sorcière tenait tant à la récupérer. Cela signifiait aussi que la Marlow était au courant des projets des trois princes de Lakewood et qu’elle était bien décidée à les empêcher de réussir. Quel meilleur moyen que d’enlever et de séquestrer les jeunes filles concernées jusqu’à l’expiration du délai fatal ? En réalité, il lui suffisait d’en faire disparaître une seule ! Et elle avait jeté son dévolu sur celle-ci. Patricia était-elle la seule que la sorcière ait pu identifier, ou était-elle simplement la plus facile à capturer ? Il résoudrait ce problème plus tard. Pour l’instant, il était bien résolu à faire tout son possible pour que les manigances de cette horrible femme échouent. Mais Candy avait raison. Abriter pendant plusieurs jours dans sa roulotte un raton laveur qui se transformait en fille dès le coucher du soleil risquait d’attirer l’attention et multipliait les risques d’être découverts. Il releva la tête et vit la jeune fille et son... amie qui l’observaient avec des yeux brillants d’espoir.

« Qui d’autre est au courant ? Demanda-t-il.

- Seulement le prince Allistair. C’est lui qui a aidé Patricia à échapper à Daniel Legrand. Mais elle a refusé de me dire comment elle l’avait rencontré. »

Le raton laveur se cacha les yeux avec ses petites pattes. Si les animaux avaient pu rougir, Terry était prêt à parier que celui-ci serait écarlate. Ainsi elle savait pour Allistair. Tout laissait à penser qu’elle était aussi au courant pour les trois autres nains, donc pour lui ! Voilà qui ôtait un souci à Terry. De plus, elle n’avait rien révélé à Candy, ce qui prouvait qu’elle savait tenir sa langue. Décidément, ce Capucin, ou plutôt cette Patricia, était digne de confiance. Cela ne fit que renforcer sa résolution de lui venir en aide.

« Je trouverai une solution, affirma-t-il, bien qu’il fut loin d’avoir le début d’une idée. Soyez prêtes à partir dès que je reviendrai vous chercher. »

Folle de joie, Candy se pencha vers lui et le serra sur son coeur.

« Je savais que vous étiez un véritable ami ! Merci Monsieur Grincheux. Merci mille fois ! »

Horriblement gêné, le nain se dégagea de l’étreinte de la jeune fille et sortit précipitamment en maugréant, mais son coeur battait à cent à l’heure dans sa poitrine.


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 16:27     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 5




Le prince Allistair avait toujours été fasciné par la mécanique. Les progrès récents de la technologie l'enchantaient. Il se passionnait pour les machines à vapeur, les voitures automobiles et son rêve secret était de construire un engin volant. Les demoiselles ne partageant pas sa passion, il ne s'était jamais beaucoup intéressé à elles. Mais puisqu'il était dans l'obligation de trouver la fille qui lui était destinée, il décida de mettre ses compétences à profit pour y parvenir.

Il retourna à la chaumière et investit la remise qu'il transforma en atelier. La reine lui fournissait tout le matériel dont il avait besoin et il se mit à travailler jour et nuit avec pour seule compagnie le petit raton laveur déniché par Candy qui semblait s'être attaché à lui. Il prenait à peine le temps de manger et ne prenait de repos que lorsqu'il s'écroulait, reclus de fatigue. Souvent quand il se réveillait, la petite bête était blottie contre lui. Il prenait alors le temps de lui dénicher quelque chose à grignoter et se remettait au travail. Il n'y avait que la nuit que le raton laveur s'éclipsait, sans doute pour aller chasser dans la forêt et améliorer son ordinaire. Allistair lui se replongeait dans ses calculs et son projet prenait forme. L'atelier résonnait de ses coups de marteau et parfois de quelques jurons bien sentis quand tout ne se déroulait pas comme il le souhaitait.

C'est là qu'Anthony, ou plutôt Charmeur puisqu’il était sous sa forme de nain, le trouva, un après-midi. Le raton laveur sur les genoux, il contemplait avec satisfaction la machine qu’il venait de terminer.

« Salut Cousin ! Dit-il en entrant. J’étais venu voir où tu en étais de... Bon sang ! Qu’est-ce que c’est que ce truc ?

- Tu tombes bien, Anthony. Je viens d’achever mon chef d’oeuvre.

- Tu veux dire que tu as passé ton temps à construire ce... machin ? Aurais-tu oublié que tu étais sensé trouver la fille qui t’étais destinée ?

- Tu peux parler ! Protesta Allistair. D’après ce que j’ai entendu dire, tu as passé les trois dernières semaines à courir après tous les jupons qui passaient ! Comme autrefois ! C’est comme ça que tu espères trouver la femme de ta vie ?

- Je l’ai déjà trouvée, mon cher ! Se rengorgea Anthony. Si je ne lui ai encore rien dit, c’est tout simplement parce que j’ai décidé de prendre un peu de bon temps avant de m’engager pour la vie. Mais dès que je lui ferais un brin de cour, elle me tombera dans les bras, comme les autres.

- Qui est-ce ? Demanda Allistair, intrigué.

- Ne compte pas sur moi pour te le dire ! Non que je craigne que tu me la piques, mais on ne sait jamais. Tu as tellement de succès avec les filles ! »

Anthony éclata de rire pendant que son cousin se renfrognait.

« C’est malin ! Maugréa Allistair. Je n’y connais rien en filles, je l’avoue, mais je connais la mécanique. Voilà pourquoi j’ai construit cette machine. Elle est programmée pour connaître mes goûts et mes aspirations et découvrir la femme qui sera parfaite pour moi.

- Et tu crois vraiment que cela va marcher ? Demanda Anthony incrédule.

- Bien sûr ! Laisse moi la mettre en marche... »

Très fier de lui, Allistair enclencha le bouton de mise en route et il ne se passa... rien ! Charmeur eut un petit rire sardonique.

« Pas très convainquant, si tu veux mon avis...

- C’est normal, se défendit Allistair. Il n’y a que nous ici, la machine ne peut pas faire son office. »

C’est à cet instant que le raton laveur, très intrigué, s’approcha de l’engin en reniflant. Aussitôt l’appareil se mit à sonner et à vibrer sans pouvoir s’arrêter. Allistair se précipita pour l’arrêter en jurant. Puis il attrapa la malheureuse bestiole et la confia à son cousin qui était mort de rire.

« Ah bravo, mon cher Allistair ! Je vois que tes inventions fonctionnent toujours aussi bien, se moqua Anthony en s’essuyant les yeux tant il pleurait de rire. Tu viens d’inventer la machine à détecter les ratons laveurs ! Je suis sûr qu’il y a des débouchés du côté des éleveurs de poules !

- Ça suffit, protesta son cousin. C’est juste un tout petit problème de réglage. J’aurais arrangé cela dans deux minutes...

- Inutile de t’emballer, fit remarquer le prince Anthony. Tu as vu la taille de ton engin ? Comment aurais-tu fait pour le transporter ? Tu ne peux quand même pas faire venir toutes les filles du pays dans cette remise pour qu’elles passent devant ta machine ! »

Allistair examina sa machine qui avait effectivement la taille d’une armoire à glace. Mais il refusait de s’avouer vaincu.

« Je pourrais la miniaturiser... Ou la transporter sur un chariot...

- Arrête de rêver mon pauvre Allistair ! Tu t’es planté, encore une fois ! Remarque, tu n’as pas tout raté, ton raton laveur est une femelle, après tout. »

En disant cela, Anthony avait retourné l’animal sur ses genoux et lui caressait le ventre avec de longs gestes circulaires, malgré les tortillements de la bestiole qui essayait de s’échapper.

« Capucin est une femelle ? Demanda Allistair interloqué.

- Bien sûr ! Tu n’as pas entendu le mage s’adresser à elle au féminin ? Mon pauvre ami ! Tu es décidément nul ! »

Anthony continuait de palper l’animal malgré ses protestations.

