Chapitre 23
- Moi j’ai quelque chose à dire qui pourra empêcher ce mariage de pacotille. Je pense que ce que je vais révéler va faire réfléchir la mariée si tant est qu’elle soit un peu sensée. Mon oncle ici présent William Albert André a voulu épouser il y a quelque temps sa fille adoptive Candy ici présente également. Ayant contracté une maladie grave, il a pu être sauvé grâce à une greffe de moelle osseuse du fils de Candy. Connaissant les règles de la génétique, si on est un peu intelligent, il n’est pas difficile de comprendre comment cet enfant a pu être compatible avec mon oncle et il est donc de mon devoir d’en informer la future épouse pour qu’elle prenne sa décision d’épouser ou non cet homme en toute connaissance de cause.
Son venin déversé, la perfide rousse , le menton levé et un sourire narquois sur les lèvres attendait la réaction des personnes réunies et plus particulièrement de Florence qui s’était figée et dont le regard s’était d’abord porté sur Candy puis chercha un soutien vers Albert.
Celui-ci lui pris la main pour la rassurer et sans la lâcher se tourna vers l’intruse, la foudroyant du regard.
Elisa sentit des frissons la traverser comme si une arme invisible l’avait touchée. Le sourire vainqueur qu’elle arborait se transforma en un rictus de dépit mélangé à de la peur quand la colère de William se déchaina.La grande tante n’avait pas été prévenue de l’esclandre qu’Elisa projetait de faire sans quoi elle s’y serait opposée craignant le pire en voyant la détermination du chef de famille quand il réagit aux insinuations malsaines d’Elisa Legrand.
- Je savais pourquoi je ne voulais pas la présence des Legrand à mon mariage car la mesquinerie et la jalousie qui vous ont toujours animés n’ont pas leur place ici et en ce jour. Vos propos mensongers sont une insulte envers moi-même mais aussi envers Candy ce que je ne peux tolérer. Afin de réfuter à jamais tout doute ou élucubration non fondés , il est temps de révéler à chacun les raisons qui ont pu rendre possible la compatibilité de l’enfant de Candy et Terry avec moi. Ce n’est nullement parce qu’il est mon fils comme tu sembles le sous entendre mais parce qu’il est mon petit neveu du fait que Candy est ma nièce, la fille de Rosemary, ma sœur bienaimée. Ce fait n’a été porté à ma connaissance que récemment et il ne m’avait pas semblé opportun ni indispensable d’en faire état puisque par l’adoption de Candy, les choses étaient rentrées dans l’ordre.
Tout en prononçant ces paroles il tourna son regard vers Candy dont les couleurs avaient quitté le visage et que Terry avait pris par le bras pour la soutenir. Voyant que Terry empêchait celle-ci de défaillir et que Florence bien que perturbée par l’intervention d’Elisa mais plutôt rassurée par ses paroles attendait la poursuite de la cérémonie laissée en suspens, il se concentra de nouveau sur Elisa qui avait réalisé qu’elle venait de se ridiculiser et risquait sa tête.
La colère du chef de famille avait atteint son paroxysme et il explosa.
- Cette fois les bornes ont été dépassées, je renie la famille Legrand qui n’aura plus aucun lien avec la famille André ni privilège de la famille, je confisque tous vos biens et ce dès aujourd’hui ; vous avez une semaine pour quitter les propriétés qui vous étaient allouées. Je ne veux plus jamais entendre parler de vous et que jamais vous ne croisiez la vie de Candy et sa famille ni la mienne ; Et maintenant je te prie de sortir Elisa !
Comme celle-ci ne bougeait pas, abasourdie et tremblante de ce qu’elle venait d entendre Albert montra la porte du doigt en répétant l’ordre d’une voix froide :
- Dehors !
Sa nièce s’enfuit en courant et la porte claqua de nouveau laissant place au silence.
- Je suis désolé de cet intermède désagréable, je souhaiterais si vous le voulez bien poursuivre la cérémonie.
J'imagine que nous reparlerons de la révélation faite mais plus tard.
Il avait dit cela en regardant Candy qui avait repris une contenance mais que d’interrogations lui traversaient l’esprit.
Les échanges de consentements, les vœux furent prononcés dans l’émotion et les deux jeunes gens se passèrent mutuellement les anneaux aux doigts scellant l’engagement des deux époux : Albert un simple anneau d’or tandis que celui de Florence était serti de diamants.
Lorsque le mariage fut terminé, les registres signés, Albert s’adressa au prêtre qui avait officié pour lui faire une requête.
- Mon père pourrions nous emprunter votre sacristie un instant je vous prie.