« Mais dites-moi, ma chère, constata-t-il. Vous êtes délicieusement dodue ! Si vous étiez une humaine, vous auriez certainement tout ce qu’il faut où il faut pour rendre un homme heureux. Vous devez faire des ravages parmi vos congénères ratons laveurs ! »

Soudain Capucin planta ses dents pointues dans la main qui le maintenait. Anthony poussa un cri et le lâcha. La bestiole sauta à terre et s’enfuit aussi vite qu’elle le pouvait vers les bois.

« Sale bête ! S’exclama le prince. Elle m’a mordu !

- Tu n’avais qu’à la laisser tranquille, protesta Allistair. Où a-t-elle pu aller ?

- Je m’en fiche ! Qu’elle aille au diable ! En ce qui me concerne, je préfère les femelles plus dociles, humaines ou animales...

- Je vais la chercher, décida Allistair en empoignant son sac à dos et en se lançant à la poursuite de son petit ami à fourrure.

- C’est ça, maugréa son cousin en nouant son mouchoir autour de sa main blessée. Je te souhaite bien du plaisir. Pour ma part, j’ai rendez-vous avec une charmante brunette qui ne me mordra pas, elle. Enfin pas trop... »


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Capucin courait aussi vite qu’il le pouvait en s’enfonçant dans la forêt maudite. Il courut longtemps, puis s’arrêta, à bout de souffle. Il s’assit sur son séant et regarda derrière lui. La chaumière était loin désormais. Jamais il n’y retournerait ! Son ami Prof devait être très fâché contre lui d’avoir détraqué sa belle machine. Mais par dessus tout, il ne voulait plus revoir cet horrible Anthony qui lui palpait le ventre et les côtes comme si... Comme s’il savait !?. L’animal poussa un cri inarticulé et se cacha les yeux avec ses petites pattes, mais deux bruits attirèrent son attention.

Au loin, il entendit la voix d’Allistair qui l’appelait et lui demandait de revenir. Son ami était parti à sa recherche ! Voilà qui faisait chaud au coeur, mais il était hors de question de s’approcher à nouveau de l’horrible Charmeur.

Plus près de lui, dans les buissons, un autre bruit résonna. Quelqu’un marchait en essayant de faire le moins de bruit possible. Méfiant, Capucin décida de ne pas s’attarder. Il se remit sur ses pattes et voulut reprendre sa course. Hélas, il ne fut pas assez rapide. Une main solide l’attrapa par la peau du cou. Il essaya bien de se défendre et de mordre, mais ne réussit qu’à se blesser la patte avant sur la boucle de ceinture de son ravisseur. Avant d’avoir compris ce qui se passait, il se trouva enfermé dans un épais sac de toile et jeté sans ménagement sur une épaule.

Allistair qui connaissait bien la forêt depuis le temps qu’il y vivait n’eut aucun mal à suivre la trace du raton laveur. Il était sur le point de le rattraper quand il vit un homme s’en emparer sans ménagement. Et cette brute n’était autre que son cousin Daniel Legrand ! Intrigué, il le suivit aussi discrètement que possible. Après une longue marche, Daniel s’arrêta dans la clairière même où lui et sa soeur avaient abandonné Candy quelques jours plus tôt. Il fit tomber de son épaule le sac dans lequel Capucin s’agitait autant qu’il pouvait et s’assit au pied d’un arbre en soupirant.

« Tu vas arrêter de gigoter, oui ou non ? Dit-il en mettant un coup de pied dans le sac. Je ne sens plus mes bras à force d’essayer de te retenir. Ne compte pas m’échapper. Je dois te ramener à la sorcière, sinon elle me lancera un de ses maléfices. Je n’ai aucune envie de me retrouver transformé en crapaud ou autre chose. Tu ne sortiras pas de ce sac avant que je t’ai livré à la Marlow ! »

Tout mouvement cessa soudain dans le sac. Inquiet, Allistair s’enfonça plus profondément dans le buisson où il se dissimulait pour essayer de voir si son petit ami allait bien. Des branches craquèrent et alertèrent Daniel qui regarda autour de lui avec inquiétude. Le nain se fit aussi petit que possible, désespéré de ne pouvoir intervenir. Mais avec sa petite taille, comment aurait-il pu lutter contre son cousin ?

Méfiant, Daniel prit le sac et le secoua, sans obtenir la moindre réaction. L’inquiétude d’Allistair monta d’un cran. Il était sur le point d’intervenir quand l’autre lâcha un ricanement mauvais.

« Ne me prends pas pour un imbécile, sale bestiole. Je sais que les ratons laveurs ont l’habitude de faire le mort pour échapper à leurs prédateurs. Ça ne marchera pas avec moi. Il ne reste plus qu’à trouver cette fichue sirène, et je vous remettrai toutes les deux à la Sorcière qui me récompensera. Bientôt je serai l’homme le plus riche du pays, et si mes cousins ne reparaissent pas, peut-être même deviendrai-je roi, qui sait ? En attendant, je vais te mettre en sécurité. »

Le jeune homme se dirigea vers un énorme rocher qui comportait un trou à sa base. Il y fourra le sac et pour plus de sûreté, boucha l’entrée avec une grosse pierre bien lourde qu’il fit péniblement rouler devant l’orifice. Puis il sortit de quoi manger de sa besace et casse-croûta tranquillement. Enfin il se leva et repartit vers la forêt.

Dès qu’il entendit ses pas s’éloigner, Capucin reprit ses tentatives pour sortir du sac, mais celui-ci était solidement fermé par un lien de cuir. Il fallait pourtant qu’il réussisse à s’évader. Il commençait à manquer d’air et si jamais le soleil se couchait avant qu’il ait réussi à sortir de ce rocher... Il n’osait penser à ce qui lui arriverait. Il entreprit de ronger le fond du sac de toile pour se ménager une issue ou au moins faire entrer un peu d’air. Il entendit soudain des raclements et des ahanements derrière le rocher. Son ravisseur était-il de retour ? Pourtant il n’avait pas le choix s’il ne voulait pas mourir. Il devait sortir.

Allistair avait attendu impatiemment que son cousin tourne les talons. Quand il fut sûr qu’il ne reviendrait pas, il sortit de sa cachette et se précipita vers le rocher. Il examina la pierre qui bouchait la cavité, atterré par sa taille. Comment allait-il réussir à la déplacer. Il s’arc-bouta contre elle et poussa de toutes ses forces sans réussir à la faire bouger d’un millimètre. Ses pieds glissaient sur le sol mais la pierre restait immobile. Il s’assit découragé en essayant de reprendre son souffle. La meilleure solution était d’attendre le coucher du soleil. Quand il aurait repris sa taille normale, il pourrait libérer l’entrée. Mais il craignait que ce ne soit trop long et que le raton laveur meure étouffé d’ici là. Bon sang ! Il devait trouver un moyen le plus rapidement possible. Il était le plus intelligent de la famille, le scientifique... Pourtant son cerveau lui refusait tout service et était aussi vide que celui de cet imbécile de Daniel ! Il donna un coup de pied rageur dans une petite pierre et la regarda rouler vers la rivière. Et soudain il eut une illumination. Il courut ramasser la pierre et la ramena près de celle qui bouchait l’entrée. Puis il se mit en quête d’une solide branche, assez longue pour lui servir de levier. Archimède promettait de soulever le monde. Lui il avait juste une pierre à faire bouger. Il fallait qu’il y arrive !

Une fois son mécanisme en place, le pauvre nain poussa de toutes ses forces sur son levier improvisé et Miracle ! La pierre se déplaça de quelques centimètres. En remerciant ce bon vieil Archimède, il renouvela l’opération jusqu’à dégager un espace suffisant pour accéder à la cavité. Fou d’angoisse, il se précipita et sortit le sac avec précautions. Il défit le lien les mains tremblantes. Le pauvre Capucin ne bougeait plus. Était-il mort ? Allistair lui caressa doucement la tête, des larmes plein les yeux.

« Pourquoi t’es-tu sauvé, Capucin ? Je n’étais pas fâché contre toi tu sais. Si cet imbécile de Daniel t’a tué, je le lui ferai payer ! Respire, Capucin ! Je t’en prie, respire ! »

Soudain l’animal ouvrit un oeil, puis l’autre, et prit une longue inspiration. Fou de joie, Allistair serra contre lui le petit corps chaud et tremblant.

« Tu es vivant ! Je suis si heureux ! Tu n’as plus rien à craindre. Le méchant Daniel est parti. Nous allons rentrer à la chaumière où tu seras en sécurité. Il ne pourra plus te faire de mal. »

Le raton laveur secoua la tête pour exprimer son désaccord, mais Allistair n’y prit pas garde. Tout en le gardant dans ses bras, il sortit un gobelet de son sac à dos et alla le remplir au ruisseau. Puis il le posa devant l’animal et examina ses pattes avant qui étaient en sang tant la pauvre bête s’était acharnée sur les parois de sa prison pour se libérer. Pendant que Capucin buvait, il nettoya les plaies puis déchira le bas de sa chemise pour lui faire des bandages. La petite bête dodelinait de la tête et semblait sur le point de s’endormir. Le sommeil était ce qu’il y avait de mieux pour elle et Allistair la considéra avec tendresse. Il allait le ramener à la cabane et lui aménagerait un coin douillet auprès du poêle. Il se désaltéra au ruisseau, avant de ranger ses affaires dans son sac. Il se sentait fatigué lui aussi et s’allongea un instant. Il s’endormit sans s’en rendre compte, Capucin toujours dans ses bras.


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Le jeune homme fut le premier à se réveiller, plusieurs heures plus tard. Il constata immédiatement que la nuit était tombée et qu’il avait repris son apparence normale. Son premier réflexe fut de vérifier que Capucin n’avait pas profité de son sommeil pour s’enfuir une nouvelle fois. Il resserra l’étreinte de son bras sur le corps doux et chaud blotti contre lui. Sa main glissa sur une peau soyeuse douce comme du satin. Surpris, il ouvrit les yeux pour découvrir une jeune fille entièrement nue qui s’agitait dans son sommeil, signe qu’elle allait se réveiller elle aussi. Ses cheveux châtains dissimulaient son visage, mais il sentait les rondeurs de sa poitrine pleine pressées contre son torse. Comme ses propres vêtements n’avaient pas résisté à son brusque accès de croissance, il se retrouvait presque aussi peu vêtu qu’elle ! Il retira vivement sa main quand il réalisa qu’elle s’attardait sur les rondeurs de son postérieur blanc et ferme. Le mouvement qu’il fit acheva d’éveiller la jeune fille qui poussa un cri en découvrant dans quelle intimité ils se trouvaient. Elle se redressa le visage empourpré et essaya de dissimuler sa nudité mais ses seins généreux semblaient vouloir s’échapper à chaque instant du bras qui tentait de les cacher. Le corps d’Allistair réagit immédiatement à ce spectacle et il se retourna vivement. La fille fit de même et il se retrouvèrent dos à dos, aussi confus l’un que l’autre de ce qui leur arrivait.

« Je suis désolé ! Bredouilla Allistair. Je ne m’étais pas rendu compte... Enfin si, bien sûr... J’ai bien vu que vous étiez une fille, mais... Je voulais pas vous caresser les... Pas intentionnellement du moins. Je... »

Il se tut dans ses explications embrouillées en réalisant que la jeune fille pleurait. Il se retourna et s’agenouilla derrière elle. Il aurait voulu la consoler mais dès que ses yeux se posèrent sur la ligne pure de son dos et sur les courbes affolantes de ses hanches, il perdit le peu de moyens qui lui restait. Il tendit la main pour la poser sur son épaule, mais elle eut un sursaut avant même qu’il l’ait touchée.

« Ne me touchez pas ! Et ne regardez pas ! Allez-vous en !

- Et vous laisser toute seule ici avec Daniel qui rôde dans les parages ? Certainement pas ! Il ne faut pas avoir peur de moi. Vous n’avez rien à craindre. Attendez un instant... »

Le jeune homme tendit le bras pour attraper son sac à dos dans lequel il conservait toujours des vêtements de rechange pour le cas où il ne serait pas chez lui au moment du coucher du soleil. Il en sortit un pantalon pour lui et une chemise qu’il tendit à la jeune fille.

« Retournez-vous ! Exigea-t-elle. »

Allistair obéit mais son imagination suppléait largement à ce que ses yeux ne pouvaient voir. Il se représentait le tissu glissant sur la peau blanche de la fille avec un chuintement soyeux. Il déglutit péniblement en finissant d’enfiler son pantalon.

« Puis-je me retourner, maintenant ?

- Je suppose que oui. Chuchota la fille dans un souffle. »

Un peu nerveux, le prince lui fit face. La chemise qu’il lui avait prêtée lui arrivait à mi-cuisse, ce qui lui laissait tout loisir d’admirer ses jambes nues. Il n’eut aucun mal à prolonger mentalement la ligne de sa cuisse jusqu’à la rondeur de ses fesses... Son regard remonta lentement et s’arrêta sur sa poitrine dont les pointes roses tendaient le tissu... Résolument, il releva la tête pour découvrir son visage rougissant et deux immenses yeux noisette d’une douceur incroyable. Elle avait des cheveux châtains coupés au carré dans lesquels il mourrait d‘envie de passer les doigts. Elle dansa d’un pied sur l’autre, ne sachant quelle attitude adopter.

« Vous êtes très jolie. Affirma Allistair. Je n’ai aucune idée de ce qui a pu se passer, mais je suis heureux de vous avoir rencontrée. Je suis le prince Allistair de...

- Je sais. Je vous connais. Et vous me connaissez aussi.

- Je vous assure que non. Affirma le jeune homme. Si je vous avais déjà rencontrée, je m’en souviendrais certainement. »

Il rougit en réalisant l’aveu implicite contenu dans sa phrase. La jeune fille baissa les yeux mais un doux sourire étirait ses lèvres pleines.

« Pouvez-vous me dire comment vous êtes arrivée ici ? La dernière chose dont je me souvienne est d’avoir soigné mon raton laveur. Enfin, ce n’est pas MON raton laveur, mais il me tient souvent compagnie et je crois qu’il m’aime bien. Bref, ensuite j’avais prévu de le ramener chez nous, mais je me suis endormi sans comprendre pourquoi. Je le serrais contre moi, et... »

Le regard du prince se posa sur les mains de la jeune fille qu’elle essayait de cacher derrière son dos. Elles étaient rouges et couvertes d’écorchures. Un reste de bandage subsistait autour de son poignet... Et soudain il comprit !

« Capucin ? C’est toi ? Heu... Vous... C’est à dire...

- Oui, c’est moi. Confirma la jeune fille. Et je te remercie d’être venu à mon secours. Sans toi, je serais morte, ou entre les mains de la sorcière.

- De rien. C’était naturel. Mais... La sorcière Marlow t’a jeté un sort à toi aussi ? Pourquoi ?

- C’est une longue histoire. Et nous n’avons pas le temps. »

A ces mots, Allistair retrouva son esprit logique. Il prit la jeune fille par le bras et voulut l’entraîner avec lui.

« Nous allons rentrer à la chaumière et tu me raconteras tout.

- Non ! Protesta-t-elle. La sorcière est à ma recherche. Je dois me cacher.

- Tu seras en sécurité à la chaumière. Je ne laisserai pas Daniel ou la sorcière s’emparer de toi, tu peux me faire confiance.

- Je sais, mais... Je ne peux plus retourner là-bas. Je ne veux pas revoir ton cousin Anthony ! Je n’aime pas la façon qu’il a de me toucher. »

Elle semblait terriblement gênée. Allistair se souvint du nombre de fois où il s’était endormi en serrant Capucin contre lui. De toutes les fois où il l’avait caressé... Et il rougit aussi !

« Pourtant quand je te prenais sur mes genoux, tu... Tu ne m’as jamais mordu.

- Avec toi, c’est différent, avoua la jeune fille en rougissant. Tu es gentil... »

Le coeur du prince se mit à battre plus fort dans sa poitrine et il sourit. Sur une impulsion, il s’approcha et la prit dans ses bras. Elle se blottit contre lui et appuya la tête sur son épaule.