Le prêtre ayant accordé la permission, Albert entraîna Candy dans une petite pièce sur le côté du cœur et ferma la porte.
- Candy je suis vraiment désolé que tu aies appris cela de cette façon. Comment te sens-tu ?
- J’ai l’impression que le ciel m’est tombé sur la tête. J’ai l’impression d’avoir été trahie deux fois : quand on m a abandonnée on n a pas voulu de moi, on m’a rejetée puis j’ai été adoptée je pensais avoir trouvé une famille dans laquelle et par laquelle j’aurai du être intégrée et je m’aperçois que je suis rejetée une seconde fois par cette même famille, par les propos et les bassesses d’Elisa comme si je n’étais toujours pas digne d’en faire partie.
- Ne crois pas cela, au contraire, ce sont les autres qui par leurs mesquineries et leur jalousie doivent être exclus. Ils ne te nuiront plus maintenant.
- Albert j’ai besoin d’avoir des réponses… Tout d’abord, quand et comment l’as-tu appris ?
- Juste avant de partir pour l’Afrique ; Elroy me l’a appris quand je suis allé l’informer de mon intention de t’épouser.
- Alors c’est donc pour cela que tu as renoncé.
- Non pas seulement et pas tout de suite mais comme je te l’ai dit lorsque je me suis réveillé à l’hôpital, je me suis rendu compte que tu aimais Terry et que ta place était auprès de ton enfant et de son père malgré la douleur que j’avais à te perdre.
- Mais tu ne me perdais pas vraiment.
- Avec le recul, je me rends compte que ta ressemblance avec ta mère a certainement influencé l’attirance inconsciente que j’avais pour toi. Et comme je l’ai dit à Florence qui par certains aspects de sa personnalité te ressemble, c’est vraissemblablement ce qui m’attire chez une femme, mon idéal en quelque sorte.
- Je comprends mais pourquoi ne m’en as-tu pas parlé avant depuis ton retour ?
- Par lâcheté peut être, je ne savais pas comment te l’annoncer et du fait de l’adoption, j’avais rétabli l’injustice dont tu avais été victime et j’ai pensé que cela n’avait pas vraiment d’importance. En tout cas je te présente des excuses au nom de la grande tante.
- Ce n’est pas à toi de t’excuser Albert.
- En tant que chef de la famille, je suis responsable et heureusement que sans le vouloir, je t’ai rendu en partie la vie que tu aurais du avoir.
- Et mon père ?
- La grande tante ne m’a rien dit à son sujet. Candy, si tu veux bien on va rejoindre les autres, Florence doit s’impatienter.
Celle-ci discutait avec sa sœur et son beau frère.
Tandis que Georges se tenait près de la porte et interrogea Albert du regard, celui-ci comprit et répondit d’un signe imperceptible négativement à l’interrogation muette de l’homme de confiance de la famille André, lui indiquant qu’il n’avait rien dit du lien qui l’unissait à Candy. Celui-ci ne souhaitait pas rajouter du trouble dans la famille de Candy ni dans la famille André et avait décidé d’emporter son secret avec lui sachant pouvoir compter sur la discrétion de son protégé.
Florence, elle, était désolée de voir combien Candy semblait affectée par ces révélations et à leur retour elle lui adressa un sourire témoignant de son empathie sans intervenir directement n’étant somme toute que depuis peu en relation avec la famille de son mari.
Elle eut par ailleurs l’occasion de s’entretenir avec Albert.
- J’espère que tu ne m’en veux pas de t’avoir abandonnée ces quelques instants pour parler à Candy et que tu n’es pas offusquée par tout cela ma chérie.Je suis désolé de t’avoir imposé cela le jour de notre mariage. Cela a au moins le mérite de te rassurer définitivement sur tes interrogations légitimes quant à la paternité du fils de Candy ; je n’avais pas été au bout de mes explications l’autre jour car je ne voulais pas te révéler ce dont Candy elle-même n’était pas au courant .
- Je comprends, ne t’inquiète pas, tout va bien pour moi. J’espère seulement que Candy n’est pas trop chamboulée d’avoir appris ses origines devant tout le monde et dans ces circonstances.
Terry et Candy avaient eux aussi parlé durant le trajet en cortège derrière la voiture des mariés.
- Ca va Candy ?
- Oh Terry je ne sais plus où j’en suis, cela me fait tout drôle de me retrouver être la nièce d’Albert et non plus sa fille adoptive. Et puis de savoir que ma famille adoptive est en réalité ma vraie famille, j’aurais du être heureuse et je n’arrive pas l’être et à réaliser.