« Ma machine fonctionne parfaitement, en fin de compte. Affirma-t-il. Elle a trouvé la fille qui est parfaite pour moi. Même mes chemises te vont à ravir ! Maintenant que je te connais, je ne vais pas te laisser partir. Reste avec moi !

- Je ne peux pas. C’est trop dangereux. Mais je reviendrai, je te le promets. »

Elle se dégagea et s’éloigna en lui envoyant un baiser du bout des doigts.

« Attends ! La retint Allistair. Dis moi au moins ton nom. Je ne peux pas continuer à t’appeler Capucin !

- Patricia. Je m’appelle Patricia. »

Elle était sur le point de disparaître entre les arbres quand le jeune homme la rappela.

« Patricia ! Tu es vraiment très jolie avec cette chemise. Presque autant que sans ! »

Elle éclata d’un rire clair et s’enfonça dans la forêt. Resté seul, Allistair regarda une dernière fois autour de lui, puis reprit le chemin de sa chaumière le coeur léger. Patricia ! Le prénom chantait dans sa tête. Maintenant il ne lui restait plus qu’à la retrouver et à lui demander de l’épouser ! Et tout cela avant la pleine lune ! Mais quelque chose lui disait que la jeune fille ne serait jamais bien loin de lui et pour la première fois de sa vie, il laissa ses pensées vagabonder vers autre chose que les technologies modernes.


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 16:25     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 4




Le retour de Candy au château des Legrand ne passa pas inaperçu. Elle aurait préféré faire une entrée discrète par les communs, mais son magnifique destrier ne l’entendait pas de cette oreille. Il pénétra au petit trot dans la cour d’honneur. Ce fut aussitôt l’effervescence chez les domestiques ce qui attira l’attention de Mme Legrand et ses enfants. Elisa et Daniel se précipitèrent vers la jeune fille. Daniel s’empara des rênes tandis que Candy sautait légèrement à terre. Pendant que leur mère s’approchait d’un pas pressé tout en s’efforçant de paraître digne, Elisa pinça méchamment le bras de son souffre douleur.

« Si tu dis à Maman que nous sommes allés dans la forêt maudite, tu le regrettera, sale orpheline ! Menaça-t-elle.

- Candy ! S’exclamait Mme Legrand. Mais que vais-je faire de toi, mauvaise fille. Tu as disparu toute la nuit ! Où étais-tu ?

- Et où une orpheline comme elle a-t-elle trouvé un aussi splendide cheval. Renchérit Daniel. »

Le regard de Candy allait de l’un à l’autre, scrutant le visage méchant d’Elisa, la mine offusquée de sa mère et l’expression d’intense avidité dans les yeux de Daniel qui tenait toujours fermement le cheval. Elle ouvrit la bouche pour répondre, mais Mme Legrand ne la laissa pas s’exprimer.

« Non ! Ne dis rien ! Je préfère ne pas savoir. Quand une fille de ta condition disparaît toute une nuit et revient sur une monture de ce prix, il n’est pas bien difficile de deviner à quoi elle a été occupée. Mais je ne tolèrerais pas le scandale dans ma maison, petite dévergondée. Tu vas repartir à ton orphelinat avant d’attirer la honte sur ma maison.

- Mais je n’ai rien fait de mal, protesta Candy au bord des larmes. Je me suis perdue j’ai rencontré un homme...

- Je savais bien qu’il y avait un coquin dans cette histoire triompha Mme Legrand.

- C’était le Mage Albert, s’exclama Candy. Il m’a prêté ce cheval pour me ramener. D’ailleurs il faut le laisser partir pour qu’il retourne dans la... »

Elle se souvint de l’avertissement d’Elisa juste avant de parler de la forêt maudite et se reprit juste à temps.

« Pour qu’il retourne auprès de son maître, conclut-elle d’une toute petite voix. Ce n’est pas un vrai cheval de toute façon, c’est un...

- Le Mage Albert ! S’emporta sa maîtresse. Tout le monde sait que le Mage Albert a disparu depuis plus de quinze ans. Vous n’êtes qu’une menteuse, mademoiselle la dévergondée.

- Et il est hors de question de laisser partir dans la nature une bête aussi superbe, affirma Daniel. Nous allons le garder dans notre écurie.

- Mais il n’est pas à vous ! S’indigna Candy.

- Tu n’as qu’à dire à qui tu l’as volé, alors.

- Je n’ai rien volé ! Et je ne suis pas une menteuse. C’est le cheval du Mage Albert et il me l’a prêté !

- Dans ce cas, nous en prendrons soin jusqu’à ce que son maître vienne le réclamer, trancha Daniel. »

Mme Legrand, qui ne pouvait rien refuser à son fils lui sourit avec affection. Mais la jument blanche se mit à secouer vigoureusement la tête pour obliger Daniel à lâcher les rênes. Inquiet, Celui-ci s’empressa de les confier à un solide palefrenier et recula prudemment vers sa mère. Devant les sourires narquois des domestiques, il redressa le menton et ordonna qu’on conduise l’animal à l’écurie.

« Quand à toi, Candy, reprit Mme Legrand, disparais de ma vue ! Que je ne revois plus avant que cette histoire soit éclaircie, tu m’entends ? »

Pendant ce temps, le palefrenier essayait de maîtriser la jument qui renâclait et refusait de se laisser emmener. Elle poussa un hennissement sonore et se mit à ruer. Les Legrand jugèrent plus prudent de reculer de quelques pas.

« Que ce passe-t-il encore, demanda Mme Legrand.

- C’est la jument, Madame, expliqua l’homme qui faisait de son mieux pour maîtriser l’animal. On dirait qu’elle refuse d’obéir à quelqu'un d’autre que Candy ! »

Sarah Legrand se tourna vers sa domestique, irritée.

« Et bien qu’attends-tu, empotée ! Aide le et conduisez cette bête à l’écurie. »

La désagréable famille tourna les talons pour s’éloigner, mais la jument réussit à expédier une formidable ruade dans le postérieur de Daniel qui atterrit dans la poussière avec un grand cri. Tous les domestiques se mordaient la lèvre pour ne pas éclater de rire, trop contents de la mésaventure survenu à leur désagréable petit maître. Fou de rage, Daniel se releva et repartit vers le château en boitant. A peine eut-il disparu que le cheval se calma et suivit Candy jusqu’à l’écurie sans plus rechigner.

Le palefrenier l’installa dans une grande stalle propre et la débarrassa de son harnachement. Puis il sortit en annonçant qu’il allait lui chercher de l’eau et une ration d’avoine. A peine fut-il sorti, que la jument blanche se mit à trembler de tous ses membres. L’instant d’après, elle était redevenue le petit raton laveur qu’elle était le matin et sautait dans les bras de Candy. La jeune fille frotta sa joue contre la douce fourrure en riant.

« Tu as été formidable, lui dit-elle. Je te remercie pour ton aide, et aussi pour avoir envoyé ce méchant Daniel valser dans la poussière. Je suis sûre qu’il aura les marques de tes sabots sur les fesses pendant plusieurs jours ! Mais il vaut mieux que tu retournes dans la forêt maintenant. Tu y seras plus en sécurité que dans cette maison de fous ! »

Le raton laveur hocha vigoureusement la tête comme s’il comprenait et couina pour exprimer son accord. Il sauta des bras de Candy au moment où Daniel, toujours furieux rentrait dans l’écurie une cravache à la main.

« Je vais montrer à cette espèce de carne qui est le maître, moi ! Elle va tâter de ma cravache et... »

Il s’interrompit net constatant que la stalle était vide. Nulle part il n’y avait trace de la superbe jument.

« C’est toi qui l’a libérée ! Vociféra-t-il en s’en prenant à Candy.

- Je n’ai rien fait, le défia-t-elle. Je vous ai dit que c’était une jument magique. Elle est retournée dans la forêt, auprès de son maître.

- Je ne te crois pas ! C’est la plus belle bête que j’ai jamais vue et je la veux. Ramène- la !