- Tout cela est nouveau pour toi et la brutalité de cette révélation n’est pas faite pour digérer cette nouvelle mais finalement l’essentiel est que tu sois à ta place.
- Sans doute tu as raison. Bon, cette journée est celle d’Albert et Florence avant tout.
Ils arrivaient au manoir où avaient été dressées toutes les choses nécessaires au déroulement de la réception, banquet, tables joliment décorées, fleurs, musique.
Ils se retrouvèrent sur la terrasse, dans les jardins dans lesquels avaient été installées des auvents de toile pour abriter les tables du soleil ; une originale décoration de fleurs odorantes enjolivait les lieux et des mets raffinés en abondance étaient présentés en buffet de même que diverses boissons étaient proposées aux invités.
La grande tante mise à l’écart non pas volontairement mais de fait puisqu’elle n’avait pas les Legrand à ses côtés, se trouvait assise seule près d’une fenêtre du salon. Elle interpela une domestique qui passait parmi les invités avec un plateau chargé de petits fours et autres amuse-bouche et la pria de quérir Candy.
Celle-ci s’empressa de transmettre le message et Candy accéda à la volonté de la doyenne.
- Vous voulez me voir Grande Tante ?
- Oui Candy, je voulais te parler après les révélations de William. Je devrais être en colère mais non, je crois que cela a soulagé ma conscience. Je regrette que cela ait été fait de cette façon mais ce qui est fait est fait.
- Pourquoi m’avoir rendu la vie si difficile après l’adoption ? Cela rétablissait les choses, apaisait votre conscience sans que personne ne sache la vérité.
- Lorsque je me suis résolue à confier ce secret à William, c’était pour le dissuader de t’épouser mais il n’a pas renoncé à ce moment là puis je ne sais pas ce qui l’a finalement fait changer d’avis heureusement. Depuis ton adoption, William a complètement changé et je t’en ai voulu en plus du fait que je te rendais responsable de la mort de ta mère.
- Responsable de la mort de ma mère !? Mais je n’ai pas demandé à venir au monde ni à être abandonnée ! Ne croyez vous pas que je suis une victime ?
- La grossesse trop avancée quand elle m’a été révélée a dû être menée à son terme dans le plus grand secret. Après la naissance, je me suis vu contrainte de ne pas te garder et tu as été confiée à la maison Pony. Puis ta mère s’est laissée glisser petit à petit refusant de s’alimenter. Une sorte d’ anorexie mentale et elle a fini par mourir au bout de deux ans. Son mari est mort peu après dans un attentat au Mexique lors d’un voyage dans nos exploitations. Quand William a décidé de t’adopter, Ta provenance de la maison Pony et ta ressemblance avec Rosemary ne pouvait me laisser aucun doute et je t’en voulais d’être vivante alors qu’elle était morte ; je l’aimais tant. Mais tout doit avoir une raison puisque c’est grâce à ton fils que William a pu être sauvé. De cela je dois te remercier. Car quoiqu’il en pense, je n’ai toujours fait que veiller aux intérêts des André. Je me suis sacrifiée pour me consacrer aux responsabilités d’élever tous les jeunes de cette famille.
- Ma tante, je regrette que vous ayez reporté sur moi les remords de votre conscience ;
- Je suis une vieille femme maintenant et je suis lasse.
- J’ai encore une question pour vous. Savez-vous qui est mon père ?
- Je n’ai jamais réussi à lui faire avouer le nom de ton géniteur.
- Mais n’avez-vous aucun soupçon ?
- J’ai réfléchi à maintes reprises et n’ai pas trouvé de réponse plausible à cette question.
-Bien ma tante. Candy était déçue mais réagit positivement en se résignant.
Albert, prévenu par Terry qui craignait que sa femme soit malmenée psychologiquement, arriva auprès des deux femmes qui en avaient fini.
- Candy ça va ? Ma tante, pourquoi tourmenter Candy, elle a eu assez d’émotions pour aujourd’hui !
- Albert, tout va bien nous avons parlé avec la grande tante et j’allais vous rejoindre, regagnons la cérémonie.
- Ma tante, pourquoi rester seule ici alors qu’il ya des endroits ombragés là où a lieu la fête.
- Je suis bien ici merci.
- Comme vous voulez.
Candy et lui rejoignirent les autres et les festivités se poursuivirent simplement.
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Quinze jours plus tard eut lieu les mariages des frères Cornwell et l’émotion et la joie furent au rendez vous.