- Elle n’est pas à vous de toute façon.

- Ça m’est égal ! Si tu ne la ramènes pas, c’est toi qui prendras sa place. »

Sans hésiter, il poussa Candy dans le box et referma la porte avec un rire mauvais.

« Tu va rester là ma belle ! A partir d’aujourd’hui tu dormiras dans l’écurie jusqu’à ce que le cheval soit revenu. Tu t’occuperas des chevaux et tu balayeras le crottin ! C’est un travail parfait pour une sale orpheline comme toi ! Je vais tout de suite en parler à Maman et je suis sûre qu’elle sera d’accord. »

Il sortit et Candy se laissa tomber dans la paille. Elle ne se faisait aucune illusion. Mme Legrand passait à ses enfants tous leurs caprices. Nul doute qu’elle cèderait aux exigences de Daniel. Il ne lui restait plus qu’à s’habituer à sa nouvelle condition. C’est ce qu’elle expliqua au palefrenier lorsqu’il revint avec son seau d’eau. Celui-ci la plaignit de tout son coeur, mais il ne pouvait rien faire contre la volonté des maîtres. Il s’arrangea pourtant pour lui aménager un coin aussi confortable que possible dans le fond de l’écurie et lui promit que tous les domestiques trouveraient un moyen de lui apporter de quoi adoucir son sort.

A partir de ce jour, Candy fut donc obligée de vivre dans l’écurie. Le gentil raton laveur passait parfois la voir dans l’après-midi et elle se demandait s’il était envoyé par le Mage Albert pour prendre de ses nouvelles. Hélas la petite bête ne pouvait pas lui répondre, et contrairement à sa promesse, le Mage n’avait pas reparu. Bien qu’elle soit très isolée dans son coin, l’avantage de son nouveau travail était qu’elle voyait beaucoup moins Daniel et Elisa Legrand, ce qui n’était pas pour déplaire à Candy. Elle s’accommoda donc de son sort sans se rendre compte qu’autour d’elle, bien d’autres choses changeaient.


-----oooOooo-----




Ce soir-là, ce furent quatre nains inquiets qui guettèrent le coucher du soleil. Silencieux, ils observaient l’astre lumineux qui disparaissait peu à peu derrière les montagnes tandis que l’ombre s’épaississait. Ils se demandaient ce qui allait se passer et si le mage leur avait dit la vérité.

Archibald fut le premier à réagir, avec un gémissement sourd, il tomba à genoux en se prenant la tête dans les mains. Son frère voulut se précipiter vers lui, mais ses jambes se dérobèrent sous lui et il tomba à son tour, bientôt imité par les deux autres. Ce fut comme si quelque chose explosait en eux. Ce n’était pas douloureux. C’était plutôt comme s’ils étaient obligés de fournir un effort physique intense. Leur vue se brouilla et ils gémirent de concert. Quand leur vision revint, ils se regardèrent, incrédules. Ils se reconnaissaient à peine. Depuis trois ans qu’ils étaient devenus des nains, leurs corps s’étaient développés sans qu’ils s’en rendent compte. Ils avaient grandi et leurs muscles s’étaient étoffés. Ils n’étaient plus des adolescents mais bien des hommes. Leurs vêtements n’avaient pas résisté à leur brusque croissance mais ils étaient tellement heureux d’avoir repris leur apparence normale qu’ils n’y prirent pas garde. Bientôt ils tombèrent dans les bras les uns des autres en se congratulant. D’un commun accord ils se précipitèrent vers la rivière pour contempler leur reflet dans l’eau miroitante et s’assurer qu’ils ne rêvaient pas. Archibald écrasa même discrètement une larme de joie en découvrant son visage d’ange aussi parfait qu’autrefois. Puis ils se précipitèrent dans l’eau où ils nagèrent et s’amusèrent comme des fous pendant plus d’une heure. Enfin le poids de leur responsabilité reprit le dessus sur leur joie. Allistair, son frère et Terry prirent le chemin du retour. Surpris de ne pas voir son cousin se joindre à eux, Archibald fit demi-tour. Il trouva Anthony assis en tailleur au bord de la rivière en train de contempler amoureusement son membre fièrement dressé dans sa main.

« Anthony, Bon sang ! Tu ne croix pas que nous avons plus important à faire ?

- Tu ne te rends pas compte ! Grogna Anthony. Trois ans que je suis transformé en nain. Comment être sûr que j’étais toujours opérationnel... Oh c’est formidable ! C’est trop bon... »

Archibald leva les yeux au ciel et ferma ses oreilles aux grognements de satisfaction émis par son cousin. Il rejoignit les deux autres et ils regagnèrent la chaumière où ils trouvèrent quatre chevaux qui les attendaient ainsi que des vêtements à leur taille, nouvelle largesse du Mage qui pensait décidément à tout. Anthony ne tarda pas à les retrouver, un sourire béat sur les lèvres. Il ne leur restait plus qu’à regagner leurs foyers afin de tenir leurs familles informées du nouveau tour pris par les événements. Les quatre jeunes gens se séparèrent sans manquer de se donner rendez-vous régulièrement à la cabane pour s’informer mutuellement du fruit de leurs recherches.


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L’émotion fut à son comble lorsque les trois princes regagnèrent le château. Tirée du sommeil par l’effervescence provoquée par leur retour, on dit que la terrible reine Elroy versa une larme de joie en découvrant ses petits-fils. Un conseil fut réuni aussitôt au cours duquel les jeunes gens expliquèrent ce qu’ils avaient appris. La reine dépêcha ses meilleurs archivistes à la bibliothèque du château avec ordre de découvrir tout ce qu’ils pourraient sur la prophétie et si possible, des indications sur les jeunes filles concernées. En attendant, elle promit à ses petits-fils de mettre à leur disposition tous les moyens nécessaires pour leur permettre de mener leur mission à bien.

Les choses de déroulèrent de manière quasiment identique au château de Granchester si ce n’est que la Duchesse Eléonore pleura sans retenue toute la nuit tant elle était heureuse de retrouver son fils chéri. Le Duc Richard était assez fin politique pour comprendre que malgré son désir de régner un jour sur le royaume de Lakewood, l’annihilation des pouvoirs de la sorcière était un enjeu bien trop important pour se permettre de passer à côté d’une telle chance. Il trouverait bien un autre moyen de s’emparer un jour de son voisin. Aussi fit-il une chose que personne n’aurait cru possible. Il envoya un message à sa voisine, la reine Elroy pour l’assurer de son soutient inconditionnel et lui promettre de lui faire part de tout ce qu’il pourrait découvrir de son côté.

L’euphorie des premières heures céda devant la dure réalité lorsque le soleil se leva et que les jeunes gens reprirent leur apparence de nains. Mais cette fois ils avaient tous les quatre le coeur rempli d’espoir et décidèrent de se lancer dans la quête de leurs promises sans attendre malgré le peu d’informations dont ils disposaient.

Bien sûr, toutes ces mesures furent prises dans la plus grande discrétion afin de ne pas attirer l’attention de la sorcière Marlow. Hélas ! Il était vain d’espérer que celle-ci ne se rende compte de rien. Dès que l’effet de ses maléfices fut annulé, elle ressentit un grand trouble dans son pouvoir. Il ne lui fallut pas longtemps pour comprendre ce qui se passait. Elle comprit aussi qu’une seule personne disposait d’une magie assez puissante pour contrebalancer les malédictions qu’elle avait lancées. Cela ne pouvait signifier qu’une chose : Le Mage Albert était de retour ! L’immonde Albert dont elle avait été secrètement amoureuse dans sa jeunesse et qui lui avait préférée une elfe de rien du tout ! Une créature éthérée qui vivait dans les bois, se roulait dans la mousse et se promenait à moitié nue ! Autant dire une moins que rien !

La sorcière entra dans une colère noire. Elle brisa la moitié des fioles de son laboratoire, faisant fuir ses serviteurs. Sa fille elle-même se faisait aussi petite que possible dans un coin de la pièce attendant que l’orage passe tandis que son malheureux derrière clignotait de terreur. Finalement, la sorcière se calma et se mit à échafauder un plan. Elle connaissait très bien la prophétie. Elle avait tout fait pour en faire disparaître toute trace mais rien ne disait qu’il n’en restait pas un exemplaire quelque part, à moins qu’un vieux fou ne s’en souvienne. De toute façon, le Mage Albert la connaissait. Sa meilleure option désormais était d’empêcher celle-ci de se réaliser. Et pour cela, il lui suffisait de faire disparaître les trois filles à marier, au moins jusqu’à la prochaine pleine lune. Ensuite, il serait trop tard pour inverser le cours des choses.

Elle savait où localiser l’une d’entre elle. La seconde ne devait pas être bien loin car elles étaient très liées autrefois. Mais la troisième lui posait un problème. Elle essayait de la trouver depuis plus de seize ans sans succès. Le Mage avait pris soin de la mettre en sécurité, mais maintenant qu’il était de retour... Qu’à cela ne tienne ! En surveillant le mage, elle finirait bien par localiser sa protégée. Voilà ce qu’il lui fallait : Des espions ! Des espions et des gens à sa botte pour accomplir les basses besognes. Et elle savait très bien à qui s’adresser. Un homme qui était près à tout pour protéger ses deux stupides rejetons.

Sa décision prise, elle se précipita vers la porte, persuadée que ses serviteurs terrorisés devaient se terrer dans le couloir, et l’ouvrit à la volée.

« Allez me chercher le Baron Legrand ! Hurla-t-elle. Qu’il soit là avant l’aube où il lui en cuira ! »


A suivre

view post Posted: 9/12/2021, 16:23     Candy Neige et le 4 nains - Les fanfictions de Noël

CHAPITRE 3




Le jeune Terrence Granchester avait toujours aimé l’équitation. Depuis son adolescence il avait l’habitude de faire de longues balades à cheval dès le matin. Mais depuis qu’il avait été frappé par la malédiction... Comment aurait-il fait désormais pour monter à cheval, à moins de disposer d’un escabeau ! Il avait donc remplacé sa chevauchée matinale par des promenades dans la forêt. Ce matin-là, en voyant que ses condisciples étaient toujours endormis, il était parti dès le lever du soleil. Il n’avait pas fermé l’oeil de la nuit, taraudé par trop de questions. Le mage Albert allait-il reprendre son rôle de protecteur du pays de Lakewood ? Arriverait-il à chasser la méchante sorcière Marlowe ? Pourrait-il annuler les diverses malédictions lancées pas la sorcière ? Et surtout, accepterait-il de faire quelque chose pour lui, Terrence ? Après tout, le duché de Granchester et le royaume de Lakewood étaient rivaux depuis des siècles. La priorité du mage irait d’abord vers les trois princes héritiers. S’il refusait de l’aider à cause de l’animosité qu’il éprouvait envers le Duc Richard, alors Terry n’aurait d’autre solution que de céder aux exigences de Susanna, la fille et apprentie de la sorcière Marlow. Cette idée le faisait frémir, mais il avait décelé une telle bonté dans le regard du mage, qu’il espérait de tout son coeur ne pas en être réduit à cette extrémité.

Il en était là de ses réflexions quand au détour du sentier qui le ramenait à la chaumière, il se trouva nez à nez avec la jolie Candy. Aussi surpris l’un que l’autre, ils restèrent un long moment à se dévisager sans un mot. Terry n’avait pas eu le temps de bien la regarder la veille, mais dans lumière du matin, elle lui sembla encore plus jolie que dans son souvenir. Son visage était constellé de taches de rousseur qui lui donnaient un air mutin. Son opulente chevelure blonde et bouclée le fascinait et il mourait d’envie d’y glisser les doigts pour vérifier si elle était aussi douce qu’elle en avait l’air. Mais le plus frappant étaient les magnifiques yeux qu’elle posait sur lui. Plus verts que la forêt, plus brillants que la plus pure des émeraude. Des yeux où il aurait pu se noyer avec bonheur. Soudain elle lui sourit timidement et ce sourire illumina son visage. Elle n’était plus jolie, elle était magnifique ! Une douce chaleur s’insinua dans les veines de Terry comme si le soleil venait juste de se lever. Il remarqua alors qu’elle s’était assise sur une souche pour être à sa hauteur et la réalité de sa condition lui revint en mémoire. Les filles comme elles n’éprouvaient pas de sentiments pour les nains comme lui ! Et s’il retrouvait son apparence normale, c’est qu’il aurait épousé Susanna. Dans un cas comme dans l’autre, cette fille n’était pas pour lui. De plus elle était la protégée du mage Albert, le seul homme sur cette terre qui puisse peut-être faire quelque chose pour lui. Il fronça les sourcils, ce qui lui donna l’air plus grincheux que jamais.

« Que faites vous là ? Demanda-t-il sèchement.

- Je suis désolée. Je ne voulais pas vous déranger...

- Vous ne me dérangez pas, mais le mage a dit que vous deviez l’attendre. Il ne faut pas vous aventurer dans la forêt. Elle peut être dangereuse quand on ne la connaît pas.

- Oh, je serais bien incapable de retrouver mon chemin toute seule, s’exclama Candy. Mais vos amis dorment encore et je cherchais un endroit où j’aurais pu faire un brin de toilette.

- Ah... Excusez-moi, j’aurais dû y penser. Il y a une crique pas très loin, je vais vous montrer. »

La jeune fille se leva pour le suivre en prenant bien soin de régler son pas sur celui de son petit compagnon pour ne pas le distancer, ce qui agaça Terry. A l’époque où il était encore le fier héritier du Duc de Granchester, c’était lui qui devait veiller à ce genre de chose. Mais la prévenance de Candy était si naturelle et si spontanée qu’il n’arrivait pas à lui en vouloir. Après quelques centaines de mètres, ils arrivèrent à une charmante clairière abritée des regards par de grands saules. La rivière formait une anse calme et transparente où il était même possible de se baigner.

« Quel endroit magnifique ! S’exclama Candy. Pourquoi appelle-t-on cette forêt la « Forêt Maudite » ? Elle est si paisible !

- Les noms ne veulent pas toujours dire quelque chose, répondit Terry en haussant les épaules. Cette forêt recèle plus de mystères que vous ne le soupçonnez. Mieux vaut ne pas vous y aventurer seule.

- Je peux vous promettre que je ne m’y risquerais pas ! Si Daniel et Elisa Legrand ne m’avaient pas obligée à les suivre, jamais je n’y aurais mis les pieds. Elle est bien trop proche du Duché de Granchester !

- Pourquoi dites-vous cela ? Demanda Terry, intrigué.

- A l’orphelinat, on nous racontait que les sujets du Duc traversent parfois la frontière pour venir enlever des enfants de Lakewood. Ensuite ils les réduisent en esclavage et ils doivent servir le Duc et sa famille qui sont des tyrans !

- C’est de la foutaise ! Protesta Terry, indigné qu’on puisse faire courir des bruits aussi stupide sur son pays. Les habitants du duché sont exactement comme ceux de Lakewood, de braves gens sous la coupe de la Sorcière Marlow. »

Il s’était redressé de toute sa petite taille et semblait sur le point de pourfendre la sorcière à lui tout seul. Il y avait tant de coeur dans ce qu’il disait que Candy s’en étonna.

- Vous ne vous appelez pas réellement Grincheux, n’est-ce pas ? Demanda Candy avec curiosité. »

Ce n’était pas vraiment une question et le nain ne jugea pas utile de répondre. Devant son silence elle insista.

« Me direz-vous votre vrai nom, un jour ?

- Je ne crois pas que ce soit une bonne idée, répondit Terry en se souvenant de sa réflexion à propos des Granchester. Vous allez bientôt rentrer chez vous et nous n’aurons sans doute plus l’occasion de nous rencontrer.

- Ce n’est pas tout à fait « chez moi », vous savez. C’est juste l’endroit où je travaille. Mais j’espère bien qu’un jour j’aurai une maison à moi.

- Je croyais que toutes les filles rêvaient de rencontrer un prince et de vivre dans un château.