Albert et Florence repartirent dix jours plus tard après y avoir assisté et non sans avoir rendu une dernière visite à Hélène, Greg et Jeanne ainsi qu’à Candy et sa famille. Les adieux furent moins pénibles car l’espoir d’un retour prochain atténuait la tristesse de ce nouveau départ, chacun promettant d’envoyer des nouvelles très régulièrement.
De retour en Inde auprès de Louise, Albert et Florence retrouvèrent la quiétude d’une vie simple et malgré que la tâche qu’il restait à accomplir était grande, les jours semblaient s’étirer et ils ressentaient une plénitude qu’il leur était impossible d’avoir dans une ville comme New York, la ville qui ne dormait jamais et dont le rythme influençait les êtres qui y vivaient. La relation des deux époux semblait différente, plus vraie. Néanmoins la rudesse du quotidien des familles pauvres et notamment des enfants dont on ne pouvait soulager tous les maux était parfois source de frustration et de découragement.
Les mois passèrent, Candy attendait un deuxième enfant pour le mois de février suivant et Annie et Patty allaient elles aussi être mères pour la première fois en novembre.
Tout le monde décida de se retrouver dans la petite station de ski pour les fêtes et c’est ainsi que les Cornwell et leur progénitures, deux adorables garçons , un petit Benjamin chez Archie et Annie un petit Mathieu chez Ali et Pathy furent du voyage de même que la famille de Candy enceinte jusqu’au cou. Greg et Hélène se joignirent eux aussi à la famille avec Jeanne afin que Florence puisse profiter d’eux. Il n’était pas question pour Candy de se lancer sur les pistes comme médecin mais elle en profita pour surveiller Jeanne et Arthur aux jeux de neige tandis que les adultes dévalaient les pistes pour les plus chevronnées et que Florence et Hélène prenaient quelques cours de perfectionnement car elles n’avaient guère eu l’occasion de pratiquer ce sport depuis leur enfance. Le soir, les veillées au coin du feu autour de jeux de sociétés ou de jeux de mimes ou encore de karaoké ou à danser étaient agréables et les rires ne manquèrent pas durant ce séjour de quinze jours.
Hélas toutes bonnes choses ayant une fin Albert et Florence durent repartir de leur côté et tous les autres du leur.
Candy mis au monde une adorable Juliette, une petite brunette aux cheveux de jais et aux yeux bleus devant laquelle Arthur était en adoration la cajolant autant que la défendant contre quiconque s’en approchait de trop prêt. Comme un bonheur ne vient jamais seul, le séjour à la montagne de fin d’année semblait avoir été prolifique pour le couple André qui projetait de revenir définitivement en Amérique puisque un bébé s’annonçait pour le début du mois de septembre. C’est en rentrant de France que Florence avait découvert sa grossesse et d’un commun accord avec Albert ils décidèrent de rentrer surtout pour que leur enfant ait une vie de famille auprès de leurs cousins.
C’est ainsi que des jumeaux Camille et Thomas virent le jour.
La grande tante eut le temps de connaître cet heureux évènement et malgré son caractère acariâtre, elle rassembla tous les membres de la famille à l’exception des Legrand dont plus personne n’avait entendu parler pour un repas et y convia même les parents de Terry et la famille de Florence. Elle prit la parole d’une voix plus tout aussi assurée que par le passé.
- Mes chers enfants, vous me voyez heureuse de vous avoir tous réunis ici. Je suis la plus ancienne, la doyenne et mon éducation et mes principes d’un autre âge sont dépassés cependant quatre générations se cotoyent aujourd’hui, et je suis fière de l’esprit de famille qui règne parmi vous tous. Puisse cet esprit vous guider dans vos vies pour assurer le bonheur de vos enfants et la prospérité de notre famille qui a toujours été au cœur de mes préoccupations même si la capacité de mon esprit à juger clairement a pu faillir en certaines circonstances.
- Merci ma tante, soyez assurée que nos liens sont forts car l’affection qui nous lie est entretenue avec une attention constante.
Les principes dont vous parlez ont certes évolué quelque peu au fil des années mais le respect, l’altruisme, l’amour, le pardon et bien d’autres seront transmis à nos enfants comme une richesse et leur éducation ne manquera pas de s’inspirer de chaque sensibilité que chacun de nous a reçu.
La fête se termina tard et la grande tante s’éteignit dans la nuit. La femme de chambre chargée de l’aider à son lever la trouva endormie le visage serein sans vie. L’enterrement eut lieu quelques jours plus tard. Albert ne put s’empêcher de penser qu’elle avait été heureuse de contempler ceux à qui elle avait consacré sa vie avec plus ou moins de discernement sans doute mais avec conviction.
Fin
Edited by Gentillefille - 3/10/2020, 11:05