- Qu’est-ce que j’irais faire dans un château, rit Candy. Et les princes ne regardent pas les orphelines comme moi, ajouta-t-elle en rougissant. Tout ce que je demande, c’est de vivre dans une maison où je serais chez moi, avec quelqu’un de gentil qui me prendrait dans ses bras le soir et où nous pourrions élever nos enfants. Vous me trouvez idiote ?

- Non jolie Candy. Je pense seulement que vous avez des rêves faciles à réaliser. J’aimerais bien que ma vie soit aussi simple que la vôtre. Je vais vous laisser. Vous n’aurez qu’à suivre le chemin pour revenir à la chaumière. Ne traînez pas. »

Sur ces mots, il tourna les talons et disparut derrière les arbres. Oui, il aurait bien aimé avoir une vie comme celle que Candy décrivait plutôt que de crouler sous les responsabilités qui étaient les siennes. Hélas, sa maison à lui était un château et la seule femme qu’il tiendrait dans ses bras était la fille d’une sorcière qui suivrait sans doute les traces de sa mère !

Les autres nains étaient réveillés et en arrivant à la chaumière, Terry trouva Allistair et Archibald attablés devant un solide petit déjeuner. Il s’installa avec eux et prit une tasse de thé.

« J’ai dormi comme une bûche, constata Allistair. Cette fille est une perle ! Elle était déjà partie quand nous nous sommes réveillés, mais elle avait préparé le petit-déjeuner. Le mage est venu la chercher ?

- Non pas encore, répondit Terry. Elle voulait se débarbouiller et je l’ai emmenée à la crique. Au fait, où est votre cousin, le prince des joli-coeurs ?

- Sais pas ! Marmonna Archibald la bouche pleine. Il n’était pas là quand on s’est réveillés. »

Terry lâcha un juron et se précipita vers la rivière aussi vite qu’il le put. Bon sang ! Si cet obsédé du pelotage avait osé importuner Candy... Il ne tarda pas à le trouver, allongé dans les fourrés qui bordaient la clairière, les yeux écarquillés et rivés sur la crique. Il l’attrapa prestement par la veste pour le tirer en arrière.

« Espèce de cochon ! Laisse-la tranquille ! Siffla Terry entre ses dents sans élever la voix de peur d’attirer l’attention de la jeune fille.

- Hé ! Doucement vieux ! Je ne faisais que regarder. Et le spectacle en vaut la peine. Elle prend un bain... Ajouta Anthony d’un air rêveur. »

Malgré lui, Terry ne put s’empêcher de jeter un coup d’oeil vers la rivière où il aperçut Candy en train de nager dans l’eau calme. Il détourna promptement le regard en constatant qu’elle ne portait rien sur elle.

« Tu ne penses donc qu’à ça ! Grogna-t-il en essayant d’entraîner son compère loin d’ici.

- Dis donc Monsieur le fils de Duc, ne joue pas les donneurs de leçon avec moi ! A ce qu’on dit, tu ne crachais pas non plus sur la bagatelle avant que la sorcière ne s’occupe de toi. Te rends-tu compte depuis quand nous n’avons pas vu une fille sans ses vêtements ?

- Depuis à peu près aussi longtemps qu’on n’en a plus touché. Mais celle-là, pas question que tu poses tes sales pattes dessus !

- Et pourquoi ? Tu veux la garder pour toi ?

- Parce qu’elle est protégée par le mage Albert, voilà pourquoi.

- Tu dis cela, mais si tu pouvais, je suis sûr que ne dirais pas non à un petit interlude dans la mousse des sous-bois avec elle !

- Arrête de dire n’importe quoi, riposta Terry dont les joues s’empourprèrent à l’évocation d’Anthony. Retournons à la chaumière avant qu’elle nous voie.

- Non ! Juste une minute encore ! Elle va sortir... Je ne l’ai vue que de dos quand elle est entrée dans l’eau mais je peux te dire qu’elle a une de ces chutes de reins... Je veux savoir si l’endroit vaut l’envers. Elle doit avoir des seins à damner un saint... »

C’en était trop pour Terry qui plaqua sa main sur la bouche de l’autre pour le faire taire et l’entraîna sans ménagement vers la maisonnette tant ses forces étaient décuplées par la rage. Anthony résistait et Terry espérait que leur remue-ménage n’alerterait pas Candy. Leurs deux amis sortirent de la maison pour les accueillir quand ils arrivèrent, au moment même où le Mage Albert faisait son apparition au détour d’un chemin. Il observa les quatre nains en fronçant les sourcils comme s’il pouvait lire dans leurs pensées, mais ne dit rien. Puis il s’assit sur le banc devant l’entrée et attendit. Quelques minutes plus tard, Candy remontait le sentier, suivie d’un petit animal qui bondissait derrière elle. Albert l’accueillit avec un sourire.

« Bonjour Candy. Qui nous amenez-vous là ?

- C’est un raton laveur. J’ai entendu du bruit dans les buissons. J’ai eu peur un instant, mais ce n’était que cette adorable petite bête. Depuis, elle ne me quitte plus. »

Terry et Anthony échangèrent un regard qui en disait long et qui n’échappa pas au Mage, mais celui-ci ne fit aucune réflexion.

« Voilà qui va m’être bien utile, dit-il en prenant la bestiole dans ses bras. Dites-moi, ma chère, demanda-t-il au raton laveur; accepteriez-vous de m’aider à ramener Candy au manoir des Legrand ? »

L’animal hocha vigoureusement la tête, comme s’il comprenait ce qu’on lui disait. Albert le posa sur le sol et sortit sa baguette magique de ses amples manches. Une incantation plus tard, le rongeur se transformait en une magnifique jument à la robe immaculée et aux yeux cerclés de noir. Le mage aida Candy à se mettre en selle.

« Dans moins d’une heure, vous serez rentrée. Ne vous inquiétez pas, elle connaît parfaitement la route et reviendra toute seule ici, précisa-t-il en flattant l‘encolure de la jument. Restez au manoir. Je vous y rendrai visite bientôt.

- Je n’ai pas le droit d’avoir des invités, avoua Candy.

- Mais je ne suis pas n’importe quel invité. Si je veux vous voir, rien ne m’en empêchera. Rentrez maintenant. »

La jeune fille fit un signe d’adieu aux quatre nains et se laissa emporter au pas tranquille de son cheval. Quand elle eut disparu, Albert se tourna vers eux.

« Et maintenant, à nous cinq, jeunes gens. Il est temps que vous vous montriez dignes de vos titres de princes. »

Intrigués, les trois petits-fils de la reine Elroy se groupèrent autour de lui. Seul Terry resta en retrait. Après tout, en tant que fils de Duc, il ne pouvait prétendre au titre de Prince. Il n'en écoutât pourtant pas moins attentivement que ses amis.

« J’ai interrogé de nombreuses personnes, ces dernières heures; commença le mage. Elles m’ont toutes parlé de la prophétie, tout comme vous. Et elles sont toutes persuadées que les malédictions qui frappent le pays seront levées dès que la fille de la sorcière se mariera. Après avoir fait des recherches, je dois reconnaître que c’est la vérité. »

La déception des nains était visible. Ils avaient tant espéré du retour d’Albert. Dans son coin, Terry poussa un profond soupir et se prit la tête entre les mains.

« Nous en sommes donc exactement au même point, conclut-il. Il ne me reste qu’à épouser l’apprentie sorcière.

- Malheureusement, renchérit Albert. La Sorcière Marlow lèvera alors toutes les malédictions qu’elle a jetées sur le pays de Lakewood et sur le duché de Granchester. Mais cela ne règlera pas vraiment le problème. Vous resterez toujours sous sa coupe. Qui peut dire si elle ne recommencera pas bientôt ? Elle sera une menace permanente à planer sur vos têtes. Voilà pourquoi ce n’est pas la bonne solution.

- Mais il n’y en a pas d’autre, remarqua Allistair.

- J’ai dit que c’était la solution la plus évidente, dit Albert. Je n’ai pas dit que c’était la seule... Sinon, pourquoi aurais-je évoqué votre qualité de princes héritiers ? Vous attendez tous que votre ami Terry vous tire d’embarras parce que la jeune Susanna a jeté son dévolu sur lui. Baisser ainsi les bras devant l’adversité n’est pas digne de votre rang. Une telle lâcheté justifierait à elle seule que vous soyez écartés du trône.

- Vous voulez dire qu’il y aurait un autre moyen ? Demanda Anthony. Que je pourrais garder le trône ? Mais comment ?

- Pour tout vous expliquer, il faut remonter très loin en arrière. Je dois vous dire que la Sorcière a complètement déformé la prophétie originale pour n’en garder que ce qui l’arrange. Cette prophétie est très ancienne. Je le sais, j’étais là quand elle a été révélée. Mais ce qu’elle disait à l’origine est très différent de la version qui s’est transmise au fil des années. Dans sa première version, elle disait que le pays de Lakewood traverserait de graves difficultés et serait confronté à de terribles dangers. Pourtant, le salut arriverait, non par l’intermédiaire d’une jeune fille, mais bien de trois. L’une rapporterait la sagesse, l’autre la beauté et la troisième la joie de vivre. Par l’amour qu’elles porteraient aux princes du royaume, elles étendraient leur protection sur le pays qui vivrait de longues années de prospérité et de paix.

- Trois filles, marmonna Anthony.

- Et trois princes héritiers, renchérit Allistair.

- Et beaucoup d’amour, conclut Albert. N’oubliez jamais l’amour.

- Vous voulez dire qu’elles doivent tomber amoureuses de nous ? Demanda Archibald.

- L’amour doit être réciproque, mon jeune ami expliqua calmement Albert. A sens unique, il ne mène nulle part.

- Mais je n’ai jamais été amoureux ! S’exclama le malheureux en redressant la plume de paon de son bonnet.

- C’est ce que j’ai appris, en effet, et c’est bien triste pour vous. Votre frère aîné de pense qu’à se plonger dans les livres, et vous à remplir vos placards de vêtements que vous ne portez qu’une fois ! Quand au premier dans l’ordre de succession, c’est tout le contraire : Il a un coeur d’artichaut et court après tous les jupons qui passent ! Jupons qui d’après les rumeurs se laissent facilement rattraper ! Rien d’étonnant à ce qu’aucun d’entre vous n’ai rencontré l’amour véritable. Je me demande s’il ne vaudrait pas mieux s’en tenir à la solution « Susanna ».

- Mais ces filles, où sont elles ? Demanda Allistair. Comment les trouver ?

- C’est là le problème, soupira le mage. Elles ont disparu. Je soupçonne la Marlow d’y être pour quelque chose, bien que je n’ai aucune preuve, car elle sait que si la prophétie se réalise, elle perdra tous ses pouvoirs. Mais si elles vous sont destinées, le destin devrait vous guider vers elles. L’amour peut faire des miracles...

- Bof ! S’exclama Anthony. Je ne crois pas à toutes ces histoires. L’amour ne peut pas durer toute une vie. Il y a bien trop de jolies filles sur terre pour qu’on s’attache à une seule.

- Tu laisserais passer ta chance de monter sur le trône ! Protesta Archibald. Et bien pas moi ! Je dis qu’il faut trouver ces filles et...

- Et quoi ? Rigola son cousin. Regarde nous : Tu crois vraiment qu’une fille pourrait tomber amoureuse de nous avec la dégaine que nous avons ? Nous sommes difformes et ridicules mon pauvre vieux. Si c’est pour plaire à des filles dans le même état, merci bien ! »

Le ton était vite monté. Le Mage Albert observait ses protégés sans rien dire. Dans son coin, Terry regardait le prince Anthony avec une moue désapprobatrice. Allistair s’interposa et essaya de calmer son frère et son cousin, puis il se tourna vers le mage.

« Anthony n’a pas tout à fait tord, Mage Albert. Maintenant que vous nous avez expliqué ce qu’était réellement la prophétie, je comprends mieux pourquoi la sorcière nous a infligé ce sort. Elle réduisait ainsi les chances que la prophétie se réalise. Pour être franc, je ne connais pas grand-chose aux filles, mais s’il existe dans le pays une jeune personne qui m’est destinée, je suis prêt à tout mettre en oeuvre pour la trouver. Pourtant la réflexion d‘Anthony n‘est pas dénuée de bon sens, notre apparence risque d’être un obstacle. Ne pouvez-vous rien faire pour y remédier ? »

Le Mage Albert secoua la tête, visiblement désolé.

« Hélas, il est très difficile d’annuler un sort qui a été jeté par un autre. Et la sorcière Marlow est devenue très puissante.

- Mais vous l’êtes plus qu’elle !

- Je vous remercie de votre confiance, Archibald. Je suis puissant, mais pas à ce point là. Cependant... »

Toutes les têtes se tournèrent vers lui et le mage sourit avant de reprendre.

« J’ai quand même les moyens d’atténuer les effets des malédictions qu‘elle a jetées. Je suis d’ailleurs assez content de lui montrer que je suis de retour. A partir d’aujourd’hui, tous les sorts jetés par la Sorcières disparaîtront au coucher du soleil. Mais attention ! Dès l’aurore, ils reprendront vigueur !

- C’est à dire que nous retrouverons notre apparence normale chaque nuit ?

- Exactement, mon jeune Allistair. A vous de faire bon usage de cet avantage. Vous devez trouver vos promises.

- Et si nous ne les trouvons pas ?

- Dans ce cas, il restera toujours la solution de ce bon vieux Granchester ! Intervint Terry d’un ton désabusé. On l’enverra dans le lit de l’apprentie sorcière ! Il est assez bon pour cela ! »

Tous les regards se tournèrent vers celui qu’ils avaient oublié. Les sourcils froncés, Albert s’adressa à lui.

« Pourquoi ce ton aigri, Terrence ?

- Parce que vos largesses pour les héritiers de Lakewood sont bien sympathiques, mais que comptez vous faire pour mon pays ? Vous allez nous laisser nous débrouiller ?

- Ai-je jamais dit cela ? Demanda Albert en plissant les yeux. J’aurais dû être plus précis, sans doute, mais pour moi cela était évident. Le Duché de Granchester bénéficiera de ma protection au même titre que le pays de Lakewood, bien sûr. »

Terry n’arrivait pas à croire ce qu’il entendait. Les mains tremblantes il dut se retenir au mur de la chaumière pour ne pas s’écrouler.

« Vous voulez dire que moi aussi, ce soir...

- J’ai dit tous les sorts, affirma Albert, et je ne reviendrais pas sur ma parole.

- Et que comptes-tu faire quand tu seras redevenu tel que tu étais ? Demanda Anthony méchamment. Profiter de tes derniers jours de célibataire ?

- Je crois surtout que je devrais vous donner un coup de main à tous les trois. Je me demande comment trois filles sensées pourraient tomber amoureuses de trois incapables comme vous ! Et si c’est ma seule chance d’échapper à un mariage avec Susanna, je suis prêt à tout faire pour que vous paraissiez sous votre meilleur jour.

- Hé ! Attendez ! Protesta Anthony. Mais vous avez parlé de trois filles ! Vous voulez dire qu'il suffira que nous nous mariions tous les trois pour que tout rentre dans l'ordre ?

- J’ai aussi dit qu’il fallait qu’elles tombent amoureuses. A vous de jouer, Messieurs. Mais ne traînez pas trop. Le charme que j’ai jeté n’agira que jusqu'à la prochaine pleine lune. Passé ce délai, il sera trop tard pour conjurer le sort.

- Un mois ! Allistair était perplexe. J’imagine mal que quelque chose d’aussi compliqué que l’amour puisse se développer en un mois...

- Il suffit parfois d’un seul instant, répondit le Mage en riant devant la naïveté de la remarque. Faites-moi confiance, je sais de quoi je parle ! »

Puis il disparut dans un nuage de fumée en laissant derrière lui quatre nains perplexes mais pleins d’espoir.


A suivre

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